Private lesson (Rufus & Hyacinthe)

Plus d’un mois avait passé depuis l’incident à Poudlard… Hyacinthe n’avait pas fait parti des élèves pris en otage. En fait, pour une fois, sa timidité lui avait probablement épargné un moment très douloureux. Il avait eu peur de la fête, du monde, des gens de son âge et finalement, cela l’avait protégé d’une menace bien plus grande. Bien plus effrayante. Il avait lu les journaux chaque jour après l’incident. Il avait entendu les gens en parler. Et bien sûr, il avait peur. Affreusement peur. Parce qu’il se savait être de ceux que ces gens voulaient éradiquer. Né-moldu. Lui, son frère. Ils étaient de ces gens que ce groupe pensait indésirable. Et il avait peur. Peur de se faire chasser comme un nuisible. Pourtant, il savait se défendre ? Sans doute. Il n’était pas si mauvais. Il pourrait se défendre. Si la peur ne finissait pas par le tuer lentement, si elle ne l'empoisonnait pas.

Il essayait de tout oublier en se focalisant sur ses études. Il n’avait jamais été aussi studieux. Déjà qu’il était très un vrai rat de bibliothèque au temps de Poudlard… C’était presque maladif. En fait non, c’était maladif. Une façon d’éviter les crises de panique à répétition. Il ne parlait presque plus. Ce qui passait assez inaperçu finalement puisqu’il évitait presque tous contacts humains. S’emmurer dans une autre réalité était plus simple que d’affronter celle qui se dessinait pour les gens comme lui.

Il se serait encore terré dans les livres et dans une non-existence si il n’avait pas eu des obligations morales vis à vis de Rufus. Il avait promis de l’aider depuis qu’il avait repris ses études, et MUL ou Poudlard, c’était pareil. Il devait l’aider. Il le voulait aussi. C’était une personne qui avait fini par compter pour lui. Quelqu’un qu’il aimait sans doute. Sans trop savoir comment. Sans trop savoir pourquoi. Rufus s’était pourtant amusé à lui faire peur au début. Mais maintenant il n’avait plus peur du jeune homme. Dire qu’il se sentait bien avec lui était aussi exagéré mais… La présence de Rufus ne l’intimidait plus.

Il l’attendait assis dans la caféteria, un chocolat au lait devant lui. Il ne savait pas vraiment ce que Rufus avait besoin de réviser, mais il l’aiderait dans tous les cas. Que ses connaissances si compulsivement acquises servent à quelqu’un. Il aperçut Rufus entrer dans la pièce, il lui fit un signe de main. Un timide sourire. Il poussa ses affaires pour lui faire une place à sa table, en face de lui.

“Sa...Salut Rufus…” souffla-t-il d’une voix éraillée.

Sa voix était encore plus inaudible que d’habitude à force de ne plus être utilisée. Il se racla la gorge, et toussota un peu.

“Tu… Tu vas bien ? J’ai… J’ai pas bien compris ce que… Ce que tu voulais réviser aujourd’hui… Tu veux… Tu veux un café ? Ou… Ou un chocolat ?” demanda-t-il, un regard attentionné posé sur Rufus.

Parfois, brièvement, lui venait en tête l'idée qu'il fallait qu'il se fonde dans la masse. Qu'il accepte sa condition de sorcier, qu'il fasse comme tous les autres crétins et se fasse à la magie. Mais c'était toujours éphémère. La magie avait vite fait de lui rappeler tout ce qu'il détestait dans ce monde. Et quand ce n'était pas ses sorts, plus ratés les uns que les autres, c'était les extrémistes de ce monde qui se rappelaient à lui. S'il y avait bien une chose que le monde des sorciers ne pouvait pas envier au monde des moldus, c'était toutes les haines raciales qui le poussaient à s'auto-détruire. Du moins, c'est ce qu'il avait pensé au début. C'était avant de s'en prendre plein la gueule par ces connards de sang-pur, de sa maison pour la plupart. Leur connerie ne s'était pas étiolée avec les années, bien au contraire.

Cette fois, c'était à cette fête, dans laquelle il s'était rendu en traînant des pieds. Il avait eu de la chance, malgré tout. Il était passé entre les mailles, s'en était sorti sans une égratignure ou presque. Juste le poignet foulé. Mais la peur lui avait remué les entrailles. Il s'était senti vulnérable comme rarement depuis sa sortie d'Azkaban. Ce monde n'était pas fait pour lui. Même s'il ne désespérait pas de le changer à travers la carrière politique qu'il fantasmait. Mais il faisait partie de ce monde malgré tout. On ne lui avait pas laissé le choix. Et il n'était absolument pas à la hauteur. Sa baguette en main, il avait été incapable de lancer le moindre sort pour se défendre. Il avait échappé au pire en se faufilant. Sans la moindre magie. Parce qu'il n'y connaissait toujours rien, après tant de temps. Cette année encore, il s'était inscrit au cours de défense contre les forces du mal. Et il était certain que cette fois encore, il n'en sortirait rien de bon. Il savait se battre. Avec ses mains. Mais il était incapable de se défendre avec une baguette.

Les exercices notés qu'ils avaient le surlendemain en cours n'étaient qu'un prétexte. La véritable raison était là. Il voulait se sentir un peu moins vulnérable. Alors il avait décidé de demander de l'aide à Hyacinthe à nouveau. Avant qu'il ne change d'avis et se ravise une fois encore.

L'après-midi était déjà avancée lorsqu'il le rejoignit à la cafétéria. Au fil du temps, Rufus avait appris à apprécier la compagnie du petit blond. Au départ, c'était surtout par opportunisme qu'il avait commencé les cours de soutien avec lui. Mais finalement, il l'aimait bien. Même si son innocence, teintée de naïveté, l'agaçait parfois. Il le salua à son tour et dû lui faire répéter deux fois sa proposition, n'entendant rien avec la voix à peine prononcée de Hya et le bruit de la cafétéria.

"Je veux bien un café ouais. Merci d'être venu !"

Il fit signe à l'elfe de maison pour qu'il vienne les servir et se retourna vers le blondinet. Pas besoin d'être psychiatre pour voir qu'il n'avait pas l'air au top de sa forme. Mais... justement, il n'était pas psychiatre et pas forcément bien à même de l'aider.

"J'ai un exam après demain. Défense contre les forces du mal." Il grimaça un peu.

"Je suis nul là dedans. Et.... je crois qu'il faudrait que je sache me défendre. Un peu."

Il regarda son poignet encore enroulé dans des bandes pour le maintenir immobile. Bien sûr, un médicomage aurait pu le guérir. Mais il refusait de laisser la magie disposer de son corps. L'elfe lui rapporta son café et il attrapa le gobelet de ses deux mains pour se réchauffer.

"Et toi ? T'as pas l'air en grande forme, qu'est-ce qui t'arrive ?"

Les pincettes ne faisaient pas toujours partie de son attirail. A quoi bon tourner autour du pot pour ne pas dire franchement ce qui respirait l'évidence ?

La présence de Rufus avait quelque chose d’habituel, de rasssurant. Il aimait bien le garçon, son côté rebelle avait d’abord causé quelques frayeurs au blondinet, mais finalement, avec le temps, il éprouvait quelque fascination pour sa personnalité anticonformiste, revêche. Il ne trouvait pas Rufus malfaisant, peut-être se trompait-il ? Ou alors Rufus était plus gentil avec lui qu’avec un autre parce qu’il connaissait son frère ? Il n’en sait rien. Mais il aime bien Rufus. Cela ne le dérange pas de lui offrir de son temps. Sans rien attendre en retour. C’était sans doute ça l’amitié ? Peut-être que Rufus était son seul ami ? Il ne sait pas trop. Il aime juste bien le Serpentard.

“De...De rien… J’avais… J’avais rien de mieux à faire de toutes...de toutes façons…”

Il sourit à Rufus, bienveillant. Il écouta son ami. Défense contre les forces du mal. Ce n’était pas sa spécialité, mais pas non plus son plus gros point faible. Il avait juste tendance à ne pas formuler ses sorts à dire vrai. Il passait pour quelqu’un de très fort avec cette facette de sa pratique magique, alors qu’en réalité, c’était bien plus simple pour lui de ne pas parler, de juste concentrer son mental en accord avec la magie. Alors, pas dit qu’il soit le meilleur apprenant pour Rufus. Mais il essaierait. Il acquiesça. Et eut un regard un peu inquiet vers le poignet bandé de Rufus. Il aurait pu soigner ça. Seulement, son ami ne voulait probablement pas de ce genre d’aide.

“Je… Je peux essayer… De t’apprendre… Mais… Je suis… Je suis sans doute pas le meilleur… Mais… On peut essayer… Je suis sûr que tu peux y arriver… Si moi j’y arrive alors… Tu peux !”

Il sourit, tentant d’être optimiste. Il but quelques gorgées de son chocolat chaud. Le goût sucré avait quelque chose de particulièrement rassurant. En ces périodes de trouble. Il relève le nez à la question de Rufus. A-t-il l’air si inquiet ? Il fronça un peu les sourcils. Il ne sait pas bien quoi dire. Qu’il a peur ? Qu’il ne peut rien contre ces angoisses ? Il ne sait pas. Il se mordilla la lèvre.

“J’ai… J’ai un peu peur… Avec tout ce qui se passe… Tu sais… Avec Nathanaël… On est pas… On est pas vraiment l’idéal de ces extrémistes… Alors… Je suis pas très… Serein… Déjà… Déjà que je suis pas la sérénité même…”

Il a un petit rire, un peu nerveux. Il se sent idiot à expliquer ça. Surtout que Rufus n’est pas beaucoup mieux loti qu’eux.

“Toi aussi… Enfin… J’imagine que tu es pas… Le genre à avoir peur… Pas comme moi…”

Il se mordille à nouveau les lèvres. Il se sent idiot. Ridicule un peu. Et si démuni. C’était à lui que Rufus demandait de lui apprendre à se défendre. C’était assez ironique. Il soupire doucement. Il secoue la tête.

“Tu vou...voudrais travailler… quels sorts ? On… On sera sans doute mieux… Dehors ?”

Parfois, il se disait que Hyacinthe avait une bien trop haute opinion de lui. Penser qu'ils étaient au même niveau en magie, c'était une douce illusion et Rufus n'y croyait pas une seconde. Le blondinet était un bosseur. Et il aimait la magie. Deux choses qui à elles seules pouvaient marquer un fossé entre leurs niveaux respectifs. Ce que Rufus admettait sans rougir. Il ne cherchait pas à être le meilleur dans un art qui le répugnait. Juste à le maîtriser suffisamment pour clamer sa légitimité.

"On te le dit sans doute pas assez mais tu te sous-estimes. Si tu crois qu'on a le même niveau en magie, toi et moi, t'as un sacré souci de confiance en tes capacités. Ou alors t'es vraiment mauvais en magie."

Il le regarda, presque désolé. C'était loin d'être la première fois qu'il lui disait qu'il devrait avoir d'avantage confiance en lui. Même s'il savait que ça ne marchait pas comme ça.. Il le pensait, toutefois.

"Tu sais, c'est qu'une petite bande d'allumés. Ils sortent le grand jeu mais ils ont autant d'effet que des petits pétards mouillés."

Il haussa les épaules. C'était pas tout à fait ce qu'il avait pensé, lors de la soirée. Il n'avait pas trempé son boxer mais ce n'était pas passé si loin. Mais il avait pris du recul, depuis. Après tout, il avait survécu. Et sans magie, en plus. Alors pas de raison de s'en faire. Ces connards de sang-pur n'étaient qu'une petite minorité. Quel mal pouvaient-ils faire ? Leurs idéaux ne tenaient pas la route.

"Et puis ton frère sait se défendre. Et toi aussi. Alors aucune raison de flipper."

Et ça, il pouvait l'affirmer. Il avait vu Nathanaël rembarrer des mecs sans difficultés... plus souvent pochtrons que mages noirs, il est vrai, mais tout de même.

"C'est leurs idéaux de connards qui me font peur. Un peu. Enfin de voir qu'il y a des gens suffisamment stupides pour les croire. Mais eux, pas tellement."

Il but une gorgée et manqua de la recracher. C'était brûlant. Il venait de se cramer la langue. Aoutch. Pour faire comme si de rien n'était et ne pas passer pour un crétin qui s'était brûlé en voulant se la jouer un peu, il souffla sur son café et ravala sa salive et sa fierté, espérant que la douleur passerait vite. Parfois, faudrait vraiment qu'il apprenne à réfléchir avant d'agir stupidement.

"On a un exam sur les sortilèges informulés." Il grimaça un peu. "C'est la merde ce truc là. Je ne sais déjà pas faire un sortilège formulé. Et puis ça sert à quoi de ne pas parler ? A part si t'as un truc coincé dans la gorge, genre..." Il se tut soudainement, se rendant compte que l'image qu'il venait d'avoir en tête était tout sauf élégante. Merci cerveau, vraiment, toujours au rendez-vous au bon moment.

"Enfin bref. Ouais, on sera sans doute mieux dehors. Même s'il pèle."

Il attrapa sa tasse de café, songeant à l'idée de le finir d'une traite avant de se raviser. Il n'était pas complètement con, il n'avait pas envie de se cramer la langue une nouvelle fois. Et hors de question de lancer un sortilège pour refroidir son café. Non seulement, il suffisait de foutre le nez dehors mais en plus de ça, il était capable de le changer en ciment avec sa chance.

"Je te suis !"

Tu te sous-estimes. Probablement. C’était son truc de ne pas voir sa valeur alors qu’il voyait toutes les qualités des gens l’entourant. Bienveillant envers tous excepté lui-même. C’était sans doute un soucis. Il se mordilla la lèvre. Désolé. Mais il ne voyait pas Rufus si mauvais. Et lui, il n’était pas si doué si ? Alors, oui, il avait eu d’excellentes notes à ses examens mais les notes, ce n’est qu’une lettre griffonnée sur un papier. Dans la réalité, il n’était pas si fort. Sa connaissance de la magie ne rattrapait pas ses faiblesses intrasèques.

“Peut-être… Que… Que tu es trop dur avec toi-même aussi…” se défendit-il mollement.

Des pétards mouillés. L’image le fit sourire. Il espérait vraiment que Rufus ait raison sur ce point. Il ferait tout pour se convaincre que son ami avait raison. Pour avoir moins peur. Mais ces gens lui faisaient le même effet que les monstres dans le noir quand on est gosse. Ils faisaient naître en lui une peur irrationnelle. Et puis, il n’était pas inculte, il avait suivi les cours d’histoire de la magie, il savait bien que ce genre d’illuminés avaient pu avoir beaucoup de pouvoirs par le passé. Qu’est-ce qui empêchait l’histoire de se répéter encore et encore ? Peut-être qu’il était trop pessimiste ? Il n’en savait rien. Mais chaque nuit, il craignait que ses cauchemars n’en soient pas complètement…

“Tu dois… Dois avoir raison… Il faut… Que je me ressaisisse, c’est tout… Tu as raison… On… On va pas se laisser avoir par des croque-mitaines aux idées réchauffées…”

Il sourit. Comme pour se donner du courage. Et manqua de rire en voyant son ami se brûler avec son café. Son geste ne passa pas complètement inaperçu, mais Hyacinthe se mordit la lèvre pour ne pas rire de la rupture dans l’intensité dramatique de la scène. Il aimait vraiment bien Rufus. Il lui trouvait ce charisme qu’il aurait aimé avoir. Cette désinvolture. Ce panache. Alors oui, il était peut-être meilleur élève, il avait peut-être plus d’affinité avec la magie, mais la force de caractère que son ami avait été tellement plus belle et valeureuse.

Il reprit son sérieux en apprenant le sujet de son examen. Oh. Finalement, il tombait peut-être à point pour l’aider. Sans être un spécialiste en la matière, il maîtrisait mieux les sortilèges informulés que la plupart des gens de son âge. Une force tirée de ses plus grandes faiblesses. Il écouta et fronça les sourcils, un truc coincé dans la gorge ? Une boule de poils comme les chats ? C’était une drôle d’idée, non ? Ou alors il avait raté quelque chose ? ça avait l’air de gêné Rufus… A quoi diable avait-il pu penser ? Il n’en savait rien, c’était énigmatique. Tant pis. Ce n’était pas la première fois qu’il ne comprenait pas tout.

“C’est… C’est… Utile… Quand c’est difficile pour toi de parler… Ou pour rester… Discret… Avoir l’effet de surprise… Tout ça… Et puis… C’est quand même… Fascinant non ? De réussir à faire ça… Non ?”

Il sourit, terminant son chocolat chaud. Rangeant sa cuillère et sa tasse, la tendant à un elfe de maison qui passait par là, le remerciant poliment pour son aide, ce qui surprenait toujours un peu les elfes qu’il soit si gentil avec eux. Il attrapa son sac, et commença à partir vers l’extérieur, côte à côte avec Rufus.

“En fait… Pour… Ces sorts-là… Il...Il faut que tu focalises ton esprit… Sur la magie… Que tu la ressentes… Tu comprends ? Il faut que ta baguette devienne… Comme une partie de toi ? C’est peut-être… ça qui te pose soucis ? Tu… Enfin… J’ai l’impression que tu ne laisses pas la magie… communier avec toi… Plus tu la repousseras et plus cela te sera compliqué de la comprendre… Tu… Tu comprends ?”

Hyacinthe établit leur camp de révision dans un coin calme du parc du campus, sous un arbre, posant ses affaires au pied de celui-ci. Il regarda Rufus. Il ne savait pas bien par quel bout ils pouvaient commencer.

“Dé...Déjà, essaie de me lancer un sort… Quelque chose de simple… Un Petrificus totalus ? En parlant ?... Tu arriveras à me… Libérer ? Ou tu pré...Préfères que je me protège ? Et… Après… On essaiera sans que tu parles… O...Ok ?”

Ca devait être un truc commun aux McDougall, ça, d'avoir une estime des autres un peu trop haute. Ou peut-être que c'était juste envers lui, mais il en doutait. En tout cas, le grand frère lui faisait la même impression. Rufus ne releva pas vraiment. Il n'estimait pas qu'il était trop dur avec lui-même. Juste se rendre compte des réalités. Il n'était pas fait pour la magie et elle n'était pas faite pour lui. Ce que ce monde enchanté ne voulait définitivement pas entendre.

C'était bien plus facile de dédramatiser lorsque quelqu'un d'autre s'inquiétait à sa place. Ici, Rufus avait le beau rôle. Seul, il avait flippé, comme tout le monde, à cette soirée. Et après aussi. Mais face à Hyacinthe, c'était plus simple de rationaliser les choses. Et puis.. ça l'avait toujours un peu amusé, d'un peu forcer son côté casse-cou et intrépide, face au blondinet. Un peu d'admiration, de temps en temps, c'était pas si courant et toujours agréable. Et ... ça risquait de ne pas durer. Sortir des belles phrases en parlant de faits passés, c'était une chose, s'attaquer au sujet du jour c'en était une autre. Rufus savait déjà que l'admiration allait en prendre un coup en essayant de s'entraîner. Et si ça n'était pas elle, son amour propre, du moins, prendrait cher, ça c'était certain. Il fit la moue en entendant Hyacinthe argumenter en faveur des sortilèges informulés. De toute évidence, il n'était pas face à la meilleure personne pour trouver ces derniers d'une inutilité sans nom. Fallait être sourd et mal voyant pour ne pas se rendre compte que le blondinet souffrait de troubles de la parole. Alors ouais, peut-être que dans son cas, c'était utile. N'empêche que de là à en faire une formalité... Il n'était pas trop sûr des autres cas d'usage.

"Je serai peut-être fasciné le jour où j'y arriverai. En attendant, je préfère penser que c'est surtout de la frime."

Lâcha-t-il sans quitter sa moue. A son tour, Rufus attrapa ses affaires, prêt à suivre le blondinet en dehors de la cafétéria, sa tasse de café toujours à la main. Rufus pouffa un peu en entendant Hyacinthe parler de sa relation à la magie. Ce n'était pas la première fois qu'il entendait ce genre de choses, ni même la dixième.. Ses profs lui avaient rabâché pareils discours à propos de faire corps avec la magie depuis la première année. Et... autant dire que celles-ci rebondissaient face à un mur.

"Ça, je te confirme, j'ai pas tellement l'intention de la laisser.. communier avec moi. Et ... franchement... " Il tourna le regard vers la poche arrière de son jeans, d'où dépassait sa baguette.

"Je suis pas certain que j'ai envie de laisser ça devenir une partie de moi. Et je crois qu'elle ne veut pas non plus. On n'est pas vraiment super potes. Et c'est elle qui a commencé, hein !"

Ce n'était pas forcément dans ses habitudes de s’apitoyer sur son sort mais vraiment, il restait persuadé que sa baguette n'y mettait pas du sien et se montrait particulièrement désobéissante. De là à dire que ça n'était pas de sa faute s'il était nul ? Il n'y avait pas beaucoup de pas à faire..

En parlant de pas à faire, Hyacinthe s'arrêta après avoir traversé une partie du parc et Rufus l'imita, laissant son sac glisser d'une de ses épaules tandis qu'il maintenait encore sa tasse de l'autre.

"Je cherche pas vraiment à la comprendre, tu sais. Juste à la maîtriser suffisamment."

Il prit un instant pour finir son breuvage, enfin à température acceptable, avant de prendre sa baguette en main. Et.. il leva un sourcil surpris en entendant son tuteur. Il n'avait pas peur... vraiment pas peur. Ou alors il était vraiment beaucoup trop optimiste.

"T'es sûr que tu préfères pas un sort qui ne risque pas de te retomber dessus ? Ou alors faut que tu sois sûr de ton sortilège de protection.. "

Ça confirmait vraiment ce qu'il pensait. Hyacinthe avait une beaucoup trop bonne opinion de ses -non-talents pour la magie, malgré les entraînements qu'ils avaient fait tous les deux. Il tenta à plusieurs reprises, sans grande conviction ni force. Les brins d'herbe bougèrent à la seconde itération ce qui fut la seule réaction. Et c'est lorsqu'il était sur le point d'abandonner, baissant déjà les bras en grognant qu'il capitulait, que le sort partit de sa main sans qu'il ne le contrôle vraiment. Il ne s'en rendit compte qu'en voyant Hyacinthe se figer et commencer à partir en arrière... Oups !

Se précipitant, il se jeta derrière lui pour le rattraper avant qu'il ne tombe et accompagna le mouvement pour l'allonger dans l'herbe, rigide comme un tronc d'arbre.

"Merde ! J'ai pas fait exprès, je voulais pas ! Pourquoi tu t'es pas protégé ?"

Il se souvint qu'il venait de dire qu'il abandonnait. Hyacinthe avait probablement baissé sa garde à ce moment. Ou même avant, voyant qu'il n'arrivait à rien. Hm... Et...

"C'est quoi déjà la formule pour y mettre fin ? Rha ! Ce qu'on est cons ! T'aurais dû me dire ce que c'était avant..."

Il parlait pour lui-même plus qu'autre chose, Hyacinthe ne pouvant que l'écouter en cet instant. Putain, ce qu'il haïssait la magie. Chez les moldus, on menottait les gens et au pire, on perdait la clé. Suffisait de trouver une pince et hop, plus de problèmes. Il regarda autour d'eux. Il y avait bien des gens au loin mais.. c'était hors de question de courir jusqu'à eux pour leur demander. Il avait encore un peu d'honneur, merci bien. Jetant un coup d'oeil à Hyacinthe, probablement pour s'assurer qu'il respirait encore et qu'il ne le foudroyait pas trop du regard, il se dirigea vers son sac et attrapa son livre de sortilèges. Et il retourna s'asseoir auprès du blondinet.

"Tu sais probablement la page, et tout hein. Mais moi j'en sais rien du tout. C'est pas souvent que je les ouvre ces livres. T'as vu, la reliure est encore quasiment neuve, malgré les années. Ces pages, elles voient pas souvent la lumière du jour."

Et probablement qu'elles le devraient un peu plus. Il l'ouvrit à la page du sommaire et se tourna vers Hyacinthe à nouveau.

"Je ... compte sur ton regard pour faire des miracles. Au pire, le sortilège doit avoir une durée limitée..."

Il repensa alors aux sortilèges informulés. Est-ce que Hyacinthe pouvait se libérer tout seul ? Auquel cas, il leur aurait finalement trouvé une réelle utilité face à des nuls comme lui...

Définitivement leurs oppositions étaient vraiment marquées. Mais après tout, les opposés s’attirent non ? Quoique dans leur cas, il n’y avait sans doute que Hyacinthe qui appréciait la présence de l’autre jeune homme. Il ne savait pas vraiment ce que Rufus lui trouvait, il venait souvent seulement pour avoir un coup de main. Probablement que leurs rencontres n’étaient motivées que par un certain intérêt. Hyacinthe ne s’en formalisait pas.

En entendant son rapport à sa baguette, Hyacinthe n’était pas très étonné que la pratique de la magie lui soit compliqué. C’était vraiment bizarre cette défiance qu’il avait pour la magie. Il peinait vraiment à comprendre ce qu’il repprochait à la magie. Après tout, elle avait plutôt tendance à leur simplifier la vie quand on lui accordait un tant soit peu de crédit et de confiance. Alors pourquoi ? Hyacinthe n’avait jamais osé lui parler de ça. Sans doute parce qu’on ne réagit pas comme ça pour une raison joyeuse. Il ne voulait pas forcément remuer le couteau dans une plaie.

“Parfois, il faut savoir enterrer… La...La hache de guerre… Non ? Tu… Tu pourrais entamer… Les réconciliations ?”

Et puis, Hyacinthe ne voyait pas comment ils pourraient faire pour apprendre s’il n’arrivait pas à s’entendre avec sa baguette. Toutes les baguettes ont leur caractère. Il est nécessaire de le respecter. De communier avec.

Installé dehors, Yaya semblait le plus confiant des deux. Il acquiesça. De quoi devait-il avoir peur ? Ce n’était pas un sort mortel. En soi, il ne risquait pas grand chose. Vraiment. Et puis, il fallait bien un sortilège assez puissant pour qu’il ait un certain impact.

“Je… Je suis… sûr de moi ! T’en fais pas !”

Et puis au pire, il serait un peu figé ? Enfin, en cours de défense contre les forces du mal, il s’était toujours bien débrouillé pour les sortilèges de protection. Mieux qu’en attaque. Sans doute parce qu’il avait toujours vécu en se défendant, jamais en attaquant. Il sourit, essayant de rassurer son ami. Ils allaient bien y arriver !

Du moins, c’était ce qu’il pensait. Mais il avait sans doute rudement surestimé son confrère. Et il avait aussi surestimé sa détermination. Il baissait les bras beaucoup trop vite. Pas étonnant qu’il galère s’il se décourageait si vite. Hyacinthe avait dû travailler pour obtenir son niveau, bien plus l’année de ses 11 ans que maintenant, mais avec Rufus, il y avait un arriéré de travail manqué à rattraper visiblement. C’était à se demander comment il avait fait pour entrer à la MUL. Hyacinthe le voyait bien s’énerver du peu de résultat… Il devait le rassurer, il baissa sa garde, avançant vers lui pour l’apaiser et…

Mince. Ça, c’était pas prévu. Il n’eut pas le temps d’anticiper le sort, et le prit en pleine face. Dommage. Il se retrouva rattrapé à la volée par le Serpentard. Ouf. Il avait de bons réflexes quand même. A défaut d’avoir un bon niveau en magie. On ne peut pas être mauvais en tous points. Il aurait bien répondu à ses questions mais… Non, définitivement, il ne pouvait pas bouger les lèvres. Sinon, il aurait pu dire à Rufus qu’il n’avait pas prévu qu’un abandon soit compatible avec une attaque surprise… Et oui, par contre, ça avait été idiot de ne pas penser à vérifer qu’il connaisse le sortilège pour le délivrer. Il avait cru que Rufus le savait. Définitivement, il l’avait surestimé. Il leva les yeux au ciel en l’entendant ironiser sur l’état de son livre. Il n’y avait pas de quoi être fier.

Heureusement qu’il avait encore sa baguette à la main. Il allait pouvoir se libérer normalement. Il fallait juste qu’il réussisse à se concentrer. Ce qui n’était pas simple avec Rufus qui parlait à côté. C’était dur de ne pas pouvoir répondre à Rufus. Ce mutisme complet était pire que ses difficultés habituelles. Là, y’avait pas moyen de lutter. Il devait vraiment se concentrer.

Il dut s’y reprendre à plusieurs fois avant de sentir que son sort informulé fonctionnait. La libération ne fut pas aussi rapide et franche que d’habitude, mais il put rapidement bouger sa main, ses lèvres. Et le reste suivit en quelques secondes. Mais il était quand même resté comme ça quelques minutes, et ça avait été d’un grand inconfort.

“Je… Je croyais que tu… connaissais la formule… Pour annuler le sort… Bon sang… Rufus… T’as dormi pendant… Combien de cours ?”

Il eut un petit rire après cette question. Il ne pouvait pas lui en vouloir beaucoup plus. Mais… Quand même… Il attrapa le livre de Rufus, et lui ouvrit à la bonne page.

“La prochaine fois… Mets toi d’accord sur un code… Pour que mes yeux t’aident… Gros balourd…”

Il lui donna un petit coup de coude. Pour se venger un peu. Il eut quand même un soupir soulagé…

“On… On va partir sur… Quelque chose… De plus inoffensif… Un sortilège de lévitation, ok ? Tu… Tu maîtrises ça ?”

Donc les sortilèges informulés servaient à quelque chose, parfois. C'était un parfait cas de preuve par l'exemple. A croire que Hyacinthe l'avait prémédité pour lui prouver ce qu'il avançait. Ce dernier parvint à sortir de son immobilisme avant que Rufus n'ait réussi à faire quoi que ce soit. Il en était encore à chercher la page.

"Oh, ça va, je l'ai sûrement connue un jour..." Il râla un peu pour la forme, vexé de se faire remettre à sa place alors que c'était totalement légitime. Et puis il releva le regard vers Hyacinthe. Et fit une petite moue.

"Désolé. Je pensais pas que tu baisserais la garde."

Il grimaça un peu. Et le répit fut de courte durée avant qu'il ne reparte au quart de tour, en entendant les idées foireuses du blondinet. S'il maîtrisait le sortilège de lévitation ?

"Bien sûr ! Aussi bien que le sortilège pour faire des compotes bio à l'orange à partir de feuilles mortes et de restes de citrouilles."

Et à tous les coups, un truc pareil pouvait exister. Rufus dévisagea le blondinet. Il le surestimait vraiment beaucoup. Trop. Alors certes, il le connaissait de nom, le sortilège pour faire flotter des trucs. Il l'avait même réussi le temps de passer ses examens, comme un grand garçon. Mais... il n'était pas familier avec au point de vouloir s'amuser à faire voltiger son prof de soutien. Il avait un peu d'estime pour lui, quand même.

"T'es vraiment sûr que c'est plus inoffensif ? Parce que je crois qu'il vaut mieux encore être pétrifié que de se retrouver à dix mètres du sol et tomber brutalement, hein. Bon, ça n'avait pas l'air très agréable d'être pétrifié, c'est vrai..."

Il réfléchissait en même temps, à voix haute. Mais des sorts inoffensifs, on ne leur en apprenait pas tellement. Ou alors il ne les retenait pas, ce qui était tout aussi probable. Il soupira. Il avait déjà envie de baisser les bras. Vraiment. La défense contre les forces du mal, ce n'était vraiment pas son fort. Si tant est qu'il ait un fort quelque part.. Et cette saloperie de sortilèges informulés, ça lui passait vraiment au dessus. Et puis même Hyacinthe avait l'air de le prendre pour un con. Tout en le surestimant. C'était vraiment un curieux mélange.

"On devrait peut-être en rester à boire du chocolat chaud. C'est moins dangereux pour toi et... ça changera pas grand chose à mes progrès, je crois. C'est pas demain la veille que je me défendrai contre ces tarés.. "

Blasé contre lui-même et sa baguette au rabais, il s'assit en tailleur dans l'herbe. Il était un peu désolé de prendre du temps à Hyacinthe pour ça. Même si ça n'avait pas trop l'air de le déranger, vu tout ce qu'il subissait en plus..

"Ou juste bosser les sorts de base. Sur.. un gobelet vide, par exemple. A moins que tu sois vraiment maso."

Peut-être qu'il l'était un peu. Pour vouloir l'aider de la sorte. Il y avait sûrement vraiment mieux à faire. N'importe quoi. Même faire une sieste semblait plus productif. Il ferma les yeux un court instant avant de retrouver un semblant de motivation. Et lança un sort à son gobelet vide. Ce dernier se mit à léviter, non sans renverser les quelques gouttes restantes dans les brins d'herbe. Le sourire lui revint alors qu'il regardait ce bout de plastique flotter dans le vent.

"Hé... t'as vu... ça marche ! Et j'ai prononcé que la moitié du sort !"

Fier comme un première année qui réussit son premier enchantement, il regarda son gobelet flotter quelques secondes encore avant de retomber lourdement. Bon, d'accord. C'était vraiment les rudiments. Autant dire que ses ambitions étaient descendues de tous les crans possibles. Et que les sortilèges informulés, il en était à des années lumières. Il devait être le pire élève possible...

Peut-être qu’il l’avait su un jour, n’empêche, que ça aurait été mieux que le blondinet le sache maintenant. Mais passons. La prochaine fois, il sera plus prévoyant. Il avait sous-estimé les risques. Sans doute pour ce genre de détail qu’il ferait un très mauvais auror. Il ne pensait pas à mal, il ne pensait jamais à ce qui pouvait déraper. Il était peut-être un peu trop optimiste. Un peu trop naïf sans doute. Et pour le sortilège de lévitation, Hyacinthe ne put s’empêcher de lui jeter un regard un peu réprobateur. C’était un sortilège de première année. Et quand bien même s’il était toujours aussi négatif, pas étonnant qu’il lui soit si dur d’apprendre quoi que ce soit. Le savoir va à celui qui veut le connaître. Rufus semblait presque ne pas en vouloir par moment.

“Ru...Rufus… C’est pas… C’est pas le moment d’ironiser…” dit-il en réprimant son propre sourire.

Il lui était si dur de faire les gros yeux et avoir de l’autorité. Il était sans doute le pire professeur particulier. Parce qu’au fond, il lui était difficile de ne pas rire à sa blague. Il se devait d’être sérieux. Pour mieux lui apprendre les choses. Pour espérer lui apprendre un truc. Il se racla la gorge, une main devant sa bouche pour cacher qu’il riait à demi.

Il écarquilla les yeux aux questions de Rufus. Quoi ? Mais bien sûr que ce ne serait pas lui qu’on ferait voltigé. Il tenait à la vie. Quoique, il savait transplaner, il aurait pu s’éviter de s’écraser par terre. Quand bien même, il avait toujours eu peur des hauteurs alors, il n’allait pas tirer ses plus intimes peurs par la queue. Non, vraiment, sans façon. Il secoua la tête.

“Pas...Pas moi ! Un objet… Je suis pas… Pas fou…” bafouilla-t-il très vite en l’écoutant quand même continuer.

Il eut un sourire un peu rassurant ensuite. Rufus était gentil, et si perdu face à la magie. Il avait envie de le serrer fort dans ses bras en lui disant que c’était rien. Pas sûr que Rufus apprécie. De lui faire un tel effet.

“Je suis pas...Ma..Ma..so… Le gobelet… C’est bien, Rufus…”

Il l’encouragea d’un regard empli de bienveillance. Il ne savait pas bien comment il pouvait aider son ami. C’était plus compliqué que ce qu’il avait imaginé. Pas si simple de l’aider alors qu’il peinait à se faire confiance. Il avait besoin de s’aimer lui-même. Il s'émerveille comme un enfant en voyant le gobelet s’élever. C’était fou. Absolument fou. Alors qu’un sort de lévitation, ça n’avait rien de fou. C’était du basique, mais… Il s’enthousiasma comme Rufus.

“Bravo ! ça a marché !” lâcha-t-il avant de rattraper le gobelet, le plastique n’ayant pas complètement heurté le sol. “Recommence ! Encore… Sans le dire, cette fois !”

Il posa le gobelet bien devant Rufus. Et alla s’asseoir à côté de lui, histoire de ne pas prendre le sort en pleine poire par mégarde. Il se permit de poser une main sur son épaule. Qu’il retira vite, se demandant si ce n’était pas gênant comme contact… Il ne voulait pas que Rufus se fasse des idées. Ou quoi. Et rien que d’y penser il avait le rouge aux joues. Non. Non. Il ne voulait pas qu’il se fasse d’idées.

“Va….Vas-y… Je… Je crois en toi…” murmura-t-il d’une voix à peine audible.

Ses essais en magie parvenaient vraiment à faire des montagnes russes avec ses émotions. Un instant, il était fier comme un paon d'avoir réussi à faire décoller un gobelet vide de 3cm en prononçant la moitié d'un mot, l'instant d'après il haïssait Hyacinthe de l'encourager pour si peu. Ca lui donnait l'impression d'être un gamin de 12 ans qui réussissait son premier sort. C'était ridicule. Et entendre le plus jeune le féliciter ne faisait qu'exacerber ce sentiment. Lui-même s'était extasié quelques secondes plus tôt mais de l'entendre de la voix de quelqu'un d'autre lui faisait réaliser. C'était vraiment de la perte de temps. Qui trompait-il en pensant qu'il réussirait ces sorts-là ? Il n'avait clairement pas plus de talent que de motivation pour y arriver. Mais... avait-il un autre choix que de persévérer ? C'était pas comme s'il avait une autre vie qui l'attendait dans le monde des moldus. Ca, c'était révolu depuis longtemps.

A deux doigts de baisser définitivement les bras, il regarda Hyacinthe replacer le gobelet avec patience. Et s'asseoir à côté de lui. Même ce dernier ne lui faisait pas confiance. Et il ne pouvait que lui donner raison. Dans un soupir, il regarda le gobelet à nouveau. C'était stupide ce truc. Comment pouvait-il recommencer et lancer un sort qu'on executait par la parole... sans la parole ? Il essaya de prononcer le nom dans sa tête, fixant le gobelet avec tellement de concentration, sans cligner, qu'il en assécha ses yeux. Et ce fut à peu près la seule conséquence de cet essai foireux. Ça et un sursaut, lorsque la main de Hyacinthe se posa sur son épaule. Sans doute par compassion. Il détestait l'idée que même le brun ait pitié de lui. C'était... humiliant, putain.

Visiblement, le gobelet avait décidé que la gravité, c'était cool et qu'il n'avait pas envie de la défier. Et ce malgré ses efforts. Il en avait presque mal au crâne et avait l'impression de loucher. C'était ridicule. Mais il n'avait pas envie de perdre la face totalement. Pas face à un gobelet en plastique. Alors il finit par murmurer le sort, discrètement, pour ne pas que son professeur le remarque. Faisant enfin décoller cette saloperie au dessus du sol.

"Bon. Je crois que c'est pas la peine de faire plus, hein. Je maîtrise, t'as vu, c'était pas mal ..."

C'était pas la conviction qui l'étouffait. Mais là, il se sentait vraiment honteux de se ridiculiser de la sorte devant Hyacinthe. Il s'entraînerait le soir. Ça ne fonctionnerait sans doute pas mais... De toute façon, le plus jeune semblait un peu à court de propositions pour l'aider. Et savoir qu'il croyait en lui tout en l'encourageant pour des choses ridicules, ça ne l'aidait pas. Décidément, il détestait cette stupide idée de sortilèges informulés. C'était déjà assez chiant en les prononçant...

"Tu veux que je te paye un verre pour fêter ça ? Et te remercier ?"

Il se redressa, pour ne pas laisser vraiment le choix à Hyacinthe de protester et de lui dire de bosser d'avantage. Non, vraiment, il avait subi assez d'humiliation pour aujourd'hui. Ce n'était pas vraiment dans ses habitudes de baisser les bras mais la magie savait avoir rapidement raison de lui, en témoigne son mal de crâne et ses yeux desséchés. Ce qui ne l'empêcherait pas de s'entraîner dans son coin, par la suite. Il avait tout de même des exams à réussir.

"Je te dois bien ça... au moins !"

Même s'il n'avait pratiquement rien réussi. Ca, ça n'était pas de la faute de Hyacinthe, au contraire. Autant arrêter cette torture au plus vite !

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