It's not like I'm here for you or anything [ Noah & Connor ]

Le corps humain était une chose merveilleuse. Rien que le fait de pouvoir marcher, parler, respirer, mettait en mouvement tellement de choses complexes à l'intérieur de vous, et quand le moindre petit cailloux foutait en l'air l'engrenage... Le coeur ne battait plus comme il faut. Respirer devenait quelque chose de plus compliqué, et avoir un minimum de cohésion dans ses mouvements... C'était devenu difficile, tout ça, dans l'environnement proche de Noah Inuksuk. Une fois qu'il les avait fait redescendre sur terre (et pas seulement littéralement) Connor ne savait plus trop quoi faire de lui même. Fuir semblait une bonne solution, honnêtement.

« Coffee please ! »

Il avait répondu, près de l'arbre où les choses s'étaient emballées quelques peu. Le rouquin se rhabilla un peu, ses pieds nus dans l'herbe étaient la sensation la plus agréable qui le traversait en ce moment. Il n'avait pas vraiment envie d'avoir cette conversation. Est-ce qu'il pouvait juste rester perché ici, peut être ? La vue de jour était belle aussi. Mais il avait toujours eu une préférence pour la nuit...

Une fois en bas des escaliers, il entra dans la "cuisine" avec autant de curiosité que pour le reste des autres pièces. Ce lieu de vie était tellement chaleureux, et différent de ce qu'il avait connu chez lui aussi. Et en plus il préparait le petit déjeuner ? Le jeune homme ne s'assoit pas tout de suite, et préfère aller observer le jardin de plantes aromatiques, qui sent terriblement bon, et les plantes tombantes, pour faire quelque chose et ne pas rester juste planté là. Surtout que les premières notes que Noah lui jouait ne sonnaient pas extrèmement bien à son oreille. Il ne savait pas quoi dire à la première. Non, il n'avait pas envie d'en parler. Mais il n'avait pas le choix, pas vrai ?

« I know you were... And I told you there's nothing you need to apologize for. »

Il dit, le ton plus maussade, mais pas moins sûr de ce qu'il avançait. Il était sérieux. Même si c'était "irresponsable" ou quelqu'autre mot qu'il puisse trouver, de l'avoir embrassé alors qu'il ignorait ses sentiments... Noah avait envie de le faire, lui aussi, il n'y avait rien de plus à dire. Par contre, la suite n'allait pas lui plaire. Il voit Noah s'installer, et va lui même récupérer sa tasse de café mais il est bien incapable de poser ses fesses où que ce soit après ça.

« Pardon me, Noah, but you really don't know that. »

Un regain de ce qui fait le rouquin un renardeau sauvage se devinait dans son regard. Oui, il sait qu'il n'est pas le premier des idiots, et il sait qu'il est jeune, aussi, sans doute trop aux yeux de l'autre homme. Mais le reste n'était qu'un tissu de bullshit selon lui. Une excuse pour le faire se sentir mieux, pour avaler la pillule. Si Noah pensait que ça allait lui suffir, il se fourrait la mandragore dans l'oeil jusqu'au coude.

« You've given me more than anyone ever has. And I'm not just talking about last night. I mean since I've known you. »

Même si, soyons honnête, la gentillesse et la tendresse dont il avait fait preuve la veille tout particulièrement, Connor n'y avait jamais vraiment été abonné. Voire pas du tout. Et le rouquin n'aurait pas dit non à plus de ça, dans sa vie, aussi. Sa franchise sortait plus facilement qu'il ne l'aurait cru. Elle faisait chauffer ses oreilles, aussi, mais c'était un détail.

« And you don't know what people will or will not bring into my life, nor is it a good excuse. I'm sorry Noah but... I get it if you don't like me the way I do. Really, I do, just don't... Don't say things like that, ok ? »

C'était la pire excuse du siècle, Noah. Bien sûr, le botaniste ne pouvait pas deviner le chemin que l'autre garçon, qui buvait maintenant sa tasse de café noir pour essayer de garder un peu de dignité, avait traversé. Il ne pouvait pas imaginer ce que sa famille avait fait de sa jeunesse, ou de ce que son caractère méfiant qui en avait résulté avait donné à Poudlard, à l'Université... Il était bien sûr en partie responsable de la façon dont les gens le percevaient, s'il avait fait plus d'effort pour s'ouvrir... Il n'aurait pas eu ce manque aussi profond chez lui. Et encore, il vivait avec. Il avait une vie qui lui allait très bien. Il était passionné, il avait un métier qui lui apportait au quotidien. Mais il savait aussi parfaitement ce que Noah faisait de lui.

« You... make me a better person. Just by being here and being with you. You make me want to... show you how good of a human being you are. Cause you are. »

***
Je savais que tu l'étais ... Et je t'ai dit que tu n'avais pas besoin de t'excuser.
Pardon, Noah, mais tu ne sais vraiment pas.
Tu m'as donné plus que n'importe qui. Et je ne parle pas seulement de la nuit dernière. Je veux dire depuis que je te connais.
Et tu ne sais pas ce que les gens vont ou ne vont pas apporter dans ma vie, ce n'est pas une bonne excuse. Je suis désolé Noah mais ... Je comprends si tu ne mressens pas la même chose. Vraiment, hein, mais ... Ne dis pas des choses comme ça, ok?
Tu... fais de moi une meilleure personne. Juste en étant ici et en étant avec toi. Tu me donnes envie de... te montrer à quel point tu es quelqu'un de bien. Parce que c'est ce que tu es.

L'environnement n'était peut être pas ce qu'on pouvait appeler familier, pour le renardeau sauvage qu'il était, mais contrairement à d'habitude, il ne se sentait pas aux abois non plus. Il y avait quelque chose d'apaisant, dans toutes ces plantes. Là ou d'autres pourraient trouver ça claustrophobant. Et pourtant la conversation pouvait donner envie de fuir. Rien que la première réponse, Connor sentait venir la condescendance de la personne qui a plus vécu, et qui pense tout savoir. Mais il ne dit rien. Gardant son sérieux, le peu de dignité qui lui restait et son café, il se força à aller poser ses miches sur le banc en face de Noah, non sans un air renfrogné. Il n'avait pas vraiment faim, il fallait dire. Mais il fit un effort, pour les oeufs que lui avait préparé Noah, et en prit une bouchée. Merlin's beard, il devait être bon cuisinier, en plus ?

« Thank you. »

Il marmonna doucement. Et le reste à venir n'était pas plus plaisant. Au départ, Connor regardait son assiette, entendant bien chaque parole et comprenant que ce n'était pas de simples excuses bidons, que Noah lui servait en plus du petit déjeuner. Certaines choses avaient même du sens.

« Thing is... you don't really know me all that well. »

Il dit, pour plaider sa cause. Il entama d'avantage ses oeufs, ses toasts, la marmelade par dessus parce qu'ils étaient vraiment bons, et qu'il avait faim. Il avait plus ou moins toujours faim, en vérité, et pas grand chose dans son frigo.

« You don't know my views of society, you don't know what I'm looking for in life or in... in any... kind of... relationship. Hell if I ever wanted a relationship to begin with ! »

Il se défendit, rougissant un peu. C'était la pure vérité, d'ailleurs.

« All I can hear is you say you're afraid of being bad for me, but the one afraid is you. »

Même lui, qui était terrifié par ses propres sentiments, se trouvait moins d'excuse que le botaniste en ce moment. Il but du café pour se redonner du courage, et défendre ses opinions. C'était quelque chose qu'il savait faire, ça. Quelque chose qu'il travaillait jour et nuit, même s'il n'avait jamais été aussi impliqué dans ce qu'il défendait. C'était un peu terrifiant ? Mais c'était sa seule chance, aussi. Il se devait d'essayer, au moins. Il était prêt à ne pas essayer, à laisser tomber dès le début, mais de voir Noah lui dire ce qu'il avait le droit ou ne pas le droit de vouloir ? C'était ce qui lui donnait le feu. Qui pouvait prédire l'avenir ici ?

« I don't know what my life will be, but can you ? In our world, I can travel the world if I want, and be here for diner. I... I don't know anything about raising children, but you are their dad, not me, and I'd be good. I need to be their dad or mom or... And I don't... I'm not even asking you to marry me or whatever, I just told you I liked you. A lot. That I think you're a wonderful man and I feel so happy when I'm with you, how is this not worth it ? »

Il finit, en haussant le ton, pas de colère mais d'emportement.

« You're not ruining anything ! If anyone did this, it was me, writing this paper about someone I admire and no one else. »


***
Merci
Le fait est ... que tu ne me connais pas vraiment.
Tu ne connais pas ma vision de la société, ce que je recherche dans la vie ou dans ... dans n'importe quel ... type de relation. Comme si j'avais toujours voulu une relation pour commencer!
Tout ce que j'entends, c'est que tu dis avoir peur d'être mauvais pour moi, mais celui qui a peur, c'est toi.
Je ne sais pas ce que ma vie sera, mais tu peux toi ? Dans notre monde, je peux parcourir le monde si je veux et être ici pour le dîner. Je ... je ne sais rien sur l'éducation des enfants, mais tu es leur père, pas moi, et je serais bien. Je n'ai pas à être leur père ou leur mère ou ... Et je ne ... Je ne parle meme pas de mariage ou je sais pas, peu importe, je t'ai juste dit que je t'aimais bien. Beaucoup. Que je pense que tu es un homme merveilleux et que je me sens si heureux quand je suis avec toi, en quoi ça ne vaut pas la peine?
Tu ne ruines rien! Si quelqu'un a fait ça, c'est moi en écrivant ce papier au sujet de quelqu'un que j'admire, c'est la faute de personne d'autre.

Connor lui même, une fois son assiette presque terminée, se rendit compte qu'il avait tout goinfré, et n'en revenait pas. C'était qu'il en fallait, de l'énergie, pour un plaidoyer. Et son habituelle verve n'en était pas en reste, grâce à ça. Il gagnait du terrain. Ou du moins c'était l'impression qu'il avait. Il était heureux, si ce n'était soulagé, de voir que Noah ne balayait pas ses paroles d'un geste simple. Il aurait pu. Connor était habitué. Que ce soit de la parte d'adultes, comme ces derniers disent si bien, ou de pairs, il était habitué à ce qu'on ne l'entende que d'une oreille, ou qu'on n'aime pas ce qui se dit et qu'on ferme le dialogue. Comme il avait pu le dire à Noah plus tôt, il voulait juste qu'on le voit. Tel qu'il était. Et c'était d'autant plus important de la part de la personne qu'il admirait.

« Well, that's not something so final is it. »

Il conclut, en posant ses couverts dans son assiette.

« And I do know a thing or two about you. I know I sound like a pervert when I say this but I do look at you. When... you don't. »

Look at me. C'était ça, le noeud du problème. Et c'était bien là la seule chose qui aurait raison de la détermination de Connie. S'il était certain que les petits problèmes évoqués par Noah n'en étaient pas, du moins rien de définitif, il savait qu'il ne pouvait pas forcer le reste. Merlin seul savait si qui que ce soit pouvait être intéressé un jour par lui. Ce qu'il demandait, là, à Noah, c'était de ne pas cracher sur le reste. Sur ce qu'il ressentait. Gosh, que ça sonnait cucul, dit comme ça. Et est-ce que l'autre homme n'avait pas prouvé qu'il avait, si ce n'était de l'intérêt, au moins pas du dégout à se trouver avec lui ? A l'embrasser... à moins que ça ne soit que ça ? C'était ce que le rouquin s'était demandé. Avec l'alcool, tout était possible, avec les gens. Lui ne fonctionnait pas du tout comme ça mais...

Il buvait sa tasse de café en observant d'un oeil curieux et attentif les réflexions internes de Noah. Est-ce qu'il pouvait vraiment se permettre un espoir, quelle que soit la signification de celui ci ? Il s'attendait à tout. A un non, désolé, mais ça n'est pas ce que j'attends. A un tu n'es pas mon genre, même déguisé, d'ailleurs. Même à ce que Noah ramène ses filles sur le tapis, seul sujet où Connor ne se sentait pas vraiment à l'aise. Mais pas à ça. Il haussa les sourcils presque blonds à travers ses mèches décoiffées du matin. Puis il posa sa tasse, regardant ses mains qui tournaient celle ci par la hanse. Ce qu'il attendrait ? C'était bien la première fois qu'on lui demandait quelque chose comme ça.

« Nothing... really. »

Il dit, moins assuré, comme s'il n'osait plus vraiment avoir ce ton assuré, qu'il n'osait pas demander.

« Maybe just... Time. With you. To talk and... »

Il releva ses prunelles qui avaient un reflet de ce qui s'était passé sous un arbre sous les étoiles, un peu plus tôt dans la nuit. Son ventre et les pipaillons qui s'y trouvaient un peu plus tôt lui rappelèrent qu'il n'était pas très au fait du reste, et que ça risquait probablement de poser problème, ça aussi. Il se mordit encore une fois la lèvre, passant ses mèches derrière son oreille gauche, qui chauffait déjà à l'idée.

« Just this. And a chance to prove you I'm not wrong about this. You can learn to know me and... see if that's good enough for you. »

Il redressa le menton, osant un peu plus le regarder. Il estimait beaucoup de choses, chez l'autre homme, mais même chez lui. Son intelligence, sa débrouillardise, la façon qu'il avait eu de s'en sortir malgré les épreuves qu'il avait traversées. Il portait souvent tout ça comme un étendard. Mais juste "lui"... Il n'était pas encore sûr que ça vaille la peine d'être aimé. Surtout de quelqu'un comme Noah, quoi que ce dernier en dise.

Connor s'accrochait à sa tasse comme jamais. Il n'aimait pas ce silence. Son café était presque finit, et le regarder ne le finirait pas plus vite mais c'était ça ou regarder Noah manger une nectarine. Et question indécence, ça se posait là. Mais c'est pourtant ce qu'il fit quand ce dernier lui dit qu'il pouvait lui accorder ça. Du temps. Avec lui. C'était vraiment tout ce que Connor lui demandait. Et d'avoir l'esprit un peu ouvert, le concernant. Est-ce que c'était à nouveau une couleur rose-orangée qui grimpait dans les racines du rouquin ? Et un joli sourire s'était dessiné, avant qu'il ne le cache dans sa tasse de café. Voilà que la tasse était terminée.

Connor finit par se lever de table, pour aider à débarrasser, quand on lui fait la proposition de la salle de bain. Sa curiosité, ainsi que son envie de rester, le tend vers le oui. Mais sa raison et aussi le fait qu'il n'a pas envie de saouler Noah si vite lui soufflent d'être raisonnable. Il observe l'homme, au milieu de sa cuisine, de ses plantes, et voit bien qu'il n'a pas tout à fait le coeur à grand chose. Connor, depuis quand deviens-tu un expert en Noah ? Ou tout simplement empathique ? Lui même se surprenait à voir tout ça chez l'autre.

« I think I'll pass... I have work to do too, after yesterday. I'll shower at home. »

Une fois de plus, il pinça ses lèvres entre ses dents, un geste nerveux et en même temps tellement charmant. Il hésita, alors que l'homme avait l'air affairé à ses tâches quotidiennes. Il s'approcha, appelant son prénom pour qu'il se retourne et posant une main sur son bras, il pencha son visage pour l'embrasser. Oh, on était loin de la fougue d'un baiser enivré sous un arbre. Mais ça n'en était pas moins doux. Il n'insista pas longtemps, et se recula, rougissant un peu de son audace.

« I'll keep you to your words, then. Good luck for today... »

Tout ira bien, il avait envie de lui dire. Mais ça sonnait déplacé. Alors il espéra simplement qu'il comprendrait. Prenant le chemin qui menait à l'entrée, le rouquin attacha ses cheveux en un chignon rapide, enfila ses chaussures et jetant un dernier coup d'oeil en arrière, sourit et referma la porte derrière lui.

Ce soir non plus, le félin insupportable et squatteur ne vint pas l'embêter et c'était tant mieux. De cette façon, il pouvait se repasser le film de la soirée dernière, et de cette matinée. Bien sûr, rien n'était certain, à part cette promesse. Mais il ne pouvait s'empêcher d'espérer. Il écrasa son visage rouge comme une tomate dans son coussin usé, insultant ces sentiments de midinettes qui le prenaient comme ça, se traitant d'idiot. Mais quelque part, au fond, il aimait ce sentiment qu'avait fait éclore Noah.


To be continued