Never gonna let you down (Finn & Hyacinthe)

Les évènements récents n’avaient d’abord pas touché Hyacinthe personnellement. Il s’était bien sûr félicité de n’avoir pas mis les pieds à la vente organisée. Comme quoi, sa timidité, et sa peur des rassemblements lui avaient cette fois épargné une bien triste épreuve. Fort heureusement, il n’y avait pas eu trop de dégâts. Mais tout était vraiment étrange. Hyacinthe avait de plus en plus de mal à croire qui que ce soit sur la culpabilité d’un autre. Tout semblait si compliqué, on pouvait douter de tout le monde. Cela n’aidait pas vraiment le né-moldu à se sentir serein en réalité. Il avait de plus en plus de difficulté à se fier aux gens. Une méfiance s’était instauré comme un rempart de sécurité.

Et puis, les événements étaient entrés dans sa vie d’une façon plus personnelle. Quand il avait croisé Finn à Ste Mangouste. Il n’avait pas fait le lien avec le nom de son oncle. Et, il avait eu beaucoup de peine pour Finn. Il avait bien sûr prêté son épaule au Gryffondor pour épancher un peu sa peine, mais il était sur son lieu de travail, il ne pouvait pas lui consacrer plus que quelques minutes. Alors, il avait convenu avec Finn d’un rendez-vous le samedi suivant. En espérant pouvoir lui changer un peu les idées, le rassurer. Comme on le fait pour un ami. C’était ce qu’ils étaient non ? Même si il restait peut-être quelques braises de l’embrasement que Finn avait provoqué en lui pendant de longues années. De si petites braises, à peine des étincelles. Le temps faisait son effet, non ?

Ils avaient rendez-vous dans un café pas très loin du Scamander Park. Hyacinthe se souvenait que Finn avait failli se diriger vers l’études des animaux, cela lui ferait peut-être du bien d’en voir après leur discussion ? Et puis, ce café était sympathique, petit, assez chaleureux, et en même temps des petites alcôves rendaient l’endroit assez intimiste pour pouvoir parler au calme sans avoir la sensation d’être écoutés. Il eut le temps de commander une boisson chaude et quelques pâtisseries avant que Finn n’arrive. Il se leva pour lui faire signe, et l’accueillir. Il hésita une seconde, mais, il prit Finn dans ses bras en lui disant bonjour. Parce qu’il se doutait qu’il en avait besoin. Finn avait toujours eu l’air très tactile alors… Il pouvait bien faire un effort pour le réconforter, même si lui n’était pas très à l’aise avec ça ?

“Je… Je voulais m’excuser… La dernière fois… J’ai dû te laisser à… à cause du travail… Au moins… Aujourd’hui, je peux passer tout le temps dont tu as besoin avec toi…” lui dit-il avec un petit sourire. “Je… J’imagine que… que c’est idiot de te demander comment tu vas ?”

Il marqua une pause.

“Je… Il y a eu des améliorations… Pour ton oncle ? Il… Il est pas sur mon secteur alors… J’ai pas pu avoir d’informations… Je… Je crois pas qu’on me laisserait aller le voir… Mais… Il… Il est entre de bonnes mains, tu sais… Je… Je connais bien son médicomage… Et c’est vraiment un homme bien et compétent… Ils… Ils vont trouver comment l’aider… Et… On peut aussi chercher ensemble… à notre… notre niveau…”

Le cauchemard est constant, de nos jours. Il en a la nuit, où son oncle n'est pas venu le chercher à l'orphelinat où on l'avait mis à la mort de sa mère. Il en a où il meurt, il y en a où il ne se souvient plus de lui. Oh wait. Ca, c'est la réalité. Les yeux grands ouverts dans son lit alors qu'il fait encore nuit dehors, Finn tente de reprendre ses esprits et déméler le vrai du faux en fixant les posters de Quidditchs animés qui vont jusqu'à son plafond. Non, son oncle n'était pas mort. Sa mère l'était, par contre. Mais il n'avait plus aucun souvenir de lui de ces seize dernières années. Et il tournait en rond, dans la maison, à chercher ses souvenirs. Finn avait essayé de les lui rappeler, par des photos, des preuves tangibles, mais il semblait que malgré son enthousiasme et ses idées rien n'atteignait Dorian qui semblait toujours... méfiant. Perdu. Est-ce qu'il pensait que ces preuves avaient pu être trafiquées ? Mais en tout cas, ce qu'il ressentait, lui, ne l'était pas, alors... pourquoi il ne le croyait pas ?

Il traîna son pyjama jusqu'à la salle de bain après avoir promené longuement et nourri les trois colosses dix bonnes minutes autour du pâté de maison. Il se levait plus tôt, pour ne plus croiser le regard méfiant de celui qu'il admirait tellement. Assigné à la maison, l'oncle Kane allait devenir fou... Et en même temps vu son métier il risquait gros s'il sortait. Et puis, sous la douche, il se rappela qu'aujourd'hui il n'allait pas pouvoir se planquer au Ministère, à remplir des papiers ou à s'entraîner en salle. C'était samedi. Et sa cousine n'était même pas là pour le distraire ou être l'étrange troisième roue du carrosse, elle avait filé chez une amie. Sa copine ? Qui savait, avec elle. Il avait bien rendez vous avec Hyacinthe en fin de matinée, qu'est-ce qu'il allait pouvoir faire en attendant ?

Une fois son propre petit dej pris, il entendit les pas de son oncle et marmonna qu'il avait rendez vous, et qu'il allait aller à la bibliothèque en attendant. Vu comment la légilimentie de son oncle était intempestive, il devait savoir que Finn essayait de l'éviter. Mais le jeune homme espérait que ça ne le rendait pas triste, et qu'il voyait aussi qu'il faisait ça pour lui épargner ses pensées.

La bibliothèque n'ouvrait pas avant plusieurs heures, aussi Finn alla jouer avec les canidés un bon moment avant de les ramener à la maison et apparaître non loin du lieu où il avait rendez vous. Il avait failli refuser, quand Hyacinthe lui avait proposé. Parce que ce garçon était trop gentil avec lui, et qu'il ne faisait que le voir pleurer à chaque fois qu'ils se croisaient. Depuis sa rupture avec Ariel, jusqu'à l'autre jour, c'était... pas une position que le jeune Gryffondor avait l'habitude d'avoir. Il entra dans la maison de thé, un peu cosy à son gout de non habitué, et salua le jeune homme sans voir le câlin venir. Bizarrement, quand il était triste comme ça, il est était moins tactile. Mais il appréciait l'attention. Il commanda un grand chocolat chaud et un paquet de vienoiseries qu'il engouffrerait alors même qu'il n'avait pas faim, et s'installa en face de lui.

« T'excuse pas... t'y est pour rien, et puis y'a rien que tu pouvais faire. »

Il répondit simplement. Il accueilli avec hâte la grande tasse de chocolat chaud dont les premières grosses gorgées lui firent un bien fou.

« Y'a rien... Les sortilèges comme ça tu sais, c'est irréversible. Enfin sauf avec un sorcier très expérimenté et encore, les dommages pourraient être pires... »

Son regard était plus sombre que d'habitude. Pour qui connaissait le rayon de soleil qu'était Finn Parker, c'était flagrant et assez terrifiant en comparaison.

« J'étais à la bibliothèque pour... Enfin, j'essaie de pas trop le coller, ça lui fait trop bizarre quand je suis là. Moi, à la bibliothèque, volontairement en plus... t'imagines ? Bref, tous les bouquins sont assez clairs là dessus. »

Il rit un peu.

« Je préférerais qu'on arrête de chercher, tu sais. Ca sert à rien et ça donne de l'espoir là où y'en a pas. Mieux vaut l'aider à se réadapter et apprendre à vivre comme ça que... souhaiter des trucs qui arriveront jamais, tu vois ? Ca fait plus de mal que de bien. »

Il conclut. C'était rare de le voir aussi définitif, mais il avait fait le tour de la question et clairement, même s'il était entre les meilleures mains du monde... Un sortilège aussi dévastateur, fait par des gens qui n'en avaient rien à faire tant qu'ils couvraient leurs arrières... Ce que Finn voulait faire là, surtout ? Trouver ces enflures et les mettre derrière les barreaux d'Azkaban. Mais ça, il éviterait d'en parler à Hyacinthe. Parce que c'était un garçon trop gentil et il ne voulait pas le choquer.

Hyacinthe observa Finn manger, enfin, plutôt engouffrer les viennoiseries. C’était assez significatif comme comportement. C’était comme ça que Finn remplissait le vide du chagrin ? En s’empiffrant ? C’était une interprétation qui ne semblait pas si loin de la réalité. Le regard du blond était soucieux. Il s’en faisait pour Finn.

“Je… J’aurai juste pu être à son chevet… Je… Je sais que je suis pas médecin mais… Enfin… J’aurai juste aimé pouvoir veiller sur lui… Quand t’étais pas là…” expliqua-t-il doucement.

Peut-être que Hyacinthe était trop émotif parfois. Dès que les patients le touchaient d’un peu trop près, il avait du mal à garder des distances émotionnelles. On lui avait fait le repproche. Un des rares reproches figurant dans ses notes de stage. Il devait “apprendre à prendre plus de distance et se protéger émotionnellement”. Ces mots sonnaient d’une façon si absurde dans la tête de Hyacinthe. Il regarda sa tasse quand Finn le ramena à la réalité. Rien à faire. Hyacinthe ne pouvait pas s’y résoudre. Qu’il n’y ait rien à faire pour quelqu’un. Pour son oncle. Pour… Pour son frère.

“C’est… C’est sûr que toi à la bibliothèque, c’est rare ! C’est… C’est comme moi sur un balai…” essaya de plaisanter le blond, avant de perdre son sourire éphémère.

Il avait peine. Cette résignation, ça ne ressemblait pas à Finn. Pas au Finn qu’il avait connu du moins. Les Gryffondors ne sont pas sensé se battre ? Ceci dit, là, il n’y avait pas de vrai adversaire. Juste une chimère. Les paroles de Finn résonnairent en lui. Avec violence. Cette course à l’espoir, au remède miracle, c’était ce qu’il poursuivait depuis des mois. Il n’avait pas cessé de chercher. Même s’il n’en parlait pas, il lisait, sur les potions, sur les cracmols. Alors, ces mots, ils étaient d’une violence sans nom pour le blond. Il savait bien que Finn ne l’attaquait pas. Mais… Quelque part, c’était piétiner ce qui l’aidait lui à ne pas culpabiliser, cet espoir. Il fixa Finn, interdit. Il sentait les larmes monter à ses yeux. Ce n’était pas le moment. Bon sang. Son frère allait bien, alors que son oncle était au bord de la folie. Ce n’était pas à lui de pleurer là.

“Pa… Pardon… Je…”

Il essuya ses joues. Mince. Il était là pour le réconforter, et c’était lui qui tombait maintenant ? Alors qu’il croyait tenir le coup. C’était improbable. Cela faisait des semaines qu’il allait mieux. Qu’il ne pleurait plus. Et là, il avait suffit de quelques mots même pas intentionnel pour qu’il tombe. Lui qui croyait avait bâti une forteresse réalisait qu’il était juste entouré d’un château de cartes.

“C’est… Juste… Ce que tu dis… Je… Enfin… Moi… J’arrive pas à… à arrêter de chercher… Pour mon frère… Et… Si j’arrêtais… Je… je crois que… Je voudrai…”

Il marqua un arrêt. Il n’avait jamais mis des mots sur ces sentiments qui le rongeaient. Qui le hantaient et qui lui faisaient peur.

“Je… Je voudrai juste… Tuer tous ceux… tous ceux qui ont fait ça…” avoua-t-il en baissant la tête. “C’est… C’est les même personnes… Et… Per...Personne ne fait rien alors… Si… Si on a plus l’espoir de soigner… Il… Il reste quoi ?... Je… Je veux pas sombrer, Finn…”

Espérer, au moins, ça empêchait la noirceur de prendre possession de lui. Son frère n’aurait pas voulu entendre ça. Pourtant, la haine était là. Tapie dans l’ombre, grossie par la tristesse, par l’impuissance, par la peur. Il ne pouvait pas se résigner. Il ne voulait pas. Il ne voulait pas devenir comme eux.

Et bah bravo, à peine arrivé, que déjà il voyait que Hyacinthe était triste. Finn avait tout juste ouvert la bouche... C'était lui où le garçon pleurait souvent à cause de lui ? Et encore, il pleurait plus parce que Finn était triste. S'il avait bien tout compris. Ce qui n'était pas certain. Il était fatigué, en ce moment... Par contre, voir le visage triste de Hyacinthe, c'était culpabilisant et pas très joyeux, mais le voir pleurer c'était tout autre chose encore. Qu'est-ce qu'il devait faire, le consoler ? Mais il ne savait pas comment faire ! Finn se leva de sa place pour aller prendre place sur la banquette ou l'autre garçon était assis. Il était grand, et plus épais qu'on pouvait penser au premier abord, parce qu'il ne se tenait pas vraiment avec toute sa prestance mais... C'était un peu compliqué de passer un bras autour de lui pour le consoler, là.

« Hey... Tu m'as pas demandé de venir pour te rendre malheureux, si ? »

Il essaya, dans un sourire un peu aproximatif mais un ton gentil. Il frotta un peu le dos du garçon qui reniflait. Décidément, il n'était pas habitué à consoler des garçons. Mais ça n'était pas si différent, si ? Finnou, tu en as du chemin à parcourir encore mon petit... Le reste des paroles du blond ne lui plaisent pas.

« Tu peux pas penser comme ça, he. Il dirait quoi ton frère ? Tu penses qu'il dirait quoi mon oncle ? C'est plus facile à dire qu'à faire mais... Faut pas. »

Il savait ce que ça voulait dire. Parce que cette haine, peut être bien plus forte que celle que Hyacinthe ressentait -même s'il le sous estimait très certainement- il l'avait ressentie, lors de l'attaque de Poudlard l'été dernier. Il avait voulu faire du mal, beaucoup de mal à Keyser Wilkes et ses alliés. Sans être capable de réfléchir, sans même faire attention à sa propre vie, il aurait pu la tuer. Un frisson terrible le parcouru en se souvenant de cette nuit là. Il lâcha Hyacinthe pour lui laisser un peu d'espace pour respirer et se moucher. Il avait les yeux tout rouge déjà... Rha, Finn Parker, comment on fait maintenant hein ?

« Je suis pas doué pour consoler les gens... tu sais. Mais le toi de d'habitude me dirait qu'on peut toujours faire quelque chose pour aider les gens qui sont là et que la violence ça sert à rien. Non ? Enfin un truc du genre... Ton frère il a besoin de toi. Les gens à Ste mangouste ont besoin de toi. Y' a plein de gens qui tiennent à toi non ? Alors vas pas foutre ta vie en l'air pour rien. »

Il dit, se frottant la crinière face à l'impuissance qu'il ressentait malgré tout. Il serait extrêmement déçu, bizarrement. Alors qu'au final, ils n'étaient toujours pas si proches que ça. Mais Hyacinthe était un genre de... constante ? Comme lui devait l'être pour d'autres gens sans doute.

« Moi... Je sais pas trop. Bien sûr que je suis en colère, mais... c'est surtout, je sais pas comment je peux être utile tu vois ? Au bureau, c'est devenu... »

Il ne savait même pas comment décrire ce que c'était devenu. Il ne pouvait plus faire confiance à personne, ils étaient tous partis sans lui. Il voyait des choses pas claires se passer sans être totalement capable de les identifier. Il avait eu le choix, mais quelque part, il se disait qu'il était toujours possible d'arranger les choses, naïvement. Alors il était resté.

« ... C'est un peu la cata. Mais c'est pas parce qu'il y a pas de remède miracle pour mon oncle que tout est perdu. Faut juste trouver un autre angle de... Y'a toujours... tu vois ? »

Il avait besoin d'y croire aussi. C'était pas parce qu'il voyait la réalité en face qu'il n'était pas capable de positiver. Il n'abandonnait pas vraiment, pas vrai ? Même si c'était vrai qu'il fuyait drôlement ces derniers temps...

« Je sais juste pas comment lui parler. Il se méfie même de moi, ça se voit. J'ai beau lui avoir raconté des heures entières... Ca a pas l'air de l'aider. »

Il avoua quand même, assez abattu. Est-ce qu'il faisait plus de mal qu'autre chose à l'oncle Kane en essayant de lui rappeler ce dont il ne se souvenait pas ? C'était égoïste, non ? Mais lui... il avait besoin que son oncle l'aime. C'était la seule valeur sûre de sa vie, et il n'avait même plus ça.

Bon sang, il ne voulait pas craquer comme ça. Surtout pas devant Finn. Olala. C’était une catastrophe. Il baissa la tête, cachant ses larmes de ses mains, s’essuyant les joues maladroitement. Il renifla. Il voulait aider Finn et voilà que c’était lui qui partait dans une crise de larmes. Bon sang, pire consolateur de l’histoire. Il se crispa au contact de Finn contre son dos mais se détendit vite, en fait, ça lui faisait du bien de sentir sa main lui frotter le dos. Il eut un soupir.

“Non… Non… C’est pas… C’est pas toi… C’est… C’est juste moi… Je pensais… que ça allait mieux…”

Il fouilla dans sa poche pour attraper un mouchoir et s’essuyer le nez. Il se sentait si mal de penser tout ça. Mais le dire à Finn, peut-être que ça l’avait soulagé. ça l’aidait à voir comme l’idée ne lui ressemblait pas. Ce n’était pas lui de penser ça, Finn avait raison, mais… Au moins, il avait craché ce venin qui prenait trop le pas sur sa nature ces derniers temps. Il avait besoin d’entendre les mots de Finn. Qu’ils viennent de lui, cela leur donnait peut-être un peu plus de poids.

“Nate… Il serait tellement triste et déçu… Mais… Tu les as déjà ressenti ces émotions, là ? Toi aussi ?” interrogea-t-il pour se rassurer.

Il hocha la tête. Il devait de ressaisir. Il devait se souvenir de ce qui le portait. De tout ce que ses parents, son frère lui avait appris. Ce pour quoi son frère s’était sacrifié. Il ne devait pas perdre le cap. Il devait se battre, mais pas avec la violence comme alliée, elle n’avait jamais été de son côté, ça n’allait pas changer. Il hocha la tête, essayant timidement de sourire.

“T’es… T’es pas si mauvais pour me consoler…” commença-t-il avec un maigre sourire. “Tu… Tu as raison… Je… Je ferai pas… Pas ce genre de choses… Mais… Mais je crois… que j’avais juste… Juste besoin d’en parler… Avec quelqu’un qui… qui pourrait au moins comprendre… Je suis désolé que… que ça te tombe dessus, Finn… Désolé…”

Il essuya une dernière fois ses joues. Comme pour mettre un point final à cette crise. Pour s’en convaincre. Il était là pour Finn, il devait se ressaisir. Il secoua un coup la tête, et but une gorgée de sa tasse. Ravale ton surplus d’émotion, tu pleureras plus tard. Mieux, tu pleureras pas parce que t’auras retrouvé espoir, Hyacinthe. Il releva son regard encore un peu humide vers Finn. Il ne savait pas trop ce qui s’était passé dans son bureau mais…

“Hey… Ton… Ton “toi” habituel baisserait pas les bras… Je… je suis sûr que tu peux encore faire plein de choses… Et… Et… T’es… t’es le type le plus droit et juste que je connaisse… Après mon frère… Alors… Si… Si quelqu’un peut encore sauver… Sauver quelque chose, c’est toi, Finn…”

Et il y croyait dur comme fer. Il savait que Finn était incorruptible. Et il était certain aussi que son oncle n’avait jamais eu de rapport litigieux avec les DeathWings. Parce que ça ne collait pas. Quelqu’un qui a élevé Finn ne peut pas être quelqu’un de mauvais. C’était comme une erreur dans la machine quoi.

Et pour son oncle, il hocha la tête. Oui, il y avait toujours des possibilités. Au moins, ils n’allaient pas baisser les bras. Il réfléchit une petite seconde aux paroles de son ami. C’était compliqué mais… Peut-être que les paroles n’aidaient pas ?

“Ton… Ton oncle… Tu as essayé de refaire des choses que… que vous aviez pu faire ensemble ? Peut… Peut-être que la mémoire des gestes l’aiderait ? Et puis… Je suis sûr qu’à force, il se souviendra combien il t’aime… Les sentiments, ça reste toujours caché quelque part… Il… Il est juste sous le choc… C’est… C’est parfois long… Tu… Tu sais…” Il marqua une pause, triturant un peu sa tasse. “J’ai… J’ai pas parlé pendant un an… Quand… Quand mes… Mes… Mes pa...pa...parents sont…” Il préféra ne pas dire le mot, toujours affecté. “C’est… C’est… C’est dur de… de comprendre… les chocs… de… De ce genre… On… On réagit tous différemment… Mais… Mais a...a...avec de l’amour et du temps… On… On finit par guérir je crois… Au moins un peu ?”

Décidément, il ne comprenait pas l'autre garçon. Et pourtant il en avait eu un paquet, de copains garçons. Avec lesquels il faisait des conneries, il jouait au Quidditch, il faisait des duels pour rigoler, des échecs... Mais un garçon sensible comme Hyacinthe, jamais. Même son seul copain de sexe masculin, il n'était pas aussi sensible que ça. Enfin pas de cette façon là, il était... délicat, mais fort à la fois. Est-ce que ca voulait dire quelque chose ? Il avait l'impression qu'au moindre faux pas il allait faire pleurer le blondinet, et ça le mettait en péril. Surtout pour un bourrin (gentil mais bourrin) comme lui. Bien sur qu'il avait ressenties ces choses là, et il acquiesça. Mais c'était son rôle de se reprendre, maintenant.

« Sois pas désolé... C'est pas grave. Jt'ai pleuré dessus plein de fois déjà. »

Il dit, en lui donnant un coup de coude complice. Il ne comprenait pas la confiance qu'il avait en lui, après tout ce qui s'était passé. Finn n'avait rien fait d'incroyable depuis la MUL au moins. Rien pour mériter de l'admiration en tout cas. Mais il n'allait pas le contredire, ça n'était pas poli. Même s'il ne croyait pas non plus à ses paroles après. Tout ça, on lui avait dit quinze mille fois, mais le jeune Parker savait que c'était des conneries qu'on se disait pour se rassurer. Il préférait le concret, lui. Pas des mots encourageants qui sonnaient vide quand on avait du chagrin. Peut être que ça lui venait de sa mère, qui lui avait toujours dit les choses telles qu'elles étaient ? Ou Dorian aussi. Sa nature franche faisait qu'il ne comprenait pas tout ça... Mais ce qu'il comprenait parfaitement, c'était cette nouvelle donnée que venait d'introduire le blond.

« Tu as perdu tes parents ? »

C'était con, et demandé de but en blanc alors qu'il avait déjà la réponse, mais il était si sidéré que c'était sorti tout seul. Il s'était imaginé un foyer heureux, un garçon chouchouté, en fait. Il réfléchit un peu plus posément, avant de rajouter.

« Ma mère... j'avais huit ans et j'ai l'impression que mon oncle s'en est jamais remis. C'était sa jumelle, tu vois. Mais il devait s'occuper de moi alors il a jamais rien dit. J'avais l'impression qu'il avait enfin fait son deuil, depuis qu'il voyait quelqu'un. Et maintenant ça... »

Il soupira. Il avait l'impression d'avoir le poids du monde sur ses épaules, et au final, il n'était plus sûr de vouloir parler de tout ça.

« On peut parler d'autre chose... hein. T'as pas envie d'aller dehors ? »

Il avait fini son chocolat chaud d'une traite, et se sentait prêt à affronter la journée. Et se changer les idées, si Hyacinthe était d'attaque à le suivre.

C’était vrai, Finn lui avait déjà pleuré dans les bras, mais… A la base, il était là pour lui, et pas l’inverse. C’était plus ça qui gênait Hyacinthe. Pleurer, il savait que ça arrivait, et ça lui arrivait même plus que de raison. C’était juste qu’il manquait à son devoir d’ami un peu là. C’était l’impression qu’il avait. Heureusement que Finn ne lui en tenait pas trop rigueur.

“C’est...C’est pas faux… Mais… C’était pas obligé que je fasse pareil…”

Il sourit un peu au brun. Se réfugiant un peu dans la nourriture et la boisson pour se donner une contenance avant de reprendre. Il ne s’attendait pas à ce que Finn retienne le seul fait que ses parents soient morts. En fait, cela lui paraissait si évident au fil des années qu’il pensait que c’était limpide pour son ami. Il acquiesça. Il n’allait pas lui donner les détails de cet évènement éprouvant encore pour lui. L’information utile, c’était qu’on finit par se remettre des chocs, même si la voie est parfois étrange ou incertaine. Parfois l’esprit a besoin de se couper de la réalité pour continuer à affronter la vie. Il ne comprenait pas bien ce que Finn lui disait… Mais il nota qu’ils avaient perdu leur mère sensiblement au même âge. Pas que ce soit le genre de chose qu’on veuille avoir en commun avec qui que ce soit mais, c’était notable. Il fronça un peu les sourcils, essayant de détricoter les informations un peu brute. Est-ce que ça voulait dire que son amnésie était la répercussion d’un deuil qu’il n’avait pas fait ? C’était une théorie plutôt intéressante… Mais difficile à creuser…

Il comprit aussi très vite que Finn Parker ne s’ouvrait pas si facilement aux autres. Hyacinthe fut un surpris par sa façon de se lever si prestement mais il comprenait aussi. Finn avait besoin de se changer les idées surement. Il acheva sa boisson et son gâteau pour se lever à son tour. Il était là pour Finn, alors autant suivre ses envies à lui.

“On… On peut… peut aller se promener dans le parc Scamander ! Je me souvenais que… Que t’aimais bien les animaux…” dit-il avec un sourire.

C’était pour ça qu’il avait choisi ce café là. Ils marchèrent tranquillement jusqu’au parc. Et Hyacinthe proposa de commencer par le pavillon africain, il n’avait jamais eu l’occasion de vraiment le visiter. C’était l’occasion ! Il s’arrêtait assez longuement pour observer les animaux, posant parfois des questions à Finn pour savoir s’il avait la réponse à ses questions existentielles. Il pointait aussi parfois les animaux du doigt avec un engouement très enfantin. Il désigna un focifère tout coloré, qui voletait un peu partout avec détermination à Finn.

“Il… Il te ressemble un peu !” pouffa le blond, un peu taquin.

Hyacinthe aurait été plus comparable aux Augureys… Il sourit à Finn.

“ça… ça te plaît comme endroit ?” s’enquit le blond.

Non, Finn n'était pas attentif du tout... Mais Hyacinthe, est-ce si surprenant ? Le griffon n'a pas de mémoire, et surtout il ne se rend pas compte de l'admiration que l'autre lui porte malgré son manque de délicatesse et d'empathie. C'est qu'il essaie, malgré tout, d'être ami avec le blond -il pourrait faire plus d'efforts dit la joueuse !- et ne pense pas que ses défauts puissent le blesser. C'est peut être juste qu'il ne le comprend pas. Qu'il ne voit rien, encore une fois. Ou juste que c'est le pire ami de la terre, aussi. Il faisait un trait sur les choses aussi rapidement qu'il allait faire un trait sur cette conversation. Non, parler de ses sentiments n'allaient pas le faire aller mieux. Il n'aimait pas pleurer sur son sort, pas qu'il reproche à Hyacinthe de vouloir le faire bien sûr, mais c'était juste pas pour lui. Il paya en sortant ses quelques pièces magiques, et ses yeux s'illuminèrent quand Hyacinthe eut la bonne idée de lui proposer d'aller au parc.

« Bonne idée ! »

Et c'est un peu plus enthousiaste qu'il prit la direction du parc avec Hyacinthe, le pas plus léger. Il ne fallu pas longtemps dans l'endroit pour que son moral grimpe au plafond, et ça n'était pas dur à voir. Il répondait sans problème au blond sur quasi toutes ses questions. C'était pas pour rien qu'il avait failli travailler avec des créatures magiques ! Bizarrement, il trouvait toujours le moyen de dire à ce dernier leurs points les plus dangereux et combien de personnes la bestiole pouvait tuer si on ne se méfiait pas, bon. Mais à part ça, il était bien plus agréable comme compagnie qu'un peu plus tôt.

« T'exagère ! J'ai pas l'air si ahuri que ça quand même ! »

Il répondit, mais il riait de bon coeur. Ca va que les focifères étaient cools. Il en profita pour un petit trivia sur ces derniers, en prenant un air spooky en expliquant qu'ils pouvaient rendre fous leurs victimes ! Il ne comprenait pas que Hyacinthe changeait probablement de sujet. C'était passionnant, non ? Et celui là qui gardait ses victimes vivantes pour plus tard ! Et celui là qui imitait la voix de leurs cauchemars ! Et... hein ?

« Bah... oui ! J'adore les animaux même si je préfères quand ils sont dans leur habitat naturel tu vois... Mais c'est cool ici on s'occupe bien d'eux ! »

Ils finirent le tour gentiment. Finn se demandant s'il n'aurait pas mieux faire de poursuivre cette carrière plutôt que celle d'Auror, finalement. Une fois dehors, ils finirent par se dire au revoir. Finn hésita un moment avant de se décider, au moment où le blond allait tourner le dos et rentrer il l'appela par son prénom.

« Merci... pour aujourd'hui. »

Il dit un peu gêné.