Way down we go (Rufus & Silène)

Le petit brun ne put qu’être amusé par les couleurs exécrées par son ami. Y’en avait un qui devait pas kiffer son uniforme, dis donc. Ceci dit, ça ne devait pas être simple de finir chez les Serpentards quand on est né-moldu. Silène était bien content que les maisons à Beaux-Bâtons soient un peu moins dans la compétition. Ou alors c’était lui qui avait jamais été réceptif. Enfin… Il nota pour le bleu. C’était une belle couleur. Il l’imaginait bien dans une jolie chemise bleutée. Et il rigola à l’idée du jaune orangé.

“T’es un Poufsouffle dans l’âme en vrai… Ce choixpeau est sénile… J’aurai adoré partager mon dortoir avec toi y’a quelques années… Ahaha… Heureusement pour la bienséance de Poudlard, je n’étais pas là…”

Il échangea un regard un peu mutin avec le blond, puis se cala sur son torse pour l’écouter sagement. Il pouffa en l’entendant parler de spoutnik. Il était vraiment drôle. Il aimait cet aspect de sa personnalité. Quand il ne ronchonnait pas, Rufus était si charmant. Et si gentil. Il ne l’avait jamais vu comme ça. Si attentionné. Et quelque part, il ne pouvait s’empêcher d’aimer ça.

“Hmm… Je t’imaginais plus aventureux, c’est drôle… ça veut dire que si je t’invite à parcourir le monde avec moi, je serai le guide… Waw, la responsabilité… Tu serais à ma merci…”

Il sourit. Et revenant au russe.

“Tu connais pas Dasvidania, Anastasia ? T’as jamais regardé ce dessin animé ? Mes cousines l’adoraient… Et moi aussi, j’avoue !”

Il l’écouta parler des moldus. Et des sorciers. Et des deux ensemble. Silène était d’accord avec lui sur pas mal de point. Juste… Si les connards moldus s’associaient avec les connards sorciers, ils feraient sans doute beaucoup trop de dommages en s’associant. C’était peut-être pour ça qu’on séparait leurs deux mondes ? Il était peut-être moins utopiste que Rufus. Encore moins depuis qu’il s’était retrouvé martyr de la cause des sang-mêlés et autres nés-moldus. Vraiment. Il aimerait que tout puisse être aussi simple que ce que Rufus imaginait. Dans un monde pareil, son père ne serait pas mort du cancer. Il se perdit un moment dans ses pensées. Le visage de son père en mirage. Il se resaisit et sourit à Rufus, sans avoir suivi les dernières phrases.

Il glissa un peu sur le côté, leurs visages se faisant presque face. Il continua de caresser doucement ses cheveux. C’était un moment d’une grande tendresse. De complicité. Il rigola en l’entendant le flatter.

“Hm, ravi d’inaugurer alors… J’en ai de la chance… Mais ton lit a déjà eu un mec plus mignon dedans…” Il laissa planer quelques secondes de suspens. “... Toi !”

Il lui fit un bisou sur le nez. Innocent. Rigolant à demi. Répondant au sien sur sa joue. Il ne voulait pas aller plus loin. Mais… Ces petits gestes de tendresse semblaient si naturels. C’était plus qu’agréable. Il aurait voulu que cela se produise chaque jour. Que ce moment devienne ordinaire.

L’imitation de son accent était risible et adorable à la fois.

“Je suis né à Paris… Eh oui, monsieur… Et j’y ai grandi. Mon père était fleuriste, donc je suis incollable pour savoir quelles fleurs offrir pour se faire pardonner d’un adultère… Hm… Sinon… J’ai passé pas mal de temps à la campagne chez mes grands parents… Avec mes cousines… C’est elles qui m’ont appris à marcher avec des talons et me maquiller ! Mais j’étais le seul sorcier… Je tiens ça de ma connasse de mère… Donc… J’ai été à Beaux-Bâtons… C’était pas si mal… J’avais ma petite réputation grâce au quidditch et aux gars que j’avais foutu au tapis sur le terrain… C’est trop bien d’être batteur pour ça… Balancer un cognard dans la tête d’un con, c’est trop bien !”

Il pouffa. C’était les bons souvenirs. Il y en avait d’autres moins reluisants. Les rendez-vous entre deux portes, ou dans les vestiaires. Les gars pas très délicats. Les déceptions. Le jugement des autres. Il n’en parlerait pas. Il cala un peu mieux contre son ami.

“Et puis j’ai pris un peu de temps… Après avoir passé mon diplôme… J’ai bossé dans le monde moldu… En fait… Je pensais pas forcément continuer à vivre au milieu des sorciers… C’est pas… C’est pas vraiment mon monde…” Il eut un petit soupir. “Mais ma mère est venu me casser les pieds avec ses idées à la con de suprématiste… Alors j’ai tout fait pour la contrarier. En me payant mes études. En étant moi. Et pas son héritier, tu vois ?”

Il marqua une pause.

“Je parle trop… Non ? Tu sais déjà que j’adore les animaux… C’est le principal… Et… Je sais pas si tu veux savoir un truc en particulier ?”

Silène n'était pas le premier à penser qu'il aurait dû être à Poufsouffle. Lui-même l'avait pensé plus d'une fois. Et les remarques qu'il s'était prises... Elles allaient dans ce sens, lorsqu'elles n'étaient pas purement des insultes de la part des sangs-purs. Plus jeune, il s'était offusqué contre cette classification en maisons. Il avait toujours trouvé ça absurde. Ca réduisait les élèves à une seule facette de leur personnalité.. Et le pire était que la plupart adoptaient cette catégorisation presque sans se poser de questions. A force, il en était venu à se faire à l'idée. Il n'avait plus envie de perdre de l'énergie pour ces conneries. Poudlard était dirigée par des dinosaures aux règles débiles qui ne changeraient jamais. Brièvement, il fit part de ces réflexions à Silène. Mais s'interrompit rapidement en se disant qu'il allait probablement l'ennuyer à être tout le temps critique sur tout. Et puis il préféra parler de lui. Les réflexions du brun le laissèrent un peu songeur.

"Tu feras un super guide, j'en suis sûr ! Je me mettrai à ta merci avec plaisir ! Mais tu risquerais d'en avoir marre avant moi.. "

C'est vrai, il était tout sauf aventurier. Petite frappe, oui, du moins c'était comme ça qu'on l'avait qualifié lors de son passage à Azkaban. Même s'il était mu par des causes bien plus nobles que de la simple petite délinquance. Mais il n'avait jamais été poussé par des envies de voyage. Pas même en Russie. D'ailleurs, il ne connaissait pas le dessin animé dont Silène parlait et lui proposa de le lui montrer, un jour.

Et puis il parla un peu de lui. Ses opinions du monde des sorciers et de celles des moldus. Il s'emporta sans le remarquer, comme toujours. Il était capable de parler des heures sur le sujet. Mais en général, ses interlocuteurs se décourageait bien avant. Cette fois, il prit sur lui, encore une fois, pour ne pas décourager Silène. Et il ne put s'empêcher de rougir à ses flatteries.

"Pfff, t'es con !"

Lâcha-t-il en lui donnant un faux-coup de poing, qui atterrit comme une caresse sur le bras de Silène. Mais il rit aussitôt lorsque ce dernier l'embrassa sur le bout du nez. L'espace d'une demi-seconde avant ça, il s'était demandé de quoi il parlait. Enfin. Avec le brun, difficile de prendre les compliments au pied de la lettre, il le connaissait un peu. Et de toute façon, ça le gênait plus qu'autre chose. En revanche, en apprendre plus sur lui, ça l'intéressait. Alors Rufus but chacun de ses mots, lorsqu'il lui parla de sa vie en France. Il avait l'air d'avoir eu une sacrée vie !

Mieux que beaucoup, il pouvait comprendre l'envie que Silène avait eue de retourner dans le monde moldu. L'idée était restée vive chez lui jusqu'à récemment. A présent, il n'était plus vraiment sûr. Ce qu'il espérait retrouver dans le monde moldu, les postes qu'il convoitait.. Plus rien ne l'attendait. Alors petit à petit, il commençait à se faire à l'idée que sa vie était plutôt ici. Même s'il n'avait pas la moindre idée de ce qu'il en ferait vraiment.

"Tu parles jamais trop ! En tout cas, tu pourras pas me battre à ce jeu ! Et puis j'aime bien t'écouter. Ça devait être quelque chose, Beaux-Bâtons.. Hm..."

Il réfléchit. Il y avait tellement de choses qu'il voulait savoir de Silène. Et à la fois, il aimait ne pas tout connaître de lui. Voir pas grand chose. La part de mystère, ça avait aussi quelque chose de bon.. D'un autre côté.. cette proposition ne se refusait pas. Alors il lui demanda. Ce qu'il aimait faire en dehors de ses études, son plat préféré, même son sort préféré.. Et bien sûr, il répondit en retour. Avec deux grands bavards, la conversation les tint éveillés jusqu'aux premières lueurs de l'aube, et plus encore.
Et c'est presque à contre cœur qu'ils durent sortir du lit de Rufus lorsque l'heure des cours arriva. La journée allait être difficile, pour l'un comme pour l'autre. Son examen de métamorphose allait probablement être une catastrophe. Mais pour rien au monde, il ne regretterait la nuit qu'ils avaient passée.