No more little crying boy (Electra & Hyacinthe)

Hyacinthe rangea ses parchemins dans son sac. Il avait posé quelques questions supplémentaires au professeur de sortilège et enchantement pour aller un peu plus loin dans son travail personnel. Il était vraiment passionné par ce qu’il apprenait dans ce cours. Il voulait toujours aller plus loin, dépasser ce qu’on lui apprenait. Pour aider mieux, pour être plus efficace ensuite. Pour soigner mieux à l’avenir. Ses parents auraient été fier de lui sans doute. Nate le serait. Et peut-être que son frère arriverait enfin à le laisser voler de ses propres ailes, peut-être que Nathanaël vivrait enfin pour lui. Au lieu de vivre pour eux. Mais il avait encore un long chemin à faire. Il devait avancer pour atteindre la liberté. Continuer de travailler dur. Il avait des objectifs clairs. Il savait comment avancer. Et personne ne l'arrêtera plus. Personne.

Et… Non.

Il se retourna, faisant demi-tour dans le couloir. Il ne voulait pas la croiser elle. Electra Jones. Depuis sa première année à Poudlard elle n’avait eu de cesse de le brimer. Sur ses origines. Sur son bégaiement. Sur n’importe quoi en fait. Tout ce qui pouvait le blesser elle l’avait exploité. Visiblement en y prenant un malin plaisir. Et Hyacinthe n’avait jamais réussi à faire autre chose que la fuir. Ou serrer les dents. Ou pleurer. Il n’était pas de taille à lutter face à ce genre de personne. Il n’en avait jamais été capable. Il n’en serait sans doute jamais capable. Et pourtant, aujourd’hui, il n’avait pas envie de se mettre à courir dans le couloir pour l’éviter. Alors… Il repensa à Finn. Finn aurait eu le courage de se battre. Jacob aussi. Rufus… Rufus sans doute aussi. Même si Rufus ne serait sûrement pas battu de front, il aurait trouvé quelque chose pour se venger. Mais personne ne serait parti en courant à l’opposé d’Electra Jones. Comme un lâche. Il ne voulait plus être ce lâche. Il ne voulait pas être cette personne lâche. Il était son propre propriétaire et son propre elfe de maison, c’en était fini de la servitude, il venait de s’offrir un vieux tissu, une vieille chaussette, il était libre d’affronter ses peurs maintenant ! Electra Jones ne sera plus le squelette du placard des traumatismes. C’était fini. Premier jour du reste de sa vie.

Volte face. Electra est face à lui. Mais il va avancer. Il va continuer tout droit. Et tout va bien se passer. Il pressa le pas, déterminé, la tête haute. Alors quand Electra se tourna vers lui et lui attrapa le bras, il était prêt.

“La...La...La...La…”

Ah non. Pas maintenant. Il se libéra le bras, tant bien que mal, se tordant à moitié le poignet.

“Fou...Fous-moi la paix !” réussit-il à cracher d’une voix un peu trop forte.

Il fut lui même surpris de réussir à parler si fort. A lui tenir tête à elle. A Electra Jones. Son pire cauchemar. Il resta figé face à elle. Pour la première fois de sa vie, il laissait parler sa colère. Cette sourde colère. L’injustice qu’il avait vécu si longtemps sortait comme un torrent de lave. Son regard bleu foudroyait la serpentarde.

Le sourire de cette fille l’avait toujours apeuré. Parce qu’il avait été complètement démuni en première année. Parce qu’il n’avait jamais tenté d’inverser la tendance. Alors qu’il était maintenant plus grand qu’elle physiquement, et qu’il connaissait moult sorts pour se défendre. Pourquoi avait-il souffert en silence si longtemps ? Il n’en savait rien. Mais les mots de Finn, ceux de Jacob l’emplissaient d’un courage nouveau. Des années de silence qui se fissurent. L’orage approche. C’était fini de souffrir en silence. Elle pouvait bien rire de lui. Elle n’était pas meilleure que lui. Elle ne valait mieux que personne. Il fit discrètement glisser sa baguette de sa manche alors qu’elle le menaçait. Elle l’avait toujours traité comme un loser. Un Sang-de-bourbe pas capable de se défendre. Une victime facile. Le petit bègue facile à martyrisé.

Seulement, il n’était pas fragile. Il était fort. Fort de tout ce qu’il avait encaissé. Fort de ses différences. Fort de ses faiblesses. Fort de ce bégaiement qu’il avait réussi à contourner pour la magie. Il la fixa de son regard clair, pas apeuré. Un regard dans lequel naissait une pointe fierté. De combativité. Quelque chose de nouveau qu’elle n’avait jamais pu admirer avant.

Il ne fit que pointer sa baguette vers la jeune femme. Sans un mot. Pourtant, elle ne tarderait pas à avoir une haut le coeur répugnant qui la pousserait à cracher des limaces. Un sort assez peu puissant mais particulièrement humiliant pour celui qui se retrouvait à vomir d’énormes limaces. Une sensation désagréable. Et il l’avait subi déjà de sa main. Alors il savait très bien ce que ça faisait.

“Les…” Il prit une grande inspiration. “Les véracrasses n’ont pas de dents. Révise tes cours.” lâcha-t-il sans hésiter.

Il garda sa baguette à la main, et visa la sienne. La faisant voler vers lui. Le silence avait toujours été son plus grand atout. Il la regarda. Désolé. Parce qu’il ne voulait pas en venir à ces gestes là. Mais elle ne lui avait pas laissé le choix avec son comportement.

“Tu… Tu mériterais que je la casse… Pourquoi ? Pourquoi tu m’as fait ça ? Toutes ces années… J’avais… J’avais peur de marcher dans les couloirs… Sans avoir jamais rien fait… Pour mériter ça… Pourquoi ? Tu avais besoin de te sentir… Plus forte ? Alors… ça a marché ? Tu...tu te sens plus heureuse ?”

Sa main tremblait, serrée autour de la baguette de cette détestable fille. La tentation de la briser était grande. De bafouer sa soit-disant supériorité de Sang-Pur.

Voir les limaces sortir de sa bouche… Cela ne lui procurait même pas de plaisir. Il n’était pas fier de la faire ainsi régurgiter des gastéropodes. En quoi cela pouvait donner du plaisir de voir quelqu’un souffrir comme ça ? Il n’arrivait pas à comprendre. Une part raisonnable de lui-même lui disait qu’elle l’avait bien cherché. Mais sa sensibilité lui rappelait que ce n’était pas lui. Faire du mal comme ça, c’était idiot. Il s'abaissait à son niveau. Il ne pouvait pas se résoudre à être aussi idiot qu’elle. Il voulait comprendre pourquoi. Pourquoi lui, pourquoi si longtemps, pour quelles raisons. Cela n’avait pas de sens. Il n’était pas le seul né-moldu de cette université. Et quand bien même, à quoi bon ? Le statut de sang n’avait aucun sens. Il n’avait pas demandé à être sorcier. Ni même posséder le troisième oeil. Il ne voulait pas de tout ça, et pourtant, la magie l’avait choisi. Si d’eux deux il y avait un élu, c’était plus certainement lui.

“Non.” répondit-il à son injonction.

Non. Il ne la briserait pas. Il n’était pas ce genre de personne. Il ne voulait pas faire de mal aux autres. Même à elle. Il n’était personne pour lui faire subir ça. Il n’était pas comme elle. Il ne serait pas son propre justicier. Il se fit bousculer, reculant de quelques pas. Mais il savait qu’il avait la supériorité dans ce combat. Pour la première fois en huit ans. C’est long huit ans. Huit ans de soumission. Huit ans à croire qu’elle avait peut-être un peu raison. Mais c’était faux. Il valait quelque chose. Il n’était pas un raté. Et il commençait enfin à le croire. A prendre confiance, en lui-même.

“Je fe… Je fe...fe...ferai plus rien de ce que tu me diras !” répondit-il avec une assurance nouvelle.

Elle paraissait si faible là. Alors qu’elle lui avait tant d’années fait peur. C’était incroyable. Un changement de paradigme si violent qu’il peinait à le réaliser. Il recula encore. Il ne voulait pas la repousser. Il ne voulait pas se mettre à son niveau.

“C’est...C’est faux ! Je… Je suis légitime… La magie m’a choisi… Autant que toi. Peut-être plus que toi !”

Il fronça les sourcils. Elle voulait le provoquer. Mais elle ne l’aurait pas à ce jeu. Non. Il valait mieux que ça. Son frère l’avait élevé dans le respect. Ses parents lui avait toujours appris à parler plutôt que taper ses camarades de classe, aussi mesquins soient-ils. Il ne voulait pas faire honte à son éducation.

“Je peux faire mieux. Je fais mieux. Mais je le ferai pas pour toi, Electra.”

Aucune hésitation. Sa voix avait été nette. Elle lui avait demandé de ne pas bégayer. Il avait réussi. Sans même le vouloir, sans s’en apercevoir. Il avait cessé de penser trop vite. Mais il n’allait quand même pas en rester là. Il s’approcha de la fenêtre la plus proche, et l’ouvrit à la volée, lançant la baguette par la fenêtre. Elle ne se briserait probablement pas. Mais elle allait galérer à la retrouver. Même en étant la plus pure des Sang-Purs.