I will always be with you

Benjamin pouvait sentir la douleur, signe qu’il se réveillait. Il avait dû perdre connaissance pendant que ses frères et sœurs s’occupaient de lui. Il en avait presque honte mais c’était peut-être mieux ainsi : soit son évanouissement leur avait fait cesser la torture jusqu’à son réveil, soit ils avaient continué mais Benjamin n’avait pas eu à ressentir le tout sur le moment. Maintenant qu’il commençait à reprendre ses esprits, par contre, il souffrait. Il avait l’horrible impression que tout son corps le brûlait, sûrement à cause des coupures et lacérations. Il avait mal à des endroits où il n’avait jamais eu mal avant et il sut que ses côtes étaient soit cassées soit fêlées. Il doutait entre les deux mais n’avait pas vraiment le temps d’y penser.

Son poignet était dans une position étrange, il le savait, il le sentait. Pour le moment, c’était plutôt externe qu’interne et il en était bien content. Il espérait ne pas avoir de saignement qui mettrait du temps à être détecté et puis soigné. Enfin, s’ils le soignaient… C’était quelque chose qu’ils faisaient s’ils souhaitaient faire durer la torture et Benjamin ne savait pas du tout si leur Père leur avait donné comme ordre d’être rapide ou au contraire, de prendre tout leur temps pour lui faire payer sa trahison…

Quand ses yeux papillonnèrent, il paniqua. Il ne reconnaissait pas l’endroit sur le moment et avec le douleur, c’était compliqué d’être cohérent. En voyant Taryn, il paniqua encore plus. Que faisait-elle ici ? S’ils la voyaient avec lui, à l’aider, à le soutenir, elle allait aussi subir et il ne voulait pas. Pas après Alcyone. « Pas… au manoir ? » souffla-t-il difficilement quand il comprit qu’ils n’étaient plus chez les Adaar. Taryn était venue le sauver ? Comme avait-elle su ? Cela importait peu sur le moment mais Benjamin n’avait pas pu s’empêcher de se poser la question.

« Tu n’as rien ? » Il avait un peu de mal à parler ; ses cris avaient rendu sa voix rauque et ses côtés lui faisaient mal dès qu’il ouvrait la bouche ou bougeait un peu trop. Taryn ne semblait pas être blessée mais il préférait demander. En hochant la tête, il remarqua alors le mari de sa sœur adoptive ainsi que ses enfants. Elle était en fuite, elle aussi… Et pourquoi ? Parce qu’elle avait aidé Benjamin. Encore une fois, quelqu’un qu’il aimait souffrait par sa faute et à cause de ses décisions. « Les enfants. Rem. Ça va ? » réussit-il à articuler, essayant d’économiser son souffle en ne faisant pas des phrases de quinze kilomètres. Benjamin appréciait la famille de sa sœur, bien entendu, et il refusait qu’ils soient aussi blessés par sa faute. Jamais il ne se le pardonnerait.

« Alcy. Où est Alcy ? » demanda-t-il ensuite. Sa sœur avait été forcée de briser sa baguette et leur Père n’avait pas été tendre avec elle. Pourquoi n’était-elle pas ici, avec eux ? Avait-elle, encore une fois, choisi le camp des Adaar, celui de son Père ? Il comprenait. C’était difficile de se détacher de tout ça après avoir été blessée mais… Il avait besoin d’elle. Il avait besoin de sa sœur et sans elle, il ne pourrait pas continuer.

Taryn le réconfortait et cela fonctionnait à moitié. Il était rassuré d’être vivant et surtout de ne plus être au manoir mais… Comment s’étaient-ils échappés ? Où était Alcy ? La douceur réconfortante de Taryn l’aidait à se calmer mais il avait comme un mauvais pressentiment, comme s’il savait que quelque chose n’allait pas. Sa sœur était-elle resté aux côtés de leur famille, même après tout ça ? Benjamin avait encore du mal à se remettre de tout ce qu’il s’était passé ; le piège, le trahison d’Alcy, la mascarade avec Drew, sa baguette et puis, la torture… Quand elle lui indiqua qu’elle allait bien, un énorme poids quitta ses épaules mais aussi son cœur. Taryn n’était pas blessé, c’était déjà beaucoup. Et apparemment, les enfants et Rem allaient bien aussi. Il lâcha un petit rire difficilement quand sa sœur lui quémanda d’arrêter de s’inquiéter pour les autres et de se reposer. « Désolé, désolé. » souffla-t-il dans la douleur alors qu’il souffla un coup.

Et puis, il demanda où Alcy était. Si Taryn et sa famille étaient là… Pourquoi pas elle ? Il ne serait pas si surpris si elle avait décidé de rester au manoir mais… Quand même. Il pouvait voir Taryn hésiter. Elle se mit à trembler et sa tête tomba contre son torse alors qu’elle se mettait à pleurer à chaudes larmes, ayant même du mal à respirer. Benjamin tenta de ne pas paniquer tout de suite. Peut-être qu’Alcy avait participé à la torture et que Taryn était sous le choc ? Peut-être qu’Alcy avait dit des choses blessantes ? Il se refusait de penser à d’autres possibilités. « Taryn... » souffla-t-il en passant sa main dans ses doux cheveux, geste qu’il avait pris l’habitude de faire quand celle-ci avait des cauchemars quand ils étaient plus jeunes. Ils restèrent quelques secondes dans cette position alors que d’innombrables scénarios se créaient dans la tête de Benjamin.

Il baissa le regard quand il sentit quelque chose lui toucher la main et les larmes lui montèrent naturellement aux yeux en voyant le bracelet de sa sœur. Jamais elle ne s’en serait séparée comme ça… A moins que… Non. Taryn avait du mal à parler, à terminer ses phrases mais Benjamin savait déjà. Il avait comprit. Mais Rem vint mettre des mots sur ses doutes, confirmant que sa petite sœur, sa petite Alcy, était bel et bien morte. Les larmes continuèrent de couler de plus belle alors qu’il se relevait difficilement dans une position plus ou moins assise. Il attrapa la main de Taryn, regardant Rem aussi. « Je… Comment ? Pourquoi ? » C’est à cause de moi, pensait-il intérieurement. S’il n’avait pas trahi sa famille, jamais Alcyone n’aurait eu à briser sa baguette et à participer à cette nuit de terreur. Si seulement il avait réussi à la convaincre de venir avec lui, de vivre une vie normale et non remplie de sang… Il n’avait pas réussi à sauver sa propre famille. Il tira Taryn jusqu’à lui, la serrant aussi fortement qu’il pouvait dans son état. « Je suis désolé, Taryn. Tellement désolé. » Ils étaient seuls, désormais.