We're friends, right? | ft. Hyacinthe

Ecrire à Drew lui avait demandé beaucoup d’énergie. Il n’avait pas mis le nez hors de sa chambre depuis plusieurs jours. Il n’osait pas. Il se savait trop fragile. Il ne voulait pas s’effondrer à l’extérieur. Il avait demandé à Ceri la permission de séparer réellement leur colocation d’un mur. Pour pouvoir pleurer sans croiser son regard. Elle ne devait pas être dupe. Il faisait pâle figure dès qu’il sortait de sa partie de chambre pour aller aux sanitaires. Il n’arrivait juste pas à oublier la douleur quand il fermait les yeux. Et… C’était compliqué de vivre comme ça. Il n’était pas de taille pour affronter l’extérieur encore. Il avait besoin de temps. D’un peu plus de temps. Juste un peu plus de temps. Pour apprendre aussi à apprivoiser cette baguette qui était visiblement la sienne. Elle l’avait choisi mais lui… Lui il n’avait pas choisi. Ce n’était pas la baguette que son frère lui avait offert à ses onze ans. Ce n’était pas sa baguette. Il n’y arrivait pas. Il restait là, à la fixer dans sa boîte. Il ne pouvait pas.

Il s’allongea, se recroquevillant sur son lit. Les larmes coulaient. Dès qu’il arrêtait de se forcer pour garder le contrôle. Il ne pouvait pas s’en empêcher, c’était, comme automatique. Comme s’il fallait pleurer encore et encore pour purger sa détresse. Nate ne devait jamais le voir comme ça. Il devait se reprendre mais… Mais c’était si dur. Il sursauta en entendant qu’on frappait à la porte.

Drew ? Drew. Il était tétanisé. Drew ne devait pas le voir comme ça. Mais en entendant la voix de son ami, il ne pouvait pas le laisser à la porte. Il devait ouvrir. Et aussi être présentable. Et… Il essuya précipitamment son visage. Enfila une veste dans l’espoir de cacher qu’il était encore en pyjama à cette heure de la journée. Pour cacher qu’il ne s’était pas douché non plus. Il devait être dans un état lamentable. Il réfléchit mais il ne voyait pas de solution. Il coiffa ses cheveux à la hâte. Il boita jusqu’à la porte. Sa jambe lui faisait mal à nouveau, elle lui brûlait comme pendant l’accident. Comme s’il était redevenu cet enfant perdu. Il déverrouilla la porte de sa chambre.

“D...D...Drew ? M...Mais… Je.. Je...je vais bien…”

Il aurait fallu être aveugle et sourd pour croire ça, mais… Hyacinthe ne pouvait pas lui expliquer. Les mots resteraient coincés dans sa gorge. Il le savait. Est-ce qu’il devait le laisser rentrer pour le rassurer ? Pas sûr que sa chambre dans le noir avec un cimetière de mouchoirs en papier soit une image très rassurante…

“J’ai...ju...juste eu… des… des… des… Oreillongoules…”

Il n’avait pas beaucoup réfléchi en parlant des Oreillongoules… Il savait pourtant qu’on place à l’isolement les patients atteints de ça. ça ne faisait aucun sens. Drew n’était pas idiot. Il baissa la tête coupable. Mais en même temps, il ne pouvait pas lui dire : “mais non, j’rigole, j’me suis juste fait tabassé parce que moi aussi je suis né-moldu”. Non. Il ne veut pas faire naître de nouvelles peurs chez son ami. Il ne veut pas qu’il vive dans la crainte comme lui. Et en même temps, son mensonge fait de la peine à Drew. Il s’en veut de le blesser comme ça. Il relève un regard perdu vers le petit brun.

“D...Drew…” murmura-t-il désolé.

Il n’a pas mal fait en venant. Non. Hyacinthe est touché par son geste. ça veut dire qu’il compte un peu pour Drew. Que le chanteur tient un peu à lui, mais… Parler, c’est trop dur. ça ne lui fait pas du bien. Déjà que tout tourne en boucle dans sa tête. Il a juste envie qu’on le serre dans ses bras. Il veut entendre que tout va bien se passer maintenant.

“Je...Je…”

Sa main attrapa le bras de Drew. Il ne voulait pas qu’il reparte. Il voulait juste… Qu’on ne lui pose pas de questions. Il voulait juste… Avoir quelqu’un avec lui. Juste… Quelques heures.

“Re...reste… s’il… s’il te plaît…”

C’était un bazar immonde dans sa chambre, mais… Il ne voulait pas que Drew s’en aille. Pas maintenant qu’il était là. ça faisait trop mal de le repousser. Il se poussa de l’ouverture de la porte, l’invitant à entrer. Il avança vers sa partie de la colocation, et ramassa un peu à la va vite les mouchoirs qui traînaient. Son lit n’était pas fait… Pour qui allait-il passer… Cette simple contrariété suffit à faire revenir les larmes, et les sanglots. Il se sentait si nul. Tout ça, c’était sa faute. Tout était toujours sa faute. Il n’était bon à rien. Dans sa précipitation, il fit tomber la boîte contenant sa nouvelle baguette. Elle roula jusqu’aux pieds de Drew. Hyacinthe ne s’en aperçut même pas. Il était trop énervé contre lui-même. Trop honteux de se montrer si faible. Il voyait flou au travers de ses larmes. Il tournait le dos à Drew, s’appuyant contre son bureau. Essayant d’étouffer les sanglots.

“Dé...Dé...Dé...dé...so...lé…”

Craquer comme ça devant Drew. C’était douloureux. Il ne voulait pas qu’on le voie comme ça. Il était dans un état pitoyable. Il ne voulait pas infliger ça. Il avait honte. On aurait beau lui dire ce qu’on voulait, il culpabilisait. De ne pas réussir à se relever. De ne pas réussir à se battre contre la peur d’une meilleure façon. Il n’arrivait pas à penser à autre chose qu’à ses erreurs. La haine de ses agresseurs avait glissé petit à petit, insidieusement à la haine de soi. Un retour aux sources. Se détester, il faisait ça si bien depuis de si longues années.

Il sentit le corps de Drew se coller à son dos. Ce contact d’abord surprenant s’avéra extrêmement apaisant. Ses sanglots s’espacèrent lentement. Ils restèrent de longues minutes. Juste immobiles. Mais Hyacinthe sentait qu’il n’était pas seul. Même s’il s’en voulait d’être dans cet état, il ne pouvait chasser Drew. Il avait trop besoin de quelqu’un près de lui. Pour l’empêcher de faire quoi que ce soit de stupide. Pour l’aider à retrouver un semblant de vie en lui. Un semblant de joie. Il finit par bouger doucement, se détachant lentement de son ami. Il se tourna pour lui faire face. Il était désolé, mais il ne le dit pas.

Il alla tirer ses draps sur son lit, le faisant grossièrement pour qu’ils puissent s’asseoir dessus. Il fit signe à Drew de venir s’asseoir, et il en fit de même, se recroquevillant un peu contre le mur qui jouxtait au lit. Il remarqua la guitare de Drew.

“T….T….T...Tu...tu… veux...veux… bi...bien en jouer ?”

Au moins, s’il jouait quelque chose, l’ambiance serait moins triste, non ? Hyacinthe l’espérait. Là, il avait juste l’impression de tirer son ami dans sa tourmente. Il ne voulait pas le contaminer de sa tristesse. Il sentait bien sa peine pourtant. Exactement ce pourquoi il avait préféré rester seul et ne rien dire. Il ne voulait pas les inquiéter. Les rendre triste. Ni lui. Ni Nate. Ni Jesus. Ni qui que ce soit. Ni Finn. Pour ça, il avait déjà raté.

Il attendit que Drew s’installe, et après une longue hésitation, il s’approcha un peu de lui, posant sa tête sur son épaule. Juste… Pour ressentir sa chaleur, sa présence, pour sentir un contact entre eux. Pour ne pas se noyer. Pour se repérer dans le noir. Il ferma un peu les yeux dès qu’il commença à chanter. C’était beau. Il avait tellement besoin de dormir. Mais il avait tellement peur de dormir aussi. Peur de ces cauchemars. Il rouvrit les yeux, se sentant sombrer vers le sommeil. Il oscillait entre l’éveil et l’endormissement sur l’épaule de son ami. Il était si fatigué de tout. Il s’endormit sans doute un peu. Mais il se réveilla en sursaut en sentant Drew bouger légèrement. Il le dévisagea quelques secondes, perdu. Avant de réaliser que tout allait bien. Mais… Il était anxieux. Il se blottit à nouveau contre Drew. Ce qui aurait pu avoir quelque chose de comique en d’autres circonstances vu leurs gabarits respectifs. Tout dans le comportement du blond le suppliait de rester avec lui. De rester avec lui aussi longtemps qu’il pourrait.

“Me laisse pas…” avait-il chuchoté d’une faible voix. “J’ai si peur…”

Blotti contre Drew, il se sentait un peu protégé. La musique chassait les mauvaises pensées. Du moins, c’était ce que le blond espérait. Que les notes aient un pouvoir mystique, qu’elles chassent les images si présentes. Si violentes encore. A chaque fois, il revoyait la baguette pointé vers lui. Le choc du sort. La douleur. Il s'agrippa un peu à son ami. Faites que la musique fasse partir ces pensées. Faites la musique lui fasse oublier. Faites que ça s’arrête, juste un peu. Il se concentra sur les mélodies. Il fallut un moment avant qu’il retrouve son calme. Que sa respiration s’apaise à nouveau alors que Drew lui promettais de rester. Il ne méritait pas ça. Ce dévouement inconditionnel de Drew. Il n’avait rien fait pour ça. Il se sentait si ingrat. Le petit brun avait sûrement mieux à faire que de le bercer. Il s’en voulait et en même temps il était si reconnaissant que son ami soit là.

“M...M...merci d’être là…”

Même s’il n’avait pas voulu appeler à l’aide, c’était comme si Drew avait réussi à le comprendre. Entre les lignes de sa lettre. C’était étrange. Hyacinthe se demandait comment il avait fait pour sentir qu’il en avait besoin. Peut-être que Drew avait une sorte de super-pouvoir. Il eut l’ombre d’un sourire sur ses lèvres à cette pensée. Il écouta encore les notes. Il ne savait pas combien de temps ils étaient restés comme ça. Parce qu’il s’était probablement plusieurs fois assoupi. C’était flou ce qui se passait autour d’eux.

“Drew… Moi aussi…” souffla-t-il d’une voix faible à demi conscient.

Il se laissa bercer par Drew. Et il finit par se lever, juste le temps de relever les draps et leur permettre de se mettre dedans tous les deux. Ils seraient mieux installé. Puis, Drew aussi avait l’air fatigué alors… Il s’allongea et entoura Drew de ses bras, se serrant contre lui, ou le serrant contre lui, difficile de vraiment savoir. Mais, il était accroché à son ami. Il remua un peu dans la nuit, son sommeil était agité, mais il ne se réveilla pas en hurlant. Sans doute que la présence de Drew l’avait suffisamment rassuré pour qu’il ne hurle pas. Il fit une nuit complète ne se réveillant que lorsque la lumière avait envahi la pièce. Il émergea difficilement. Il avait un peu trop chaud. Et… Il comprit pourquoi en redécouvrant Drew sous ses draps. Il se sentait un peu moins épuisé grâce à son ami. A sa veille. Il se leva doucement pour ne pas le réveiller, et se dirigea vers la salle de bain pour se doucher. Un grand pas. Lui qui n’avait pas pris de douche depuis plusieurs jours… La présence de Drew l’aidait à faire des efforts. Et puis, ça lui fit du bien de se laver. Son corps n’avait plus que quelques bleus comme traces des préjudices.

Il sortit habillé de la salle d’eau, et se rassit sur le lit. Drew s’était réveillé. Hyacinthe lui sourit un peu. Timidement.

“Me...merci d’être venu…” souffla-t-il doucement. “J’ai… J’ai pas… pas eu de soucis d’oreillongoules…”

Il avouait déjà son mensonge. Le reste… C’était bien plus difficile.

“J’ai… j’ai eu… des...des soucis… a..a...avec d’autres… étudiants…”

Il ne pouvait pas dire mieux. Donner les détails c’était revivre ça encore. Il l’avait déjà tellement répété quand il était au ministère pour l’enquête. Il eut un regard pour la boîte posée sur son meuble. La baguette neuve. Celle qui l’avait choisi après tout ça.

“Nor… normalement… un… un sorcier a… a pas… deux ba...baguettes dans… dans sa vie… Je… J’arrive pas… à… m’y… m’y faire…”

Drew avait l’air vraiment fatigué. Et… Hyacinthe aurait voulu lui dire qu’il pouvait le laisser et aller dormir. Mais il ne pouvait pas. Il ne voulait pas. Il préférait de loin que Drew reste encore. Au moins un peu. Quand il était là, c’était un peu moins dur de porter le poids du réel. Est-ce que l’effet restera ? Quand Drew sera parti ? Ou le poids reviendra et bouger de son lit sera à nouveau une épreuve ? Il n’en savait rien. Il n’avait pas envie de savoir. Il eut un petit soupir, et hocha la tête à sa question. Il n’hésitera plus. Il a confiance en Drew.

“Toi… Toi aussi ?” murmura-t-il doucement.

Il n’était pas sûr d’être d’un très grand secours en ce moment. Mais… Il ne voulait pas abandonner son ami. Il ne voulait pas profiter de Drew d’une quelconque façon. L’amitié, ça marche toujours à double sens, sinon, c’est pas vraiment de l’amitié non ? Il s’approcha un peu de Drew quand il passa son bras autour de lui. Il a envie d’être tout petit et pouvoir se blottir contre lui. Il aurait aimé de changer en souris, ou en lapin. Un petit animal que Drew aurait pu garder dans sa poche. Au moins, il n’aurait pas fait de bruit, il se serait fait discret, mais il aurait pu toujours bénéficier de sa protection. Il se sentait si nul à ne pas réussir à reprendre le contrôle. A ne pas réussir à se relever. C’était comme s’ils avaient gagné. Ils allaient peut-être être jugé mais lui, il était anéanti.

Bien sûr que rien ne remplacera jamais sa première baguette. Parce que… C’était Nathanaël qui la lui avait offert. Il se revoyait chez Ollivander. Il s’était senti si fier avec elle dans sa petite main. Il se souvenait du regard de son frère. De l’étreinte qu’il lui avait donné à la sortie du magasin. Il avait serré si fort son frère dans les bras. Cette baguette, c’était la preuve qu’ils étaient tous les deux sorciers. Et maintenant… Nathanaël ne pouvait plus utiliser de magie. Et lui… Il n’arrivait pas à évaluer la chance qu’il avait de pouvoir encore en faire usage.

Un élève brillant. Un ami. Il n’avait pas l’impression d’être tout ça. Il avait l’impression d’avoir tout gâché. Avec des espoirs vains. Il inspira un grand coup, et se leva pour attraper la boîte, puis revint à côté de Drew. Il l’ouvrit, dévoilant le bois caramel de la baguette. A peine plus foncée que la première. Il tremblait un peu, mais il prit l’objet entre ses mains.

“J’ai… J’ai pas réussi à… à jeter de sort encore.. En...En fait… J’ai… J’ai même pas réussi à… à la tenir avant… alors…”

Sa main gauche alla chercher celle de Drew pour la serrer entre ses doigts. Il avait besoin de quelqu’un pour lui tenir la main. Il avait juste besoin d’un peu d’aide pour arriver, non ? Ses doigts se serraient sur l’aubépine. Il tremblait un peu. Il n’était pas sûr du premier sort à jeter mais…

“Lumos.” murmura-t-il en bougeant de façon un peu saccadée sa baguette.

La lumière fut faible mais s’intensifia. Hyacinthe eut un sourire pour son ami. Ils avaient réussi ! Il se jeta dans les bras de Drew, le serrant fort dans ses bras. C’était grâce à lui qu’il y arrivait.

Hyacinthe sourit doucement à Drew. Il sait que ce n’est pas simple de faire confiance, de parler. Il comprend les réticences de Drew. Et pourtant, le petit brun lui a un peu parlé ? Enfin, écrit ? Alors, ça veut dire qu’ils peuvent y arriver tous les deux. De toutes façons, Hyacinthe ne laissera pas Drew isolé avec ses soucis, ça c’était certain. Il serait là. Même en sale état, il sera là. Parce que lui ne l’avait pas laissé.

Les encouragements de son ami sont une aide. Il ne peut pas le nier. Il se sentait un peu plus fort avec Drew à côté de lui. Comme s’il lui transmettait un peu de son énergie, de sa force. Il a besoin de ça pour avoir du courage. Il n’est pas quelqu’un de courageux. Il ne l’a jamais été. Il n’est pas un bagarreur capable de se battre envers et contre tous. Il n’est pas comme ça. Il a du mal à se relever quand il tombe. Mais là, il essayait. Il essayait vraiment de ratraper le fil de sa vie. Il voulait l’attraper et ne plus le lâcher. Ce sort, c’était un premier pas. Une première lueur. Ce n’était pas pour rien que Lumos s’était imposé à lui comme premier sort. Il avait besoin de cette lumière là. Tout comme il a besoin des bras de Drew autour de lui. Son soutien est comme une bouffée d’oxygène. Oh tout n’était pas rose, et il savait que ce n’était que le début d’une longue route, mais, il avait trouvé un début de sentier dans ses bras. Dans ses encouragements.

Le bisou par contre, il ne s’y attendait pas. Est-ce que cela le fit un peu rougir ? Oui. Il n’y avait que son frère qui faisait ça. La gêne ne resta pas bien longtemps, il n’y avait pas d’ambiguïté entre eux. Ils étaient amis. Même si Drew était très beau, il ne songeait pas à lui comme ça. Il resta un peu dans ses bras, souriant à ses mots. Ils lui faisaient du bien. C’était un peu comme des pansements sur ses blessures. Peut-être des pansements un peu petits, mais c’était un départ. Il finit par se détacher un peu de Drew.

“Moi… Je suis fier de t’avoir pour ami, je… Je n’aurai jamais pensé avoir cette chance-là..” murmura-t-il doucement, timidement.

Il le pensait. Il estimait vraiment Drew. Sa gentillesse, son talent, mais aussi sa sensibilité, ses fragilités. Il n’attendait pas de lui qu’il soit autre chose que lui-même. Il espérait vraiment que Drew le savait. Hyacinthe fit s’éteindre sa baguette d’un Finite silencieux. C’était… étrange. La baguette réagissait peut-être plus vite que celle qu’il avait avant ? C’était une drôle de sensation.

“Ma première baguette… Je l’avais acheté avec mon frère… Et… C’est un de mes plus beaux souvenirs mais… Celle-ci… Je t’avais toi à mes côtés alors… Ce sera forcément un beau souvenir aussi… Il effacera le reste…”

Murmurer effaçait son bégaiement. C’était une des étrangetés de ce défaut de langage. Peut-être parce que là, il n’avait pas peur que Drew l’entende. Il eut un petit sourire. Il se recula un peu, pas qu’il veuille forcément s’éloigner de Drew; mais il ne voulait pas être embarrassant. Il n’avait pas l’habitude de la proximité. Ni même des conventions sociales s’appliquant avec les amis.

“Tu… tu dois peut-être y aller ? Tu dois avoir des cours… Je… Je devrai aussi y aller… Mais… C’est… C’est compliqué… Mais… On a un cours ensemble, non, aujourd’hui ? Tu… Tu crois que ce cours-là on peut y aller ensemble ? Je… Je pourrai rester à côté de toi ?”

Pour se sentir protégé.

C’était difficile de croire qu’ils ne se connaissaient que depuis quelques mois à les voir dans les bras l’un de l’autre. Hyacinthe avait l’impression de le connaître depuis plus longtemps. Qu’ils étaient proches comme après des années à s’être soutenus. C’était un peu étrange. Ou alors c’était juste qu’ils se comprenaient ? Peut-être. Ou alors c’était les malheurs de ces derniers temps qui les rapprochaient ? Hyacinthe ne savait pas bien. Il n’avait peut-être pas besoin d’une explication rationnelle. Il était juste heureux d’avoir enfin trouvé quelqu’un qui le comprenne. Il espérait juste que Drew ressentait sa gratitude, et son amitié en retour.

Hyacinthe avait un léger pincement au coeur en voyant Drew récupérer ses affaires. C’était égoïste, mais il aurait aimé qu’ils restent là, tous les deux, coupés du monde pendant encore quelques jours. Juste le temps de reprendre un peu confiance. Juste le temps de se retrouver un peu. Et en même temps, se serait-il senti prêt un jour ? Il regarda Drew un peu hésitant. Son premier cours… C’était celui de Mme Slaviskova. Peut-être qu’il arriverait à le suivre. C’était un de ses cours préférés alors… Il pouvait peut-être essayer si Drew l’accompagnait ? Il n’avait aucun risque de se faire attaquer si Drew était avec lui… Il était en pleine hésitation. Mais il devait essayer. Si ce n’était pas pour lui, il devait essayer pour Drew. Pour son frère. Pour Mme Slavikova qui avait veillé sur lui. Il hocha la tête. Il devait le faire.

“Je… Je prends juste quelques affaires…”

Il prépara à la va-vite son sac, mettant quelques parchemins dedans, enfila une veste et mit ses chaussures. Et prit sa baguette, la glissant après avoir eu un temps d’arrêt dans sa poche. Il ne se sentait pas très à l’aise à l’idée de sortir mais… Avec Drew, tout allait bien se passer.

“On… On peut transplaner directement chez toi ?”

Il avait envie d’éviter de se promener sur le campus. Le fait de savoir que ses agresseurs soient des élèves d’ici, ça le rendait un peu paranoïaque. Qu’est-ce qui lui disait qu’il n’y en avait pas d’autres qui lui voulait du mal ici ? Il n’avait aucun moyen de le savoir vraiment. Il y avait ce garçon bizarre notamment, qui lui avait parlé une fois à la bibliothèque et sur qui on disait tellement d’horreurs… Vraiment, il n’était plus aussi rassuré dans l’enceinte de la MUL. Il tendit sa main vers Drew. Il espérait vraiment qu’il veuille bien transplaner au moins sur une partie du chemin… Il était facile de lire la peur dans son regard. De comprendre qu’il avait une terrible frousse à l’idée de sortir de son cocon rassurant, et étouffant à la fois.