Eziel L. Burst | Hudson West

1:30 AM, devant  un orphelinat, 3 ans

La pluie tombe. Goutte à goutte. Elle fait un vacarme. Ce n'est pas une simple averse, c'est une fontaine, un orage. On entend même le tonnerre qui gronde. Et des éclairs qui peuvent illuminer de temps en temps la ville si sombre.
Devant une porte close, un enfant s'y trouve. Ça doit faire une bonne quinzaine de minutes qu'il est là, qu'il ne bouge pas. Qu'il attend, peut-être. Attendais-tu réellement ? Impassible, regard qui ne démontre rien. Regard qui n'a jamais rien démontré, mais là-bas, ils ne le sauront pas.
L'enfant ne fait rien, il tient contre lui un sac plastique dans lequel se trouve un cahier à croquis et demeure assis, là, devant la porte, sans même sembler réaliser que peut-être cette position pouvait représenter un risque de se faire frapper par cette fameuse porte qui ouvrirait au petit matin.

5:30AM, toujours devant la porte

L'enfant s'est endormi alors que l'orage s'est calmé pour se terminer en une fine bruine presque inexistante. Une petite forme sur un perron qui serre toujours ce sac plastique comme si ce dernier détenait le dernier trésor du monde.
Une voiture se gare dans le parking pas trop loin, sans avoir la moindre réaction de la part de l'enfant. Cet être est toujours calmement endormi, inconscient du danger qui pourrait exister. La gestionnaire des adoptions arrive devant la porte et le voit. Le premier réflexe fut de sursauter, la surprise se mélangeant à l'atrocité de la situation. La température était dangereusement descendue cette nuit sans parler de l'orage, comment une mère pouvait seulement laisser l'enfant là, comme ça, sans même des vêtements chauds ? Pourtant le jeune respirait tranquillement. Lui, il ne semblait pas dérangé. Elle tenta de l'appeler sans la moindre réponse.

Un main vint briser tes songes, tes rêves, où des milliers d'araignées se promenaient partout sur toi, dans le creux de tes mains même. Tu les aimais, les araignées. Tu les comprenais, les araignées. Elles te comprenaient aussi. Vous ne parliez pas, mais vous communiquiez tout de même. Virginie t'avait appris à communiquer, à te faire comprendre, et elle t'avait offert en guise de jouets des petits globes oculaires qui rebondissaient et que tu avais rapidement mis dans un bocal pour les conserver. Personne ne sut pourquoi tu avais décidé de les conserver dans un liquide permettant d'empêcher que ce soit abîmé. Ils surent seulement que ce fut fait. Et que ce bocal se trouvait dans ton sac en plus du cahier de croquis.
Tes yeux bleus s'étaient ouverts et tu avais dévisagé le visage inquiet qui te regardait sans réagir. Elle semblait attendre une réaction, un mot, une explication. Pourquoi aurais-tu une explication à donner ? Tu étais là, c'était tout. Virginie t'avait déposé ici. Elle était en fuite. Elle avait tué Némésis. Elle était en fuite et ne voulait pas aller en prison et en voyant cet orphelinat, elle t'y avait laissé. Tu n'avais pas posé de questions, tu n'en posais que très rarement. Tu avais attendu. Elle t'avait dit d'attendre. Tu avais attendu. Mais tu ne l'attendais pas. Tu attendais seulement parce qu'elle t'avait dit d'attendre, et tu ne savais pas ce que tu attendais. Il faisait froid, la pluie était intense, mais tu avais tout de même fait en sorte de ne pas bouger et tu avais fini par t'endormir. Jusqu'à ce que cette étrangère te réveille.

Elle le regardait, bien inquiète par l'absence de réaction. Il était vivant, au moins. C'était tout ce qu'elle pouvait demander. Elle tendit la main, et attendit quelques secondes avant que cet enfant accepte de la prendre et de se relever. Elle le guida par la suite à l'intérieur où elle prit soin de lui donner une serviette et de lui trouver une chambre libre qu'il pourrait personnaliser comme bon lui semble.

3:33AM, orphelinat, 4 ans

Un filet de lumière se faisait voir sous le pas de la porte si souvent close de cette chambre. Ça ne faisait qu'un an que cet enfant bien renfermé se trouvait dans cet établissement, un an qu'on tentait de l'approcher, de communiquer avec lui, de connaître un peu comment il fonctionnait. Bien difficile. C'était bien difficile de savoir ce qui se passait dans la tête de cet enfant qui passait son temps à dessiner et ramassait les araignées qui se trouvaient dans sa chambre. Il ne s'exprimait pas, ne tentait même pas de s'exprimer. Il restait là, à dessiner, dans sa chambre et ne sortait pas même si on tentait de venir le chercher directement. Alors on lui apportait les plats directement sur le bureau pour s'assurer qu'il mange un minimum. Au moins. C'était la moindre des choses.

Il mangeait. Pas beaucoup, mais un peu. Enfin, certaines textures semblaient être entièrement bannies de son alimentation au vu de son assiette qui pouvait demeurer entièrement pleine par moments.
Capricieux ? C'était le mot qui venait en tête. Mais pouvait-on parler réellement de caprice ? Ils ne savaient pas trop. Cet enfant était bien difficile à appréhender, et encore plus à comprendre. En un an, quelques familles l'avaient observé, mais aucune n'avait finalement décidé de l'adopter. Personne ne pouvait les blâmer d'un tel geste. Comment blâmer quelqu'un de ne pas avoir ni la motivation ni l'envie d'avoir un enfant avec qui la communication était impossible ?

Il eût une famille pendant cette année. Mais elle ne le garda que quelques semaines avant de s'excuser, se confondre en excuses, mais expliquer qu'elle n'y arrivait pas. Que c'était bien trop difficile le comprendre, ou seulement entrer en communication avec lui, qu'en fait c'était tout simplement impossible et qu'il ne réagissait à rien. Elle laissa entendre également qu'elle soupçonnait une surdité puisque vraiment, il ne réagissait aucunement au son, mais qu'on pouvait parfois avoir une réaction lorsqu'on allait chercher d'autres stimuli.
Lui ne semblait pas du tout affecté par la situation. Et il se retrouvait à trois heures du matin à dessiner dans sa chambre qui s'était rapidement décorée par des affiches d'araignée, avec son bocal contenant des yeux dans un liquide de conservation sur un meuble.
Doucement, mais sûrement, une boîte entomologique voyait le jour avec des araignées par-ci par-là qui n'avaient pas encore la moindre identification, mais qui étaient épinglées adéquatement. Des livres jonchaient le sol.
On ne pouvait pas dire qu'il était l'être le plus maniaque, le plus ordonné, mais on pouvait facilement le qualifier de perfectionniste et d'appliqué dans le travail qu'il faisait. Ses dessins, malgré son très jeune âge, étaient exceptionnels et très réalistes.

Les araignées. Ton monde. Ton unique monde et le seul qui compte. Elles venaient souvent sur ton bureau quand tu dessinais et tu les caressais. Il y en avait une récurrente avec qui tu étais même devenu familier. Atrax. Tu l'avais trouvé dans les livres des araignées dangereuses. Elle l'était. Très dangereuse. Tu ne pouvais pas expliquer ce qui poussait les araignées à être proche de toi, mais tu ne cherchais pas à l'expliquer non plus. Tu n'avais pas peur d'elles. Bien au contraire. Elles te fascinaient. Tu étais une araignée, tu étais Loxos. Une des leurs. C'était ainsi que tu te définissais. Vif et mortel si tu le désirais. Tu le sentais. Le pressentais. Tu pourrais mettre le monde à tes pieds si l'envie t'en prenait, plus tard. L'envie demeurait éteinte. Tu voulais rester auprès des araignées.
Le dernier détail apporté au dessin, tes yeux se fermèrent et tu t'endormis à même le bureau. Aucun intérêt d'aller dans le lit, n'est-ce pas ? Tu n'avais jamais eu de lit véritable. V. ou Virginie n'avait jamais prétendue être la meilleure des mères, tu n'avais jamais dit quoi que ce soit à son sujet. Elle était ta mère, mais elle n'avait aucun qualificatif. Tu ne donnais aucun qualificatif à qui que ce soit. Tu n'exposais que des faits et le fait était que tu n'avais jamais eu de véritable lit et que tu dormais là où tu pouvais.
Le collier que tu portais toujours et que personne ne pouvait toucher sans risquer de se faire mordre fit un léger bruit en tombant sur le bois du bureau. Ce collier était une simple petite chaîne en argent avec un pendentif en forme d'araignée et plus précisément d'une Veuve Noire.  
La lumière demeura ouverte et continua de diffuser une petite ligne lumineuse en dehors, dans le couloir.

12:15PM, 4 ans, cafétéria de l'orphelinat

Une jeune fille se trouvait dans la cafétéria et parlait avec entrain avec les autres enfants alors qu'à ses côtés se trouvait Eziel qui dessinait, bien concentré sur ce qu'il faisait. Elle était parvenue à le faire sortir de sa cabane. Elle était heureuse, elle affichait un sourire radieux, mais Eziel ne l'avait jamais vraiment regardé sauf lorsqu'elle le dérangeait pour communiquer avec lui. Sa mère était sourde, elle avait rapidement appris la langue des signes, bien que le fait que son père soit entendant lui ait permis également de bien apprendre la langue parlée. Elle était donc la seule qui pouvait se faire comprendre par Eziel et qui pouvait même servir d'interprète auprès des adultes.

Ils avaient tous compris et appris que le petit était tout simplement sourd et que cela expliquait en grande majorité l'absence de réaction, sans pour autant être en mesure de justifier la raison pour laquelle la plupart du temps il se contentait simplement d'ignorer ce qui se passait tout autour de lui. Il était ainsi, c'était tout ce qui pouvait être dit. On avait rapidement observé qu'il apprenait rapidement les mots et était même en mesure de les signer, et de les écrire. Oh, en faisant des erreurs d'orthographe et d'une écriture tremblante, mais de les écrire tout de même. En revanche, s'il paraissait hautement précoce sur certains sujets, d'autres en faisaient clairement défauts. Sa palette de nourriture acceptée était très réduite et un grand nombre de textures étaient bannies. Par ailleurs, il était clair qu'il ne comprenait pas que le partage était la base des relations, pas plus qu'il ne comprenait les relations. Il semblait encore bien ancré dans le "moi" et l'état d'esprit que ce qu'il veut, il doit l'obtenir sans la moindre attente. Il semble également incapable d'écouter et entretenir une conversation signée si le sujet ne l'intéresse pas. Sans parler de sa coordination qui était bien loin d'être parfaite. Si des détails semblaient être clairement précoces, d'autres manquaient.
Il laissait bien des surprises. Sans parler du fait qu'il était très fréquent qu'en sa présence, les araignées soient étrangement actives et sortent de leur cachette. On notait également très souvent des verres brisés et des fenêtres fissurées quand l'enfant bloquait sur un détail de son dessin, sans parler d'étranges phénomènes autour de lui quand on tentait d'approcher le collier qui pendait à son cou. Alors on évitait.

Azïel s'était intéressée à ce garçon surtout parce qu'on lui avait demandé de traduire et d'être interprète, ce qui ne la dérangeait aucunement. Mais elle devait admettre être bien intriguée par Eziel qui avait, d'ailleurs, un nom qui ressemblait énormément au sien. Elle l'avait raccompagné une fois à sa chambre, mais elle n'avait pas eu le temps d'apercevoir ce qui était dedans à part des affiches d'araignées. Elle avait 6 ans, deux ans de plus, et elle n'était clairement pas aussi douée en dessin, et elle n'avait pas souvenir d'être en mesure de lire aussi fluidement que lui à son âge. Cependant, elle avait conscience qu'elle était capable de courir sans tomber et de monter des marches sans trébucher bien avant lui. Alors oui, elle le regardait souvent du coin de l'oeil, bien trop intriguée.
Il devenait un mystère à résoudre.

4:15PM, chambre d'orphelinat, 5 ans

Les années passaient. On pensait que tu attendais encore, peut-être, ta mère. Tu ne voyais pas l'intérêt de leur informer que tu ne l'avais jamais attendu et que tu ne te souciais pas de si elle revenait ou ne revenait pas. Elle pouvait bien rester où elle voulait, ça ne te dérangeait pas. Pas plus que si elle décidait de revenir te chercher. Des probabilités, ce n'était que ça pour toi. Et ça ne changerait pas ta vie. Que tu sois avec elle ou ici. Elle était sans doute la seule qui pouvait appréhender ton monde, elle te donnait toujours des yeux d'araignées pour ta collection et ne cherchait jamais vraiment à communiquer avec toi, te laissant venir de toi-même quand tu voulais savoir quelque chose. Elle avait compris un peu comment tu fonctionnais ou alors elle avait seulement décidé que tu ne valais pas la peine de faire un effort et c'était comme ça qu'il fallait agir avec toi.

Elle avait agi autrement avec Némésis. Némésis était malade. Ses poumons avaient un problème. Tu ne savais pas lequel. Tu n'avais jamais demandé. Elle avait décidé que Némésis était un poids. Némésis vomissait, demandait des médicaments, était toujours en train de tousser et de manquer d'expulser ses poumons même si ce n'était pas vraiment possible. Alors elle l'avait tué. Elle l'avait étouffé en mettant un oreiller sur son petit visage. Et elle t'avait déposé quelques jours après à l'orphelinat.
Et toi, tu étais ici. Tu vivais ici. Tu avais même continué ta collection en faisant des tours dans la forêt, tu avais trouvé différentes espèces d'araignées. La seule que tu ne touchais pas était Atrax. Elle était mortelle, Atrax. Mais ce n'était pas grave, tu savais qu'elle ne te ferait pas de mal.
Ta collection avançait. Tu lisais encore mieux qu'avant. Tu commençais
à pouvoir courir.

Une famille avait voulu t'adopter, mais il y avait un enfant en très bas âge. Il n'était pas malade, lui. Il avait voulu attraper ton collier. Quelque chose s'était passé, tu n'aurais pas pu l'expliquer. Une force étrange l'avait expulsé bien loin de toi et sa tête avait heurté violemment le sol.
Tu étais pas resté très longtemps dans cette famille.
Tu ne t'en souciais pas. Tu étais bien tant que tu pouvais avoir Atrax, tes collections et tes dessins. Alors cette famille, tu ne t'en souciais pas vraiment. Vraiment pas du tout même.

5:12AM, forêt aux abords de l'orphelinat, 6 ans

La pluie fine mouillait tes cheveux sans pour autant attirer une quelconque attention de ta part. Tu marchais en regardant partout autour de toi. La forêt avait cette force qui t'avais toujours attirée et tu aimais passer des moments ici, avec l'odeur marécageuse qui s'en dégageait. Un pas devant l'autre. Tu commençais à être capable d'agencer tes pas pour ne plus t'emmêler et tomber. Et tu voyais ta collection avancée. Tu avais commencé à les identifier. La vie à l'orphelinat était une routine. Tous les jours étaient pareils. On avait commencé à te faire aller dans des classes pour la culture dite générale, mais tu n'écoutais pas, tu te contentais de dessiner, ce qu'ils te disaient ne t'intéressaient pas et tu ne voyais aucun intérêt à tenter d'aller chercher de bonnes notes. Alors tu dessinais. Tu faisais ce qui te tentait. Il paraissait que ce n'était pas comme ça que fallait faire, tu ne voyais pas le problème dans un tel agissement. Tu ne voulais faire que ce qui te plaisait et rien ne semblait être mauvais dans ton comportement. Enfin, selon toi, bien évidemment. Tu restais bien ancré dans ton monde, à identifier tes araignées et flatter Atrax qui venait te voir tous les soirs. Rien de plus, rien de moins. Ta vie demeurait un étrange fleuve sinueux et tranquille sans qui pour le perturber.

Il y avait bien cette fille qui te permettait de communiquer avec les autres et qui te suivait partout. Elle semblait attendre quelque chose de toi, tu ne savais pas quoi. Tu n'avais rien à lui offrir. Alors tu ne lui adressais pas vraiment une attention particulière. Elle était là pour traduire quand tu avais besoin de dire quelque chose, c'était là l'essentiel. N'est-ce pas ? C'était l'essentiel pour toi.  Parfois, tu voyais des larmes dans son regard. Tu ne savais pas pourquoi. Tu ne voulais pas savoir non plus.

10:15AM, chambre d'orphelinat, 10 ans

Dans quelques jours, tu allais avoir 11 ans. On t'avait donné une lettre qui t'annonçait que tu étais admis à Poudlard, une école de magie. Tu avais haussé les épaules. Tu étais seulement ravi qu'Atrax allait t'accompagner parce que les 1ère année devaient avoir un animal de compagnie et que les araignées en faisaient partie. La personne qui était venue te voir avait demandé à Azïel de te dire qu'Atrax devait subir une opération pour enlever la glande à venin. Tu avais accepté. C'était le seul moyen de la garder avec toi. On avait aussi dit qu'Azïel pourrait venir. Qu'elle devait venir surtout et tu avais vu les yeux d'Azïel s'illuminer.

La jeune fille observait le représentant de l'école de Poudlard qui lui parlait alors qu'elle traduisait presque systématiquement ce qui était dit à Eziel. Elle n'avait pas reçu sa lettre, elle, parce qu'elle n'avait pas le moindre pouvoir magique. Ses deux parents étaient sorciers, sa grande soeur également, mais pas elle. Elle avait été la honte de la famille. Elle avait été reniée et envoyée dans cet orphelinat. Alors qu'on lui dise que maintenant elle pouvait mettre les pieds dans cet établissement rêvé ! C'était si beau. Trop beau. Elle s'était mise à pleurer et avait arrêté de signer pour traduire à Eziel sous le coup de l'émotion. Elle ne sera pas une élève et n'aura pas de réelle maison, mais elle sera dans le dortoir des filles de la maison d'Eziel et sera à Poudlard tout simplement. Elle n'aurait jamais pu rêver mieux.

Tu ne comprenais pas les larmes de ta traductrice. Tu n'avais même pas cherché à la consoler. Le concept de réconforter quelqu'un t'échappait tout simplement.
Tu étais "ravi" d'aller à Poudlard. Ça éviterait que des familles te prennent puis te ramènent. Ce n'était pas que tu étais triste, non, tu étais seulement irrité qu'on te déplace pour rien. C'était du stress pour Atrax, et c'était un risque d'abîmer tes collections. À Poudlard, tu ne reviendrais que pour les vacances. Alors c'était mieux. Bien mieux.

11 à 13 ans, Poudlard

Tu avais rapidement fait tes marques dans ce milieu magique qui expliquait certains événements qui se passaient autour de toi et qui t'avaient valu d'être retourné illico à l'orphelinat comme une marchandise. Ce qui ne t'avait jamais réellement atteint. Il était très difficile de t'atteindre. Atrax n'avait plus de venin et restait toujours sur ton épaule, éloignant beaucoup de personnes de toi, sauf Azïel qui n'avait pas le choix de toujours te suivre puisqu'elle était là pour ça, tu étais la raison de sa présence en ces lieux et tu l'avais rapidement compris.
Tu ne donnais pas forcément beaucoup d'efforts dans les cours qui ne t'intéressaient pas. Par contre, les soins aux créatures magiques, tu excellais dans ce cours. Tu t'y mettais toujours à fond. Tu pouvais poser des questions très souvent lorsque le cours finissait et que tu allais voir le professeur... enfin, Azïel posait les questions pour toi. C'était toujours plus simple ainsi.

Tu avais remarqué que ta traductrice ne semblait pas très bien appréciée d'une très grande partie des autres élèves et qu'elle était parfois même bousculée, sans pour autant y réagir. Tu avais rapidement estimé que ça ne te regardait tout simplement pas. Oui, tu manquais d'empathie. Ce n'était pas vraiment quelque chose que tu possédais.

Et puis il y eu cet événement. Tu sais, les portes ouvertes. Ce truc qu'Azïel avait vraiment insisté pour y aller et que tu avais fini par céder. Tu n'aurais peut-être pas dû puisqu'une attaque eut lieu et fit des ravages. Réduit en cendres Poudlard. Enfin, peut-être pas en cendres, tu pouvais parfois avoir un don d'exagération, mais ce qui était sûr, c'était que ça ne laissa presque rien de l'établissement dans lequel tu avais fait tes études jusqu'alors.
Aziel s'était rapidement réfugiée quelque part qui t'échappait, tout ce que tu sus lorsque tout fut.. calmé ? C'était qu'elle était intacte contrairement à ta petite araignée et toi. Une brûlure intense qui aurait dû te faire hurler de douleur et te donner envie de pleurer toutes les larmes de ton corps se trouvait sur ta main. Une brûlure au troisième degré qui allait inévitablement laisser des traces. Mais tu ne ressentais rien. Tu avais longuement observé la brûlure en te demandant ce que la douleur physique était. Toi, tu ne l'avais jamais ressenti.
Celle émotionnelle, tu la découvris alors. Parce qu'Atrax était gisante, sur le sol, à peine respirant et que la panique avait pris tout ton être. Tu avais, pour une première fois, une envie puissante de pleurer, de te cacher quelque part, de te rouler en boule, et de détruire le monde entier pour te venger. Tu découvrais une étrange facette du monde à laquelle tu ne savais pas réagir, tu avais de la difficulté à respirer, et tu serrais Atrax tout contre toi.
Tu fus même incapable de dire comment les choses se déroulèrent ensuite, comment tu fus de retour chez toi. Tout ce que tu pus dire, c'était que l'été, tu la passas avec un bandage entourant ta main et ta brûlure qui prenait bien du temps à guérir. Ce qui n'aidait pas était cette étrange "maladie" dont tu ne connaissais pas le nom et qui apportait une absence totale à la douleur et une réaction tactile très mince. Tu ne faisais donc pas attention et tu finissais toujours par accrocher la brûlure. Alors on te laissait le bandage et le changeait régulièrement.
Toi, tu restais au chevet d'Atrax. Tu passais tes journées au cabinet vétérinaire de la région, tu attendais. Tu ne bougeais pas. Tu attendais tout simplement. Et quand Atrax revint à la maison, tu avais le plus grand mal à la quitter, alors tu l'apportais partout. Elle avait des médicaments à prendre et tu t'assurais de lui donner. Enfin, tu dis elle, mais tu n'oublis pas que c'est un mâle. Tu étais aux petits soins pour ta bête jusqu'à ce qu'elle reprenne ses forces et que tu puisses te calmer, que ton coeur puisse s'apaiser. Tu ne risquais plus de la perdre.