Kendra Livingstone | Danielle Campbell

♫ Ta mère était une passionnée de photographie, passant plus de temps à immortaliser de courts instants plutôt que de les vivre pleinement, pour pouvoir ensuite afficher des cadres de votre parfaite petite famille partout dans la maison. Le paraître avait une si grande importance à ses yeux qu’elle était très stricte sur l’apprentissage des bonnes manières.  L’élégance et le raffinement  te contraignait à porter des robes quand des invités venaient dîner et tu étais trop petite pour oser contrarier les exigences de ta mère mais ta sœur, elle excellait dans l’art et la manière de s’attirer les foudres de vos parents. Tu entendais donc souvent ces deux là se crier l’une sur l’autre tandis que ton père décidait alors de t’extirper de la maison, direction le jardin et plus précisément la serre. Lui, son délire, c’était surtout les plantes qu’il bichonnait à outrance surtout quand il avait besoin de fuir la maison.  Souvent en vérité.

♫ Rosanna et toi n’aviez pas vraiment grandi ensemble mais tu cherchais constamment son attention, parce que tu l’obtenais moins aisément que celle des parents. Beaucoup de détails vous différenciaient et rares étaient ceux qui pensaient instinctivement que vous étiez sœurs. Premièrement, Rosa avait des cheveux d’un blond doré et sept années vous séparaient toutes deux mais pour ajouter à cela, vous n’aviez que rarement des goûts communs.  Quand tu préférais les histoires à l’eau de rose, elle préférait les récits d’enquêtes à résoudre.  Vous vous entendiez pourtant bien, même si ça amusait beaucoup ton aînée de te faire frissonner avec des récits sombres sur la cité médiévale de la ville où vous viviez. La ville de Carcassonne. Et tu la croyais, à chaque fois.  La maison était devenue presque trop solennelle quand ton aînée était entrée à Beauxbâtons. Plus elle passait de temps à l’école et plus tu devenais l’enfant modèle de ta mère et sa si grande fierté.

♫ T’avais eu du mal à encaisser le secret qu’elle t’avait glissé en revenant de sa dernière année d’études à Beauxbâtons. Sa majorité acquise, elle comptait s’en aller et changer de ville ou de pays. Elle rêvait de liberté et de se détacher de leurs parents. Elle ne serait pas présente pour ta rentrée en première année et cette pensée te resta légèrement en travers de la gorge.  Être abandonnée par ta propre sœur, tu ne t’y attendais pas et  l’information te semblait lourde à digérer au point d’avoir besoin de t’éloigner. C’était à cause de ça que tu t’étais vite rendue compte que tu ne connaissais pas si bien Carcassonne puisque tu t’y promenais rarement seule.  Aussi, tu assumais très peu t’être perdue, rebroussant un mauvais chemin en refusant de demander aux passants. La nuit tomba et les repères s’amoindrirent encore plus,  tout semblant gris sans Lumos pour pouvoir éclairer ta route. T’étais tombée sur ce que tu aurais cru ne jamais croiser dans ces rues sorcières mais aujourd’hui encore, tu te souvenais de ces yeux rougeâtres. Rosa était arrivée à temps mais tu ne te souvenais pas vraiment d’autre chose que de l’avoir vu lancer un sort. Elle ne savait pas encore transplaner à cette période. Maman lui reprocha absolument toute l’histoire et Rosa partit plus tôt que prévu.  Tu savais bien que ce n’était arrivé que par un malencontreux hasard, que toutes les créatures n’étaient pas ainsi mais ton épouvantard prouvait encore à ce jour que ça te marquait toujours.

♫  Ils avaient souhaité retarder ta rentrée, espérant que les choses reviendraient à la normale. Tu avais tapé du poing sur la table pour manifester ton mécontentement. Ce n’était pas parce que tu avais perdu ta voix que tu serais incapable d’apprendre la magie. Aucun sort médicomagique n’avait pu te rendre la parole, c’était sans doute psychologique alors, ça reviendrait à un moment.  Seulement, on ne savait pas quand et en attendant, tu commençais tes études avec un handicap assez dérangeant dans la pratique. Heureusement que tu te débrouillais correctement dans la théorie et que tu faisais constamment des efforts pendant les cours. Pendant les premières années, ça avait été un frein mais on pouvait dire que tu t’en sortais et que les profs t’encourageaient mais même si tu t’améliorais continuellement et que tu ne baissais pas les bras, les autres doutaient de plus en plus que tu puisses aller plus loin.  Quand tu rentrais chez toi, ta mère plaignait ce drame qui t’avait ravie tes espoirs d’avenirs et tu bouillonnais de pouvoir montrer que tu les surprendrais tous un jour.  C’était difficile de se faire des amis sans pouvoir t’exprimer comme avant et les autres avaient beau être patients et bien intentionnés, ils avaient tendance à te considérer automatiquement comme plus fragile qu’eux. Durant tes premières années, tu passas donc une grande partie de ton temps à lire et te surpasser, en esquivant adroitement tes points faibles. Tu te passionnais particulièrement pour le domaine des potions mais surtout pour les plantes. Et, toi qui aimait la douceur et la beauté des choses, étrangement, tu étais fascinée par les plantes les plus dangereuses. Ton père t’avait offert énormément de livres sur le sujet en s’en rendant compte.  

♫ En tout début de cinquième année, tu étais plus à l’aise dans tes bottes et l’absence de Rosa se faisait beaucoup moins présente depuis que tu avais une amie sur qui tu pouvais vraiment compter. L’année scolaire avait débuté comme les précédentes mais en étant plus à l’aise dans tes bottes. Ta voix revenait doucement, encore fragile, cherchant à se faire entendre. Ce n’était pas suffisant pour produire des sorts mais c’était un début. A Noël, tu murmurais doucement.  Cette même année, avec soulagement, tu avais soufflé un peu et avait démultiplié les bourdes.  Tu étais tombée dans les escaliers en reculant parce qu’un garçon avait voulu t’embrasser,  tu avais réveillée toutes tes camarades de dortoir en voulant te lever en pleine nuit et quand tu avais retrouvée une voix correcte vers la fin de l’année, tu avais balancé un  objet sur un camarade en t’entraînant avec un sortilège de projection et tu avais du l’emmener à l’infirmerie parce qu’il avait un bleu.  Malgré ça, c’était sans doute ta plus belle année parce que tu pourrais enfin t’entraîner intensivement désormais pendant les vacances.

♫ L’année suivante, tes parents étaient partis en voyage à l’étranger pendant ta scolarité et étaient revenus affaiblis. Tu les avais trouvé vieilli mais tu étais repartie à Beauxbâtons en te disant que le repos leur ferait du bien. Tu avais reçu un hibou te prévenant de leur hospitalisation quelques semaines plus tard. Autorisée à te rendre à leur chevet ce même week-end, tu les avais veillés et tu avais envoyé une lettre à Rosa. Cette fois, tu lui en avais voulu quand elle était arrivée trop tard, lui reprochant d’avoir été absente par facilité. Elle s’était occupée de tout, sans s’énerver, sans montrer sa douleur et sacrifiant ce qu’elle avait construit comme futur jusque là, pensant même à devenir ton tuteur. Avec le décès de vos parents si tôt et le retour de Rosa dans ta vie, la cohabitation avait été particulièrement rude.  Tu faisais absolument tout ce que tu pouvais pour lui prouver que tu n’avais pas besoin d’elle. Avec cet événement, tu avais refait une année scolaire et tu l’avais vécu comme un tel échec que ton année d’après montra des progrès impressionnants. Tu avais 18 ans quand tu avais fini ta scolarité avec des notes très correctes dans les matières qui t’étaient les plus dures au départ. Pas excellentes certes mais le fruit de tes efforts.

♫  Pardonnant progressivement à Rosanna qui avait quitté son travail ainsi que son compagnon quand elle avait appris que tu avais besoin d’elle, tu t’efforçais de lui parler un peu plus de tes projets. Elle restait réticente à l’idée que tu fasses le tour de la France pour remplir tes carnets botaniques , alors vous étiez parties à deux en espérant que ça vous aiderait à devenir un peu plus proches. Tu avais finalement pu visiter aussi l’Espagne, dont ta sœur parlait apparemment la langue. Tu avais encré tant de pages que tu aurais du tri à faire, pour pouvoir ensuite en expérimenter les vertus et possibilités que ces plantes offraient. Tu n’étais pas mécontente d’être partie avec ton aînée car ça vous avait rapprochée. Vous surveilliez les arrières l’une de l’autre. De sa part, ça ne te dérangeait pas trop. Puis un jour, Rosa t’avait parlé de la MUL et de ce que ça pourrait t’apporter. Maintenant que vous aviez renoué des liens… elle avait l’intention de repartir en Angleterre où elle vivait avant. Elle voyait bien que tu n’avais plus tant besoin d’elle, enfin quand tu ne faisais pas confiance au premier venu et elle espérait secrètement que tu repartirais avec elle pour approfondir tes études. Tu y avais longuement réfléchi : il te restait tant de pays à voir mais aussi tant de connaissances à engranger. Les bancs des études n’étaient pas si mal et tu aurais le temps de mener des voyages par la suite, ça ne changeait pas tes projets, simplement ça les renforcerait sans doute d’ailleurs alors t’avais suivi ta sœur.  

♫  Reprendre les études te fait du bien mais depuis les rumeurs à propos des Deathwings, tu ne cesses de te faire du souci pour ta sœur qui travaille comme tireuse d’élite de baguette magique au Ministère de la Magie. Tu sais combien elle est têtue, bien plus courageuse et imprudente que tu ne l’es. Pas par naïveté dans son cas, mais par impulsivité et parce qu’elle est très casse-cou.  Mine de rien, tu sais qu’elle est forte ta sœur. Elle excelle en sortilèges alors tu affiches un sourire et tu fais ce qu’elle ferait : tu prends soin des autres et tu te surpasses.