Always on the run [Nath & Ulysse]

Le raton avait des réflexes qui le surprenaient parfois lui-même, le sorcier sous cette touffe de fourrure ébouriffée. Comme celui de sentir à des centaines de mètres, à travers des odeurs de poubelle en tout genre, celle de viennoiseries encore largement comestibles. C'était comme ça qu'il avait trouvé cette poubelle magique, derrière une petite boulangerie pâtisserie. Un soir où le raton qu'il incarnait souvent pour se trouver à manger était aux commandes. Et avait vraiment la dalle. Il s'était fait surprendre, la première fois. Et avait fui pour ne pas se faire attraper. Mais il y était retourné, plus d'une fois. A sa grande surprise, le propriétaire ne l'avait pas chassé lorsqu'il l'avait surpris à nouveau, les fesses à l'air, en train de sortir la moitié du contenu de la poubelle pour en extraire les meilleurs morceaux. Plus surprenant encore, il avait fini par lui mettre une petite portion de côté, dans une gamelle. Et il aurait presque pu devenir habitué à ce lieu, à l'image des chats errants du quartier, s'il n'était pas aussi inconstant dans ses habitudes.

Ulysse n'avait jamais trop prêté attention à l'homme de la boulangerie, même si à force il reconnaissait sa voix. Pourtant, ils n'étaient pas si nombreux, ceux qui se montraient bienveillants envers les animaux considérés comme nuisibles, comme lui. Mais en raton laveur, ses sens étaient différents et prêtaient bien plus d'importance aux dangers immédiats et à la présence de bouffe qu'aux êtres humains autour de lui.

Le reste du temps, c'était différent. Mais parfois, même en tant qu'humain, il ne portait pas suffisamment d'attention aux autres autour de lui. Ca avait été le cas ce soir-là. Il n'avait pas vraiment remarqué la bande de trois gaillards qui rôdaient autour de lui. Et ce ne fut que lorsque l'un d'entre eux l'agressa verbalement et que les deux autres sortirent les poings qu'il reconnût l'un des visages. Il s'était battu avec, la veille. Et l'homme lui avait volé sa recette de la journée. Visiblement, les coups qu'il s'était pris en retour ne lui avaient pas plu. Avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, les trois l'avaient encerclé et les coups tombèrent malgré quelques tentatives d'esquive. Il se mit à réellement paniquer lorsque l'un d'entre eux sortit un couteau. Le coup le frappa et lui arracha un cri. Par miracle presque, il parvint à pousser l'un de ses agresseurs sur le second et profita de ce court instant pour prendre la fuite. Le premier recoin lui servit d'abri pour se transformer. Et quelques secondes plus tard, un petit raton laveur fuyait entre les jambes de ses agresseurs.

Un peu par habitude ou par instinct, ses pas de course le menèrent jusqu'à l'arrière cour de la boulangerie. Peut-être parce que l'homme lui avait semblé bienveillant, les dernières fois. Et qu'il espérait qu'il pourrait l'aider. Il n'avait personne vers qui se tourner en cet instant. Pas vraiment d'endroit où aller. Et une plaie béante dans le flanc. Heureusement que le raton résistait un peu mieux à la douleur. Il y avait de la lumière, à travers la porte qui donnait sur la cour. Un peu désespéré, en panique et sans trop d"option, il fonça vers la porte pour cogner dans un bruit sourd, espérant que ça attirerait l'attention de l'homme de la boulangerie. Et se recroquevilla aussitôt en laissant échapper des couinements, la douleur de ses plaies réveillée par ce nouveau choc. S'il avait gagné l'instinct du raton laveur, il en avait aussi parfois gagné la -non-intelligence.

Aussi pragmatique que Nathanael McDougall pouvait être concernant la solitude avec laquelle un Homme traversait sa vie, ce qui le rendait assez renfermé et passant ses soirées en tête a tête avec un livre le plus souvent, autant que possible il essayait. Il essayait de laisser les gens entrer dans sa vie, maintenant que son quotidien avait changé et que Hyacinthe petit a petit quittait le nid. Cela résultait souvent en un échec et lui qui retournait a sa confortable solitude. Mais aussi, parfois, il acceptait qu'on vienne l'aider. Il avait eu plusieurs apprentis et aides vendeurs sur ces dernières années, il avait même eu quelques amants. Rien de tout ça n'avait duré mais il avait beau être un peu défaitiste face a son petit frère qui lui inventait toujours d'incroyables idées pour le secouer, il restait ouvert. Plus ou moins.


Ouvert, il l'était aussi envers toutes les créatures que le monde magique et non magique mettait entre ses mains. Combien d'animaux blessés avaient ils reccueullis ou soignés avec Hyacinthe, tous les deux versés dans la médicomagie. Parfois il se demandait pourquoi son petit frère n'avait pas choisi Vetomage plutôt, mais c'était partiellement parce qu'il avait peur pour lui. Du coup, lorsqu'il avait vu ce gros raton laveur un soir après la fermeture, les fesses en l'air en train de fouiller bruyamment dans ses poubelles, il n'avait pas reculé. Il avait réparé les dégâts et ramassé les détritus derrière lui a l'aide de la magie, et s'était  attendu a le revoir devzrquer. Un sourire amusé, il s'était dit qu'il devrait sceller ses poubelles un peu plus solidement pour éviter le chaos qui régnait sur le sol de la ruelle. Mais du coup, il préféra laisser quelques restes trop durs pour qu'un humain  puisse les consommer mais toujours bons pour un gros raton. La bête ne venait pas tous les soirs, mais même s'il saurait plusieurs repas, Nathanael ne se faisait pas de soucis. Il était suffisamment gras.


Aussi il fut surpris d'entendre un vacarme assez important un soir du côté de l'arrière cour. Il n'avait eu qu'un aperçu de la bestiole ces derniers temps, et cette dernière semblait ravie de récupérer son butin discrètement d'habitude. Peut être que ça avait attiré d'autres espèces un peu plus magiques et peu partageuses ? Baguette a la main, Nathanael ouvrit la porte et surprit le raton recroquevillé seul dans un coin. Ses sourcils déjà broussailleux se froncèrent d'avantage. Il vit le sang sur le pas de sa porte, et la créature avait l'air de souffrir...


« Où est-ce que tu es allé te fourrer... Là... Ne t'en fais pas.»


Il dit, s'accroupissant mais ne tendant pas la main. Les créatures blessées quelles qu'elles soient n'étaient pas a sous estimer. Il s'excuse auprès du raton et a l'aide de Wingardium Leviosa, le souleva du sol sans avoir a le toucher. De cette façon et sans risque, il l'emmena a l'intérieur, et monta les escaliers qui les menaient dans le salon a l'étage. L'appartement qu'il partageait avec Hyacinthe quand ce dernier revenait de la MUL était modeste, le plancher ancien et grinçant et les murs vieilli, mais néanmoins c'était un lieux chaleureux. Auquel Nathanael tenait, aussi il laissa son regard courir partout avant de se décider pour la salle de bain. Il ramassa une couverture au passage et la déposa dans un coin avant de laisser redescendre la créature dessus. Au moins, le carrelage ici serait nettoyable.


« Ne bouge pas trop... J'aimerais t'examiner, j'espère que ça n'est pas trop ancien. »


Il allait tendre une main et se ravisa. Il serait accroupi a nouveau et amena a lui a travers la pièce une boîte avec le nécessaire (plus que conséquent vu ses études) de soin. 


« Est-ce que tu vas me laisser t'aider ? Le plus rapide j'agis le mieux se sera pour nous deux. »

Au moins, son intuition n'avait pas été trop mauvaise sur ce coup là. Le pâtissier était bel et bien présent et le bruit avait attiré son attention. Mieux encore, comme il l'espérait, ce dernier semblait disposé à l'aider. Ulysse le regarda approcher, non sans rester sur ses gardes. Après tout, il était déjà en sale état, il s'agissait d'être vif pour ne pas risquer d'avantage. Mais l'homme semblait bienveillant. Aussi resta-t-il immobile lorsqu'il s'accroupit. Il laissa juste échapper un petit couinement de surprise lorsqu'il se vit léviter d'un coup, sans prévenir, les quatre pattes en l'air. Il atterrit un peu plus tard sur une couverture, dans une salle de bain, vraisemblablement. Rha bordel. Ces connards ne l'avaient pas loupé. A chaque mouvement, la douleur pulsait un peu plus dans son corps. Il s'étira et s'allongea un peu sur le flanc pour laisser l'homme l'examiner. Quitte à dire adieu à son amour propre, autant se faire soigner .. Et il comptait bien montrer ainsi que l'autre ne craignait rien. Il n'avait nulle intention de le mordre.

L'homme semblait méfiant et il pouvait le comprendre. Mais il finit par sortir tout un attirail de soin. Le désinfectant n'était qu'une entrée en matière, le reste était à venir. Il s'en rendit compte lorsqu'une sensation soudaine de piqûre se fit sentir. Et il se contorsionna pour voir la main de l'homme, une aiguille à la main, visiblement en train de le rafistoler. Une longue inspiration plus tard, il se rallongea sur le flanc, essayant de se concentrer sur la voix douce de son sauveur plus que sur la douleur qui le transperçait. Dans cet état, ce n'était pas si facile de garder sa forme animale. Il se concentra comme il le pouvait, attendant avec impatience la fin de cette torture, tout en prenant sur lui pour ne pas trop bouger ni effrayer l'homme qui voulait bien le soigner. Et lorsque le calvaire prit enfin fin et que l'homme le saucissonna dans une tonne de bandelettes, il le regarda, comme pour le remercier. C'était marrant. Sa tête lui disait quelque chose. Et en même temps, avec son regard de raton laveur, c'était juste une tête d'humain. Qui ressemblait à n'importe quel autre humain. Soufflant, il se remit sur ses pattes et suivit docilement l'homme lorsque ce dernier lui proposa à manger dans un coin de la salle de bain.

Ça ne soignait pas tout mais c'était un petit réconfort. Même s'il s'agissait de restes, ce que lui proposait l'homme était toujours délicieux et il s'en remplit la panse une fois encore. Avant de venir s'installer en boule sur la serviette qu'il lui avait installée au pied de la baignoire.

Il s'était légèrement assoupi lorsqu'une douleur plus aigüe le réveilla. Il avait chaud. Et froid. Un cri s'échappa de sa bouche. Un cri résolument trop... huma... oh. Merde. Il ouvrit les yeux, regarda ses mains, redevenues celles de l'homme qu'il était. Ce n'était tellement pas le moment. Il tremblait sans trop savoir de quoi, sans pouvoir se préoccuper vraiment de son apparence. De toute façon, il n'était pas en état de se transformer à nouveau. Il était en sueur. Visiblement, la cicatrisation ne se passait pas aussi bien que prévu. Les humains résistaient bien moins aux plaies béantes. Il regarda ses côtes, encore enroulées de bandages qui désormais le cisaillaient. Forcément. Si les vêtements se confondaient avec sa peau lorsqu'il devenait un raton et revenaient à leur place lorsqu'il reprenait apparence humaine, il n'en allait visiblement pas de même dans l'autre sens. Et ... pas trop pour ses fils non plus qui tiraient sur sa plaie désormais bien plus grande. Il déglutit. La douleur était intense et... il tenta de se redresser, non sans peine. Il regarda autour de lui. La porte de la salle de bain était ouverte. Sans trop qu'il sache si c'était lui ou l'autre. Etait-il somnambule ? Il fit quelques pas, hagard. Et se figea. Soudainement.

Son regard croisa celui de l'homme lorsqu'il tenta de reprendre pied. Tout était clair à présent. Et en même temps... rien n'aurait pu être plus embrouillé. Il était fiévreux. Mais ce n'était pas la température qui lui faisait reconnaître désormais clairement une ancienne connaissance... et un peu plus que ça. Ce n'était pas une hallucination, n'est-ce pas ? Ces traits... bien plus marqués et pourtant si fidèles à ses souvenirs... Il resta là. La bouche entrouverte, le visage crispé sous la douleur. Sans parvenir à articuler la moindre chose. Il tenta pourtant. Seul un son indistinct sortit de sa bouche pâteuse et sèche qu'il referma enfin. C'était un peu tard pour disparaître maintenant..

"Merci."

Finit-il par parvenir à articuler, lorsque sa bouche lui obéit à nouveau. Et il se laissa tomber à nouveau, crispant tout son corps pour ne pas crier lorsque les fils tirèrent encore plus sur sa peau et lâchèrent les uns après les autres.

Visiblement, il n'était pas le seul à avoir des souvenirs rémanents d'un passé lointain, en cet instant. Le regard perdu et interrogateur de Nathanael le laissait penser, en tout cas. Et en même temps... même si les années passées étaient nombreuses, ils s'étaient suffisamment côtoyés pour que leurs traits respectifs leur restent en mémoire, c'était légitime. Alors... ce qu'il s'était passé ? La question était plus vaste que toutes les terres que ses pieds avaient pu fouler. Est-ce que Nate parlait de l'instant ou est-ce qu'il évoquait le passé ? Et... de toute façon, il n'avait pas vraiment de réponse, ni pour l'un, encore moins pour l'autre. Il secoua la tête sans trouver rien à redire. Et il ne fallut pas plus de temps pour que son corps lâche l'affaire et qu'il se retrouve au sol en tremblant, forçant pour ne pas hurler de douleur.

Voir que Nathanael ne perdait pas son sang froid et semblait savoir quoi faire fut un petit soulagement. Il n'était pas mécontent d'avoir trouvé refuge par ici. Même si l'heure des explications serait sans doute un autre douloureux moment. Chaque chose en son temps. Pour l'heure, il se contentait de serrer les dents et de se tordre pour laisser le grand brun le soigner. Ça n'avait déjà pas été une partie de plaisir de se faire recoudre, mais ôter les points de suture un par un alors qu'ils tiraient sur sa peau, ça relevait carrément du calvaire. Heureusement, les choses allèrent bien plus vite une fois la plaie nettoyée à nouveau. Fallait l'avouer, la magie - bien maîtrisée- était d'une efficacité redoutable pour soigner les blessures. Sa plaie, ouverte sur une large partie de son corps, se referma en quelques minutes à peine. Ses tremblements s'atténuèrent eux aussi, à mesure que la fièvre devait retomber. Suffisamment pour qu'il soit capable de bouger, lorsque le pâtissier l'aida à se relever, une fois ses vêtements changés.

"Je crois que oui."

Marmonna-t-il, un peu surpris par sa voix encore enrouée. Il s'éclaircit la gorge et laissa le pâtissier l'aider, avant d'aller s'affaisser un peu plus loin sur le canapé. La douleur n'était pas entièrement partie malgré les bords de sa plaie refermée et il grimaça un peu en s'installant. Mais comme s'il lisait en lui, ce fut le moment que Nathanael choisit pour lui tendre une potion pour la douleur. Il esquissa un sourire et l'attrapa avant de la boire. Ca avait un goût assez dégueulasse, comme toutes les potions, mais il lui faisait confiance pour l'efficacité. De mémoire, le grand brun était doué en cours, avec les potions comme pour le reste. Et à en juger par son efficacité à le soigner, ça n'avait pas changé. Il laissa sa tête repartir en arrière contre l'accoudoir et fronça les sourcils.

"Comme un type qui n'a pas dormi et s'est pris des coups la veille... Et toi ?"

Il répondit un peu d'instinct, grognon, avant de soupirer en se ravisant. Clairement, Nathanael n'y était pour rien là dedans, et même s'il n'était pas encore au meilleur de sa forme, fallait avouer qu'il y avait du progrès.

"Mais mieux. Qu'avant. Merci pour les soins. Je crois que j'ai frappé à la bonne porte."

Il s'efforça de tirer un peu moins la gueule, faute de sourire franchement. Malgré son état pas très glorieux, il savait à peu près faire la part des choses. Et il était réellement reconnaissant à Nathanael, sans qui il serait en train de se vider de son sang dans l'arrière-cour.

"Et désolé d'avoir ruiné ta nuit."

Il jeta un coup d'oeil à l'horloge murale qui lui confirma que oui, c'était bien le milieu de la nuit. La fièvre avait attendu quelques heures pour se manifester et le réveiller, fallait croire. Ulysse pencha la tête en arrière pour regarder Nathanael, qui le surplombait. Il n'était pas vraiment en état de réagir à propos mais... c'était tellement bizarre, tout de même, de se retrouver face à lui. Et à la fois, tellement familier. Comme si rien n'avait changé et que les années ne s'étaient pas écoulées.

"Je savais pas. Que c'était toi. Tu te poses probablement la question, alors... Les sens ne sont pas du tout les mêmes, quand c'est l'animal qui prend le dessus. C'est surtout les odeurs de nourriture qui l'attirent. La boulangerie, ça sent bon..."

Il se sentait un peu obligé de se justifier. Un peu obligé de combler le silence aussi, alors que normalement ça ne le dérangeait pas tellement. Mais... y'avait pas grand chose de normal, ce soir là. Et puis il lui restait un peu de fièvre. C'était sans doute ça. La fièvre hein.. Et son estomac qui décidait de se manifester en gargouillant. Ulysse posa la main sur son ventre, comme pour le faire taire.

"Alors pâtissier hein... Ça te va pas mal, je crois."

Il plissa les yeux en le regardant avant de reprendre une position un peu plus confortable. C'était curieux. Dans sa mémoire, Nathanael faisait des études pour devenir auror ou.. quelque chose comme ça. Mais il était plutôt bien placé pour savoir que la vie, c'était pas un long fleuve tout tracé.

Rien n'avait particulièrement éveillé de suspicion lorsque Nathanael avait soigne la plaie du raton et a présent qu'il s'occupait d'un être humain, les choses étaient un peu différentes. Des fois où il avait accompzgbedes Aurors plus expérimentés, il avait vu des blessures magiques, des blessures non magiques aussi, causées par tout sauf des accidents. Quelles qu'elles soient, il avait toujours été là pour les soigner. Il ne faisait pas de différence. De la même façon qu'il ne faisait pas de différence entre les personnes qu'il soignait. C'était un choc de reconnaître ce patient ci, pour sur. Mais a part ça... Un être humain était un être humain. Il rejeta son excuse d'un geste de la main et seulement une fois installé sur le canapé sa blessure bandée et soignée et la potion bue il accepta de lui répondre.

« C'est un sacré hasard oui... Que je travaille si tard, et que je sache soigner ce genre de blessure. »

A l'époque ou ils jouaient dehors avec le grand frère d'Ulysse, Nathanael n'avait pas encore évoqué de souhait de devenir medicomage de terrain. Auror semblait une voie qui le suivait depuis le début mais plutôt que l'attaque, protéger les autres lui ressemblait d'avantage depuis le début. Il ne lâchait pas le bandage des yeux. La blessure ne semblait pas saigner a nouveau, ce qui prouvait qu'il avait eu raison de croire que ce n'était pas une blessure magique où en tout cas pas un sort complexe. Il releva les yeux et sourit un peu.

« Oui... Tu ne te souviens peut être pas, mais nos parents tenaient une boulangerie a l'époque. On se voyait plus chez vous, c'est vrai. »

Il glissa dans un silence mélancolique. Il se souvenait de son plaisir a aller chez eux, même si s'il devait se l'avouer, ça avait toujours été pour l'aîné. Ce genre de penser lui serrait toujours le cœur, vu la façon dont ça s'était terminé. Il lisait ce genre de choses chez Ulysse aussi, et plutôt que de l'obliger à parler de tout ça, il changea de sujet.

« Hyacinthe est a l'Université en ce moment, il y vit même. Tu ne le reconnaîtrais pas tellement il a grandit ! »

Et c'était une fierté pour lui. Même si c'était un pincement au cœur aussi parfois, Nate était si fier de son petit frère et du chemin qu'il avait parcouru. 

« Il va être triste de ne pas t'avoir vu. Il t'aimait beaucoup, tu repasseras un weekend ? »

Ça ne lui ressemblait pas de demander, mais il savait que son cadet serait vraiment content de revoir une partie heureuse de son passé. Et pas le chamboulements qui avait suivit. Nathanael se leva et fit un aller retour dans la kitchenette pour prendre une part de tarte qui siégeait ajafrigo pour l'offrir a Ulysse. Il charma l'assiette sur le plan de travail, mais le reste il voulait le faire a la main. Certaines choses étaient juste mieux comme ça. Et puis il lui apporta, et attendit qu'il goûte pour avoir son avis. Il cuisinait pour partager. Il attendit un moment, avant d'être sur que son invité n'était pas mal a cause de sa blessure, avant de demander.

« Qu'est-ce que tu fais ces temps ci ? »



(Pardon pour le retard !!)

Maintenant que Nathaniel l'évoquait, il se souvenait vaguement, de la boulangerie. Les souvenirs semblaient si lointains. C'était une autre vie, vraiment. Il hocha la tête. Il n'avait pas vraiment envie de se replonger dans les siens, de souvenirs. Y'avait pas que du joyeux, à cette époque-là, loin de ça. Repenser à son adolescence, ça l'obligeait à se souvenir de sa famille. Et rien que ça, ça le rendait malade. Il leva un sourcil en entendant parler de Hyacinthe. Et mit un moment à remettre une personne sur ce prénom. Et à faire la connexion. Il avait vu Hyacinthe bien plus récemment que Nate ne l'imaginait, l'an passé, lorsqu'il enseignait à Poudlard. Il se souvenait bien de lui. Un gamin un peu trop sage et un peu timide, qui lui avait rendu bien des services. Visiblement, le garçon n'avait pas parlé de lui à son frère. Et ça n'était pas plus mal.

"Je sais pas s'il se souviendra de moi, tu sais... il était petit. Moi-même je me souviens à peine."

Mentit-il, rejetant au passage ce pan de sa vie. Il aurait préféré que ces réalités ne se croisent jamais. Il n'était pas fier de ce qu'il s'était passé ces derniers temps. Et d'un autre côté, l'idée semblait réjouir le pâtissier. Et il ne voulait pas trop lui faire de peine.

"Mais qui sait, ça vaut le coup d'essayer peut être !"

Il lâcha, avec un enthousiasme forcé. Surtout parce qu'il sentait que l'idée faisait du bien à Nathanael. Et que là, tout de suite, il lui était trop reconnaissant pour le contredire. Pour les soins, pour les restes qu'il lui déposait depuis des mois, pour tout ça. Et pour la tarte qu'il vint déposer juste devant lui, aussi. A l'époque déjà, Nathanael faisait preuve de tellement de bonnes intentions. Peut-être une des rares choses qui n'avaient pas changé. N'écoutant que son estomac, Ulysse remercia le pâtissier et entama la tarte. Il s'efforça de ne pas tout engloutir d'un coup, mais il en était déjà à une bonne moitié lorsque la question du pâtissier l'arrêta net. Il reposa la fourchette et soupira.

Aussi légitime qu'elle soit, il détestait cette question. Encore plus lorsqu'elle venait de quelqu'un qui l'avait connu, avant. Lorsque tout ou presque lui souriait. C'était peu, de dire qu'il n'était pas fier de ce qu'il faisait à présent. De s'être fait renvoyer de Poudlard par sa propre faute. Même s'il leur en voulait encore un peu. Il avait conscience d'avoir ruiné une opportunité rare. Et il détestait l'image que ça renvoyait de lui. Bien plus qu'il détestait sa vie, en réalité. Prof, ça n'avait jamais été pour lui, en réalité. Alors que la musique, il aimait vraiment ça. Malheureusement, ça voulait dire pour l'instant vivre au crochet des autres. Il fronça les sourcils, constatant que le silence commençait à s'éterniser. En même temps.. Qu'est ce que Nathanael s'imaginait ? Il l'avait surpris plus d'une fois en train de faire ses poubelles. Est ce qu'il s'imaginait vraiment qu'il faisait ça pour la beauté du geste ?

"Bah.. Tu sais. La routine, comme tout le monde quoi."

Il répondit presque agressif, en haussant les epaules. Et gigota un peu pour s'allonger sur le canapé.

"Tu dois avoir envie de dormir, je t'ai déjà sorti des rêves en plein milieu de la nuit.. On ferait peut être bien de se recoucher.. Merci encore pour.. Tout. "

Il n'avait pas fini la part de tarte mais son appétit s'était coupé net. Et il préférait couper aussi net la conversation, pour ne pas avoir à se pencher d'avantage sur sa vie. Il serait bien reparti direct mais ses côtes étaient encore douloureuses, malgré les potions et enchantements. Une nuit de sommeil, même courte, à l'intérieur, ne lui ferait pas de mal. Et puis il se doutait un peu que le pâtissier ne le laisserait pas repartir comme ça.

Il attendit que ce dernier s'endorme pour se relever. Impossible de trouver le sommeil. Pour ne pas changer. Avec discrétion, il ouvrit un à un les placards du pâtissier, jusqu'à trouver une bouteille digne de ce nom. Il en descendit une bonne partie avant de retourner s'allonger pour quelques minutes, grognant de douleur lorsque sa cicatrice s'éveilla à nouveau.
Il ne remarqua pas tellement qu'il sombrait cette fois, la bouteille à ses pieds. Il espérait partir avant qu'il ne fasse jour, pour ne pas avoir à recroiser Nate et ne pas avoir à expliquer son comportement. Mais le soleil était déjà haut dans le ciel lorsqu'un mal de tête violent le réveilla, lui rappelant cruellement la réalité. Sa bouche était pâteuse, il y avait un marteau piqueur dans son crâne et ses côtes lui remémoraient la soirée de la veille. Parfois, la vie s'acharnait vraiment à le faire suer jusqu'au bout.

Nathanael était coincé dans sa réminiscence du passé. C'était vrai qu'à l'époque, tout paraissait plutôt comme une évidence. Même s'il était passé par beaucoup de bouleversements, de la découverte de sa magie jusqu'à celle de son premier crush sur un garçon. Tout était plus facile quand leurs parents étaient encore là. Le reste était plus flou, les premières années où Nathanael avait tout lâché, la difficulté d'élever un enfant... Et puis Hyacinthe avait eu sa lettre lui aussi et la vie petit a petit avait continué. Et maintenant ils en étaient là. Le quotidien n'était pas toujours rose loin de là, mais il ne l'échangerait pour rien au monde.

Mais manifestement, son ancien camarade de vacances n'en était pas au même point. Le revoir avait peur être retiré le tact au pâtissier, mais s'il voulait plutôt savoir ce que Ulysse devenait au sens large, celui ci s'était immédiatement refermé sur lui même a la question. Est-ce qu'il pensait que c'était par rapport au fait qu'il l'avait souvent retrouvé dans les poubelles de sa pâtisserie ? Ou au fait qu'il venait de le soigner de ce qui ressemblait a des coups de couteau ou des sorts tranchants ce soir ? L'homme n'allait pas aussi loin dans sa question... Mais comprit que c'était comme ça qu'Ulysse l'avait pris.

« Ça va... Mais tu dois être fatigué. »

Il lui concéda, ne cherchant pas a le forcer a dire ce qu'il ne voulait manifestement pas exprimer. Il lui proposa de rester sur le canapé le temps que le plus gros de la blessure passe et fut soulagé qu'Ulysse accepte. Il lui laissa de côté des vêtements propres s'il voulait se changer, vu ce que la blessure allait faire aux siens, et le laissa faire comme chez lui en montant lui a l'étage. Nathan mit du temps a trouver le sommeil. Il entendit l'autre homme se relever, l'appartement était ancien et -l'ancien propriétaire le leur avait dit-il probablement vivant, et craquait. Si bien que quand il s'endormit pour se lever quelques heures plus tard aux aurores, il lança un charme de silence pour ne pas le réveiller lorsqu'il descendit travailler.

Lorsqu'enfin son invité montra le bout de son nez, Nathanael était en cuisines, en train de préparer les pâtisseries du jour. Il lui tendit un café de façon automatique et lui proposa de poser des fesses sur un tabouret. Il lui demanda s'il voulait piocher quelque chose dans ce qui venait de sortir du four a bois. Il prit une gorgée de sa propre tasse et se remit a pétrir l'une des pâtes a la main alors que le reste se préparait par magie derrière eux pour certaines recettes. Les pommes de coupaient et atterissaient dans un beau cercle dans les moules prévus à cet effet. C'était une danse qu'il connaissait par cœur a force.

« Comment tu te sens ce matin ? Tu voudras que j'y jette un œil ? »

Il proposa. Il avait été médicomage dans le temps...

« Tu restes un peu dans le coin ? »

Il n'était pas sur de savoir comment adresser l'éléphant dans la pièce, mais il était triste a l'idée qu'il disparaisse déjà. Nathanael avait toujours été doué pour écouter mais seulement ceux et celles qui voulaient se confier a lui. Il n'était pas forcément fait pour forcer la main a qui ne voulait pas.

Malgré l'alcool, il n'avait pas eu une nuit aussi paisible qu'il l'aurait espéré. Ses côtes restaient douloureuses et ... son égo avait un peu mal, aussi. Après tant d'années, c'était si étrange de se retrouver aux côtés de Nathanael. Et si dérangeant d'avoir été surpris en train de fouiller ses poubelles, sans qu'il ne lui en ait parlé, jamais. Et de le voir agir comme s'ils s'étaient presque parlés la veille. Autant d'éléments qui lui avaient offert une nuit agitée. Mais il avait fini par sombrer, l'alcool aidant. Malgré ça, on ne pouvait pas dire qu'il se sente plus reposé au petit matin. Il soupira en voyant le soleil déjà haut. Pour esquiver Nathanael, ça allait être compliqué. Et... il n'était pas certain d'être prêt, d'avantage que la veille, pour des explications dans les règles. Mais il devait au pâtissier la moindre des politesses, tout de même. Ce dernier lui avait sauvé la vie. Alors même si ça faisait mal à l'égo...

Il attrapa sa veste et se dirigea vers la source de bruit, à l'étage inférieur. Nathanael était déjà en train de s'affairer. Il s'éclaircit la gorge et le salua, clairement mal à l'aise par la situation. Mais le pâtissier ne semblait pas vraiment le remarquer ou en tout cas s'en préoccuper. Ulysse accepta tout de même de s'asseoir, le temps de prendre quelque chose à boire et à manger.

"Ça va guérir je pense, merci encore ! C'est pas la peine de t'embêter, ça va aller, t'as fait l'essentiel."

Il tenta un sourire. Il lui était reconnaissant, vraiment. Même s'il ne le montrait peut-être pas autant qu'il l'aurait fallu. Nathanael l'avait vraiment tiré d'une sale passe. Le reste allait guérir, il en était convaincu. Même si les conditions sanitaires n'étaient pas au beau fixe, il avait toujours réussi à guérir les plaies pas trop creusées. Il mordit dans un morceau de pain qu'il lui avait donné et hocha la tête.

"Je reste dans le coin oui, ça fait un moment que j'y suis en réalité."

Déjà presque trois ans qu'il avait ramené ses fesses à Londres. Et toujours pas une visite à sa famille. Le temps passait mais sa lâcheté, elle, restait toujours égale. Et en parlant de ça... il hésita un moment à saluer Nathanael et simplement partir. Il se leva puis s'assit à nouveau. Il lui devait quelques explications, il le sentait.

"Je n'ai rien pour te remercier vraiment et tu l'auras compris, ma situation n'est pas... des plus enviables. Mais si je peux te rendre la pareille, je le ferai."

Il retenait ses grimaces. Ça lui arrachait toujours autant la gueule, de parler de sa situation. Mais il savait que le pâtissier n'était ni naïf, ni idiot. Enfin il le supposait. Dans ses souvenirs en tout cas, Nate était plutôt parf.. perspicace. Il inspira plusieurs fois et ouvrit la bouche sans trouver les mots. Avant de se décider enfin.

"Je fais de la musique. Pas loin d'ici, en général. Dans les rues adjacentes. Ça fait... probablement pas rêver, je sais. Mais c'est pas la peine d'avoir pitié. Ça me convient. Au moins autant que ça te convient d'être pâtissier."

Il s'était un peu trop avancé. Reportant la conversation sur autrui pour ne pas s’appesantir sur sa propre situation. De souvenir, ça n'était pas ce dont rêvait Nathanael non plus. Mais les choses avaient changé entre temps. Il avait vu ses hésitations, son regard la veille lorsqu'ils en avaient parlé. Au fond, pourtant, il ne connaissait pas sa vie. Il n'en savait rien, il n'y avait là que du bluff. Nathanael était sûrement plus satisfait de son statut de pâtissier que lui du sien.

"Enfin si jamais tu as envie d'entendre du vieux rock moldu, tu sais où me trouver !"

Il haussa les épaules, forçant un peu le ton léger comme il avait si bien l'habitude de le faire.

La légère tension dans l'air, les non dits, Nathanael les sentait assez facilement. Généralement il lisait assez bien les gens pour savoir quand parler et quand se taire mais parfois aussi, comme avec Ulysse apparemment, il était totalement a côté de la plaque. A croire qu'il était plus doué avec les rayons dans ses poubelles qu'avec les êtres humains quand il s'agissait de ne pas mettre les pieds dans le plat. Ça le peinait, particulièrement, parce qu'il se souvenait des moments passés pendant les vacances avec Ulysse et son frère avec nostalgie. Même s'il devait se l'avouer, maintenant avec le recul, il était peut être plus distant avec le cadet, du fait qu'il aimait secrètement son grand frère. Oh, il avait toujours été gentil avec lui. Mais il n'avait pas autant cherché a le connaître, il ne s'était pas autant intéressé a ce qu'il aimait, ses goûts, ses aspirations... Même si celle d'Hector s'étaient avérées être de plus en plus... Noires et néfastes. Nathanael se souvenait la porte close qu'il avait trouvée. Il se pensait bien plus proche. Il avait cru que ce qu'ils partageaient allait au delà de leur différence...

Et dans l'histoire, Ulysse était toujours une seconde préoccupation. Quand il n'y était plus retourné, Nate ne s'était pas tellement renseigné. Il avait tourné la page et lorsque le drame qui avait touché sa famille était arrivé, il était bien trop noyé dans ses problèmes. Le pâtissier réalisait parfaitement qu'il ne connaissait pas l'homme assit sur son tabouret de cuisine. Mais ça n'en restait pas moins un ami, si ce n'était lointain. Qui avait manifestement des soucis. Et qui n'avait pas envie qu'on y fourre son nez alors... Il respecterait son souhait.

« J'ai des bon restes de l'Université, ne t'en fais pas. »

Il dit avec un lever sourire pour le rassurer. C'était peu de choses, finalement, face a la carrière qu'il avait souhaité a l'époque. Mais s'il pouvait aider, ça l'emplissait de joie. Il avait discuté avec Hyacinthe et depuis, parfois, il se demandait si un jour... Peut être qu'il pourrait reprendre les études. C'était dur de s'imaginer fermer la boutique. C'était un peu comme si lui et son cadet avaient encore un peu leurs parents avec eux, même si le lieux était différent. La pâtisserie avait lié leur famille longtemps. Mais le jeune garçon avait raison sur le fait qu'il avait besoin de vivre sa vie. Seulement, laquelle ? Ulysse survolait sa situation. C'était drôle de le voir comparer sa vie a la sienne, comme si elles avaient deux valeurs qu'il essayait de mesurer. Comment l'autre homme en était arrivé là ? Pourquoi est-ce que ça lui semblait si dur d'en parler...

Tandis qu'il se posait ces questions, Ulysse essayait de se rattraper et Nathanael finissait de préparer les pâtisseries du jour, ralentissant la cadence mais sans s'arrêter. Il n'avait pas pitié, loin de là, il était au mieux désolé de l'entendre si mal a l'aise de lui confier ça. Il attendit qu'il finisse avant d'ajouter.

« Je suis bien le dernier a pouvoir juger de quoique ce soit. Les temps sont durs, chacun fait ce qu'il peut, moi le premier. »

Il dit simplement. Il n'aimait pas qu'Ulysse se dévalorise a cause de sa situation, mais ça n'allait pas être lui qui allait le réprimander. Tout le monde avait eu pitié de lui lorsqu'il avait abandonné son rêve pour s'occuper de Hyacinthe. Certes, c'était difficile, ça l'avait été en tout cas, mais il avait aussi été extrêmement heureux avec son frère. Il sembla perdu dans ses songes un moment et avais mis de côté deux croissants pour lui et deux pour Ulysse, qu'il enroula dans un papier afin de les protéger pour la route. Il sentait bien que ce dernier était prêt a ficher le camps et qu'il l'aurait fait en douce s'il avait pu.

« Je passerai alors. Reviens quand tu veux, maintenant que tu sais. En raton ou pas, ça fait plaisir de voir mes patisseries appréciées. »

Il lui sourit, sincère jusqu'au bout des ongles, laissant la porte ouverte, si jamais.


*To be continued...*

C'était drôle comme certaines choses ne changeait pas. Ulysse se souvenait de Nathanael comme quelqu'un de calme, posé et toujours attentif et la façon dont il se montrait discret et précautionneux vis à vis de sa situation attesait de cela. Il avait l'audace de ne pas prendre ça pour de l'indifférence totale. Vu l'aide qu'il lui avait apportée la veille et encore le matin même, ça aurait détonné. Il sourit au pâtissier. Ça confirmait ce qu'il pensait, ça aussi.

"Chacun fait ce qu'il peut, ouais."

Répéta-t-il, sans en ajouter d'avantage. Il s'en voulait parfois de ne pas faire autrement. De ne pas faire plus, de ne pas faire comme les gens ordinaires. Se trouver un boulot à la con, un appartement, ne plus dépendre du bon vouloir de ses proches et de la générosité toute relative des passants. Mais depuis Poudlard, il n'en avait plus ni l'envie, ni la force. Il était vagabond, dans l'âme. Il s'était fait à l'idée. Du coin de l'oeil, il regardait Nathanael s'affairer, pendant que lui finissait son petit déjeuner. Il ne dit rien, lorsqu'il le vit emballer les croissants. Avec d'autres, il aurait peut-être protesté. Cette fois pourtant, il préférait penser que ça n'était pas de la pitié qui animait le pâtissier, juste sa générosité habituelle et peut-être un reste d'amitié. Alors il se contenta de lui sourire et de le remercier lorsqu'il les lui tendit. Parfois, ça faisait du bien, aussi, de se faire simplement offrir des trucs. Par des gens qui ne cherchaient pas juste à rattraper leur conscience.

Et puis assez naturellement, sentant qu'il commençait à abuser de l'hospitalité de Nathanael et qu'il était temps de le laisser travailler, il se releva. Tendit l'assiette et la tasse qu'il avait utilisées pour les mettre avec le reste de la vaisselle à nettoyer.

"Merci encore. J'essayerai de passer en meilleure forme, la prochaine fois !"

Il poussa la porte de la pâtisserie alors qu'une petite vieille entrait et se tourna une dernière fois vers Nathanael.

"C'est ... précieux, les gens comme toi. Et pas si commun. Merci pour tout !"

Et il laissa la petite vieille et le pâtissier s'en retourner aux pains pendant qu'il passait le pas de la porte. La matinée était déjà bien entamée, le soleil était haut. Et même s'il avait le cœur un peu serré en s'éloignant de la pâtisserie, il se sentait aussi mieux que depuis longtemps. Ça faisait longtemps que quelqu'un ne s'était pas occupé de lui, comme ça. Par simple générosité. Et ça faisait vraiment du bien. Alors il espérait sincèrement pouvoir rendre la pareille à Nathanael un jour. Ou simplement le recroiser et ... le remercier, peut-être, d'une façon ou d'une autre.