That was unexpected | Ulysse & Tomos

Tu n'habitais pas près de la MUL,  c'était un fait. Mais tu savais aussi transplaner, et ce depuis quand même un bon moment, alors tu n'avais jamais considéré cela comme un inconvénient. De toute façon, ce n'est pas comme si tu passais souvent beaucoup de temps chez toi. Ce n'est pas que tu n'appréciais pas le manoir où tu vivais mais presque. C'était un grand manoir acheté par tes parents il y a de ça des années. Ils ne l'ont pas vraiment habité, à vrai dire tu ne savais pas trop pourquoi ils l'avaient acheté. Tu ne t'en plaignais pas, surtout pas étant donné que tu avais pu y vivre dès que tu fus en âge de le faire. Tu préférais vivre seul, il y avait moins de choses dont tu devais te soucier, moins de malentendus.. C'était plus simple. Surtout qu'avec l'aide de la magie, rien n'était impossible, même seul. Mais tu peinais à t'y sentir chez toi. Tu ne le décorais pas, tu ne t'y détendais pas. Alors tu n'y passais pas énormément de temps. Tu avais mieux à faire.

Comme aujourd'hui en soi. Tu étais en ville, à Londres. Non pas sans but, tu avais des choses à acheter pour compléter un cours. Tu savais que ça devrait se trouver facilement, mais ça ne t'empêchait pas de prendre ton temps et de regarder si tu ne pouvais pas trouver d'autres choses. Des envies futiles, on ne savait jamais. Résultat des courses,tu n'avais pas encore trouvé ce que tu cherchais et tu te plaisais plutôt bien à rester en ville. C'était toujours plus intéressant que de rester à ne rien faire. Mais tu devais un minimum faire attention à ton horaire, t'avais pas envie de faire n'importe quoi. T'avais donc considéré l'idée de rentrer chez toi, d'ici peu de temps. Puis t'avais entendu un truc que t'entendais pas souvent. De la musique, pas de la musique que t'entendais souvent non plus. Ta mère jouait du piano, quand t'étais plus jeune. T'avais toujours adoré ça, le piano, la musique en général. C'était agréable à entendre, donc presque par instinct tu t'étais rapproché de la source de la musique. Tu t'en étais douté, il s'agissait d'un musicien de rue, et tu ne comptais pas vraiment t'arrêter, juste lui laisser de l'argent et rentrer chez toi.

Mais t'avais levé la tête à un moment en repartant, ce qui t'avait fait t'arrêter. T'avais l'impression de reconnaître le musicien en question et ça te perturbait. T'avais du te concentrer un moment. Mais t'avais fini par te demander comment t'avais fait pour ne pas le reconnaître tout de suite. Di Scipio, ça faisait un moment que tu ne l'avais plus vu. Ca t'avait surpris, pas pas spécialement désagréablement. Il faisait partie des personnes que tu avais apprécié durant ta scolarité, tu ne voyais pas pourquoi tu devrais l'ignorer. Au moins prendre de ses nouvelles, ça ne pourrait pas être une mauvaise chose. T'avais quand même attendu qu'il ne finisse son morceau, avant de te rapprocher de lui pour l'aborder.

« J'aurais pas pensé te revoir un jour, Ulysse. Ca fait quoi, plus de dix ans ? »

Oui, au moins, ce que tu venais de réaliser. Tu comprenais déjà mieux pourquoi t'avais mis un moment à le reconnaître, et t'avais commencé à te préparer à l'éventualité que lui ne te reconnaisse peut-être pas. Pas que tu ne lui en voudrais.

« Je.. Sais même pas si tu te souviens de moi, Tomos Selwyn, Serdaigle, j'avais une année de moins que toi. »

T'avais un peu souri, en lui tendant une main histoire de le saluer plus poliment.

Depuis quelques semaines, Ulysse avait repris un rythme presque régulier. Jour après jour, il venait se poser dans les rues du Londres sorcier pour chanter et jouer du ukulélé.  L'envie n'y était pas toujours mais le besoin de se sustenter le faisait tenir, le reste du temps. C'était toujours les mêmes chansons. Des vieux morceaux de rock moldu des années 80 et 90, pour la plupart. Il ne se lassait pas de certains classiques, même s'il les jouait pratiquement tous les jours.

The wind will blow into your face as the years pass you by...

Et de plus en plus, il prenait conscience de l'aspect thérapeutique que la musique avait sur lui. Ça lui faisait du bien, de chanter et de jouer. Malgré les automatismes qu'il avait acquis au fur et à mesure des années, malgré les paroles qu'il connaissait par coeur, les accords que ses doigts jouaient sans même sembler y penser, jouer lui demandait toute son attention. Et c'était autant qui ne pouvait penser à rien d'autre. Qui ne pouvait ni ressasser en boucle les mauvais souvenirs, ni penser à tout ce qu'il n'avait pas fait, tout ce qui avait raté dans sa vie, tout ce qu'il avait manqué et tout ce qu'il regrettait. Les soirées lui laissaient bien le temps de se rattraper là dessus. Seul l'alcool savait anesthésier ces pensées là. Avec bien plus d'effets secondaires que la musique....

Close your eyes and you will find passage out of the dark

Il ne prêtait plus tellement attention aux paroles. Au fond, ces chansons importaient à ses yeux moins pour les messages qu'elles véhiculaient que pour les souvenirs emprunts de nostalgie qu'elles ravivaient. Avec elles étaient ancrés certains souvenirs d'enfance bien précis. A l'époque, son père passait et repassait ces disques là. Et la musique faisait tout ressurgir.

Here I am, will you send me an angel

Il termina le morceau, leva le nez en voyant des pieds se rapprocher de lui. Et leva les sourcils de surprise. Le visage ne lui était pas inconnu. Il connaissait cet homme. Ses souvenirs n'étaient pas aussi anciens que ceux de ses vieux morceaux de rock mais pas loin. Il pencha la tête, regarda intrigué l'homme le saluer. Posant son ukulélé au sol, il se redressa pour se mettre à hauteur de l'homme qui le toisait. Alors il connaissait son nom... il aurait fallu un peu plus de temps à Ulysse pour se souvenir. Mais le blondinet le devança. A son tour, il sourit. Tomos. Oui, ça lui disait quelque ch... oh ! Oui, bien sûr !

"Tomos ! Bien sûr que je me souviens ! Ca fait... bien plus de dix ans, ouais !"

Il hocha la tête. Comme la plupart de ses connaissances de Poudlard, Ulysse avait perdu le blondinet de vue lorsqu'il avait fugué avec Ariès. Il se souvenait qu'il l'appréciait. Ils s'étaient entraidés quelques fois, Ulysse lui avait appris quelques petits trucs. C'était une autre époque...Il attrapa la main tendue, la serra en retour.

"Qu'est-ce que tu ... fais ici ? Tu vis à Londres alors ?"

C'était toujours bizarre, de retrouver d'anciennes connaissances. Surtout ceux qu'il avait appréciés. Il savait l'image qu'il renvoyait. Il ne l'aimait pas.

"C'est gentil de t'être arrêté !"

Il lui sourit. Difficile de savoir si c'était sa gueule qui avait ravivé des souvenirs ou si c'était sa musique qui l'avait intrigué mais c'était... probablement une preuve de sympathie de sa part d'avoir attendu pour le saluer.

Tu l'avais vu sourire, et t'avais l'impression que c'était un bon début. Qu'il se souvenait effectivement de toi. Et tu en avais eu la confirmation, il se souvenait de toi. Ca t'avait fait sourire, et t'avais même eu un léger rire de soulagement. T'aurais eu l'air tellement con s'il ne s'était pas souvenu de toi, en fait. T'aurais eu l'air con, et tu te serais probablement confondu en excuses avant de partir à grands pas rapides.

« Ca fait vraiment longtemps ! T'as pas tant changé que ça, j'ai l'impression !  »

Si tu l'avais reconnu, c'est qu'il n'avait pas trop changé oui. T'avais une mémoire plutôt visuelle. Mais t'avais gardé un bon souvenir d'Ulysse, c'était certain. Il était plus âgé que toi d'un an, et ça avait été assez pour que tu ne l'admires un minimum. Même si tu ne te souvenais pas de toute ta scolarité à Poudlard, ça te faisait plaisir de revoir un ami, t'avais l'impression que t'arrêtais plus de sourire. T'allais finir par te faire mal aux joues, peu habitué comme t'étais.

« Ah, j'habite pas du tout ici ! J'étais venu acheter quelque chose pour mes cours, je suis professeur de botanique à la MUL maintenant.. ! J'habite le manoir que mes parents ont acheté mais jamais habité, au fin fond du Pays de Galles. Et toi, t'habites près d'ici ? »

Tu le supposais, mais tu n'en savais tellement rien. Tu ne savais pas du tout ce qu'il avait pu vivre durant toutes ces années, tu ne savais rien du tout. Et en toute honnêteté, ça t'intriguait fortement. T'avais toujours été curieux par rapport à beaucoup de sujets, peu de chances que ça ne change maintenant. Mais t'allais pas commencer à lui poser des milliers de questions comme ça, ça ne se faisait pas vraiment.

« Je me serais mal vu directement repartir une fois que je t'ai reconnu, comme on dit ça fait vachement longtemps qu'on s'est pas vus, et franchement je me suis plusieurs fois demandé ce que tu devenais. Je te paie un café, ou un verre ? »

C'était une proposition totalement aléatoire, il avait le droit de refuser, il était peut-être occupé ou n'en n'aurait peut-être juste pas envie, mais au moins, tu l'aurais proposé. Et ça serait un bon moyen de prendre de ses nouvelles, de discuter un peu. Mieux en tout cas que de rester dehors.

C'était pas souvent qu'il croisait de vieilles connaissances de Poudlard. Et c'était beaucoup plus rare qu'on le reconnaisse avec le sourire. Les rumeurs de sa liaison avec Ariès et son départ précipité avaient fait l'objet de toutes sortes de critiques, à l'époque. Ca leur était passé au dessus parce qu'ils étaient insouciants, jeunes, heureux. Mais les regards pleins de jugement de ses anciens camarades restaient. Pas Tomos. En tout cas, son sourire était radieux. A un point qu'il devenait communicatif. Il secoua la tête, à la remarque du blondinet. Soit c'était un compliment tombé du ciel, soit.. boarf. Il haussa les épaules. Il avait l'impression d'avoir changé, lui. En tout cas sa vie avait changé. Tellement de fois. Son visage, il n'en savait rien. Et d'ailleurs, il aurait pu retourner la remarque au plus jeune, qu'il avait reconnu sans difficultés.

"Oh, à la MUL ? Ca doit être intéressant !"

Il laissa un blanc. Un manoir... A quel point c'était pathétique de parler de lui, à côté de ça ? Oui, c'était lui-même qui avait posé la question en premier. Il n'empêche qu'il aurait préféré qu'elle ne lui revienne pas. Il se mordilla la lèvre. Ca lui apprendrait, hein.

"Je... j'ai pas vraiment de manoir, non.."

Et on en resterait là pour les détails, il préféra ne pas lui en donner plus. C'était peut-être un peu tôt pour lui expliquer qu'il squattait de temps à autre chez Pandora, qui était devenue sa femme, qu'il logeait aussi chez d'autres connaissances de temps à autre et que le reste du temps, c'était des squatts ou la rue. Enfin, si Tomos n'était pas idiot, il devait se douter que pour chanter dans la rue en jouant du ukulélé, il ne logeait à priori pas dans une villa.

Quoi qu'il en soit, un verre proposé, ce n'était jamais une mauvaise idée. Surtout lorsque c'était gentiment proposé. Ca tombait bien, la journée n'était pas encore finie mais il n'avait pratiquement rien amassé.

"C'est pas de refus pour le verre ! Laisse-moi juste ramasser..."

Il se baissa à nouveau, récupéra la housse de son ukulélé et les maigres recettes à l'intérieur. Et remplia tout le reste d'un coup de baguette magique. Son instrument de musique se glissa dans sa housse puis dans son sac à dos, sa veste se replia et se faufila à l'intérieur avec le reste de ses affaires. Il jeta le tout sur son dos et fit signe à Tomos qu'il était prêt à le suivre. La rue regorgeait de bars et ils ne tardèrent pas à trouver un endroit qui leur convenait. Tous deux prirent place sur une petite terrasse à l'ombre de quelques grands arbres. Le soleil était encore bien haut et les tables déjà bien remplies.

"Ca doit être super, la MUL ! Tu y enseignes depuis longtemps ? J'était enseignant à Poudlard avant, de soins aux créatures magiques, c'était génial !"

Quelle bonne idée, une autre pente glissante ! Mais il n'avait pas envie de n'avoir l'air que de ce qu'il était, un sans domicile fixe qui essayait de survivre en jouant de la musique. Les années avaient beau être passées, il avait toujours du mal à assumer au grand jour l'image qu'il renvoyait de lui-même. Peut-être que dans sa tête, il rêvait à une autre vie. Sans trop savoir laquelle...

Rapidement, t'avais hoché la tête. Aussi merdique que puisse potentiellement être la vision que t'avais de ta vie, une chose était sûre, t'aimais ton travail. C'était vraiment une des choses que tu trouvais les plus positives à ta vie. C'était intéressant, oui. T'apprenais à des gens qui avaient un minimum envie d'être là, et toi même ne cessais jamais réellement d'apprendre. Tu ne t'ennuyais généralement pas, là-bas.

« Ohh, t'as pas idée. Mon père insistait pour que j'aie un emploi rasoir au ministère, ne pas l'écouter était probablement une des meilleures décisions de ma vie.   »

Est-ce que t'avais fait une bourde ? C'était possible, tu ne savais pas. T'avais pas forcément fait attention à ce que tu disais, content et enthousiaste que t'étais. Mais t'étais aussi plutôt observateur, et t'avais bien noté un certain malaise. Alors t'avais juste un peu souri.

« Ehh c'est pas plus mal tu sais. Habiter seul dans un vieux manoir sombre c'est pas ce qu'il y a de plus fun, parfois j'y ai même peur de mon ombre.  »

Sans blague, ça t'étais arrivé une fois. Parce que t'avais bu. Mais t'avais surtout dit ça sur le ton de l'humour, parce que ça ne faisait généralement pas de mal. Dans tous les cas il avait accepté d’aller boire un verre avec toi. Son approbation avait apporté un nouveau sourire sur ton visage, et t’avais hoché la tête en attendant qu’il eut fini de ranger ses affaires. T’étais sûr que ça allait être sympa. Tu l’avais suivi, avec un entrain que tu ne te connaissais pas spécialement, mais qui ne te dérangeait pas. C’était sympa, le coin que vous aviez trouvé, et ça poussait à la conversation. Tu t’étais confortablement assis, et t’avais croisé les bras.

« Franchement, ça l’est ! J’aurais pas pensé autant aimer. Ça fait un peu plus de cinq ans, maintenant. J’ai mis un moment à me décider et à me spécialiser. Ouais ? C’est super sympa, ça ! C’était pas forcément ma matière fétiche mais c’est super intéressant. T’as bien aimé, je suppose ? Ça fait une bonne expérience professionnelle en plus. »

T’avais hésité entre Poudlard et la MUL pour enseigner, mais d’abord tu partais avec une préférence pour la MUL, et ensuite t’étais pas sur qu’à ce moment là à Poudlard le poste soit libre. Soit, avec ça t’avais commandé un café une fois le serveur à votre niveau, après avoir laissé Ulysse faire son choix.

Clairement, ils ne vivaient pas dans le même monde. Quand il repensait à son père... Non, il préférait ne pas y repenser. Ni au manoir qu'il n'avait pas, parfois. Ulysse haussa les épaules. Lui aussi, il s'était fait quelques flips, dans les squatts où il trouvait refuge parfois. C'était ouvert à tout le monde et il n'était pas mécontent d'avoir sa baguette sous l'oreiller, vu ce qui traînait là bas. Mais pas la peine d'apitoyer un quasi inconnu là dessus. Il préféra sourire, ne rien ajouter d'autre. Ce n'était pas tellement dans ses habitudes de s'épancher sur sa vie. Ni sur le reste, d'ailleurs, ce n'était pas un grand bavard, le gaillard. Mais il faisait des efforts, faut pas croire.

"Et.. c'est quoi ta matière fétiche ?"

C'était curieux d'enseigner une matière qu'on ne tenait pas particulièrement à cœur, il lui semblait. Mais c'était de la part d'un type qui avait pris un poste pour enseigner les soins aux créatures magiques juste pour revoir son ex... On ne pouvait pas dire que c'était sa passion non plus, même s'il avait toujours apprécié la présence des créatures fantastiques. A son tour, il se commanda une bière lorsque le serveur arriva.

"C'était... ouais, j'suis pas sûr que les gens s'intéressent vraiment à mon expérience professionnelle, tu sais..."

Pour jouer dans la rue, on lui demandait que dalle. Personne s'intéressait à ce qu'il avait fait avant et il ne leur demandait pas autre chose, d'ailleurs. Le serveur arriva rapidement avec leurs consommations. Ulysse attrapa sa bière, hésita et se retint de trinquer avec un café. A la place, il se contenta de lever son verre et de l'entamer.

"T'es resté en contact ? Avec... les gens de Poudlard ? J'ai perdu avec beaucoup quand..."

Pas la peine de finir, hein ? Oui, c'était une manie de laisser les choses en suspens. Pas que ses phrases ou ses pensées, d'ailleurs. Il n'avait pas forcément prévu de partir définitivement, lorsqu'ils s'étaient enfuis avec Ariès. Il avait perdu tout contact. Et pendant des années, il s'en était contenté. Jusqu'à ce qu'il se retrouve seul. C'était bien plus difficile, à présent...

T'avais des souvenirs assez précis de ta scolarité. Enfin ça dépendait du sujet, mais tu te souvenais ne pas avoir eu de difficultés particulières avec quelque matière que ce soit, mais comme pour tout, il y en avait que t'aimais moins. Et du coup, tu travaillais moins pour ces matières. Logique.

« J'ai toujours préféré le cours de potion et de botanique ou bien encore de sortilèges.   »

Mais t'étais content d'en avoir fini avec les études, en fait, c'était quand même mieux de ne plus avoir à avoir à supporter une quelconque figure d'autorité, en fait. Enfin si, il y avait le directeur, mais ce n'était pas vraiment la même chose. Soit. T'avais été plutôt surpris par sa réponse, mais de nouveau t'avais préféré ne pas trop pousser. T'avais plutôt commencé à siroter ton café, encore un peu trop chaud pour le moment. T'avais relativement aisément compris la suite de sa phrase, en soi.

« Non, pas vraiment, et toi.. ? J'avais pas masse d'amis, et après.. La mort de mon père, j'ai un peu coupé les ponts avec presque tout le monde. Enfin ça m'arrive de recroiser d'anciens amis, comme aujourd'hui.  »

T'avais un peu souri, parce que c'était vrai. Bon, ça n'arrivais pas tous les jours. Ca serait un peu bizarre.

Comme quoi, il n'était pas le seul à avoir eu une expérience de Poudlard pas si idyllique. Ulysse fronça les sourcils, en l'entendant parler de la mort de son père. Il n'était même pas au courant. Ou l'avait-il été ? C'était une autre vie, Poudlard, il se souvenait à peine des visages et des noms alors leurs histoires... Enfin, c'est pas comme si ça lui importait vraiment. C'était une autre époque, hein. Maintenant révolue.

"Ouais, ça m'arrive pas souvent !"

Le seul qu'il croisait assez régulièrement, finalement, c'était Nathanael. Et ... ouais, non, changeons de sujet. Il sirota sa bière, échangeant quelques nouvelles de plus avec Tomos. Ca faisait bizarre d'être avec quelqu'un dont il avait été assez proche et d'être aussi distant. Mais... si le visage et le nom étaient familiers, il n'en était pas moins en face d'un presque étranger, en ce moment. Et Ulysse n'était pas des plus bavards, face aux étrangers. Déjà qu'avec les autres ce n'était pas simple...

Il termina sa bière, remercia une nouvelle fois Tomos de lui avoir offert ce verre. La journée touchait à sa fin, il ne retournerait sans doute pas jouer à cette heure-ci. De toute manière, les soirées, il n'amassait pratiquement rien. Alors...

"Merci encore ! Et passe une bonne soirée ! C'était chouette de te revoir !"

Il lui sourit, une fois qu'ils étaient sortis du bar et que Tomos avait réglé l'addition. Il allait s'éloigner mais refit un pas dans sa direction. Peut-être qu'il n'avait pas envie d'être seul, ce soir. Allez savoir...

"A moins que..."

Il fouilla dans ses poches. Y'avait tellement trois fois rien. Offrir un verre sans avoir les moyens de le payer, c'était vachement moins la classe quand même... Mais hé, peut-être que..

"J't'offre un demi-verre ? Pour te remercier ? Ou t'as peut-être un truc à faire ce soir, j'veux pas te déranger..."

Il sortit les quelques pièces de sa poche. Une fortune ! Ouais, s'ils partageaient un verre, il pourrait peut-être le payer. On était encore en happy hour, après tout, de quoi se payer une belle pinte de la bière la moins chère du marché.. Ou un café, si Tomos ne carburait qu'à ça. Lui, il préférait clairement la picole.

Eh bien ça valait bien la peine de se faire des amis à l'école, si c'était pour ne plus les recroiser. T'avais souri parce que c'était un peu triste, mais c'était comme ça. Au moins t'étais pas le seul à qui c'était arrivé. Peut-être que ça arrivait à tout le monde. Mais t'étais sûr que ça arrivait pas à tout le monde de retomber sur quelqu'un d'aussi sympa, et de pouvoir juste aller boire un verre tranquillement comme ça sans se prendre la tête. Parce que t'avais si peu envie de te prendre la tête là maintenant. Vraiment pas.

Et le café t'avais franchement fait du bien. Là, tu te sentais déjà un peu plus prêt à rentrer chez toi. A dormir surtout, donc oui autant que tu le fasses chez toi.

« Merci à toi ! A toi aussi, j'espère qu'on se recroisera. »

Ca pourrait être sympa, oui. Boire un autre verre aussi, ça pourrait être pas mal. T'allais repartir, pour rentrer chez toi mais Ulysse était assez vite revenu vers toi. Tu ne t'étais pas forcément attendu à ce qu'il ne te propose ceci, mais tu n'y voyais absolument aucun inconvénient. Au contraire.

« Avec plaisir ! T'inquiètes pas, j'ai rien à faire, je comptais juste rentrer chez moi et à choisir, je préfère rester dans le coin. Puiiis je me dis qu'une bière ne pourrait pas me faire de mal, le café c'est sympa un moment mais faut pas pousser. »

Et tu connaissais des bons endroits où boire des bières pas chères et pas mauvaises du tout. Donc t'allais lui proposer d'y aller, et avec un enthousiasme certain. Peut-être était-ce à l'idée de boire de l'alcool. Tu ne savais pas pourquoi t'avais essayé de te voiler la face en prenant juste un café tout à l'heure. Erreur que tu ne reproduirais pas.

Ça faisait jamais de mal, une bière, hein.. Ils étaient deux à le penser, il semblait. Ulysse n'était pas mécontent de s'être décroché un compagnon d'un verre. Ou plusieurs... Mais il n'avait pas suffisamment de sous pour plusieurs.

"J'te suis ! Tu connais les bons endroits ?"

Il faut dire que les derniers temps, printemps aidant, il n'était plus tellement allé dans des bars. Il se contentait d'acheter de l'alcool en supermarché et de le consommer chez Pandora, dans un squatt ou dans un parc, ça revenait bien moins cher. Mais c'était un peu moins sociable, les deux dernières options. Il ne serait pas mécontent de boire en bonne compagnie, pour une fois !

Ils arrivèrent devant un bar qu'il ne connaissait pas. A l'aspect, ça avait l'air assez récent comme établissement. Pas de très haut standing et ça lui allait bien. La bière semblait particulièrement abordable en happy hour, suffisamment pour qu'il puisse se permettre de réellement en offrir une à Tomos.

"La première tournée est pour moi !

Ils s'installèrent à une petite table au fond du bar et Ulysse se leva pour aller chercher leurs consommations. Il revint un peu plus tard avec deux demi de bière et en déposa un sur la table avant de trinquer avec l'autre.

"A ... Poudlard ? "

Et c'était un vœu en l'air. On était bien loin de s'imaginer que quelques semaines plus tard, leur ancienne école partirait en feu et en fumée. L'heure n'était pas encore à ça. Mais juste à trinquer et se rappeler un peu du bon vieux temps. Ils évoquèrent leurs souvenirs. Le vieux professeur de potions, toujours en train de radoter et de les réprimander parce qu'ils ne découpaient pas bien leurs feuilles d'orties. La prof de Défense contre les forces du mal, toujours à côté de la plaque mais tellement badass quand elle s'y mettait... Des souvenirs comme ça, il y en avait des tonnes. Suffisamment pour que leurs demi se vident en un rien de temps.

"Si tu devais refaire, tu ferais les choses différemment ?"

Il demanda, en scrutant le fond de son verre. Il n'osait pas demander à Tomos s'il voulait bien leur en payer un autre. Ca ne se faisait pas. Mais lui, il était à court de thunes ...

Ahh, si tu connaissais les bons endroits. Tu fréquentais les bars de Londres depuis tellement longtemps que oui, t'avais fini par retenir quels étaient les bars qui méritaient d'être fréquentés.

« Et un peu, que je les connais. Tu seras pas déçu du voyage ! »

C'était pas non plus le meilleur bar du pays, certainement pas, mais vous y serez bien installés et tranquilles pour boire une bière. T'étais peut-être même un peu plus souriant que tout à l'heure, même si tu doutais du fait que ce soit déjà l'alcool qui te montait à la tête , surtout pas avec un demi verre comme ça. Que t'allais savourer, après avoir trinqué avec Ulysse.

« A Poudlard, oui. »

Parce que vous vous y étiez connus, après tout. Et tu n'y avais pas non plus détesté tes années là-bas, de toute façon. Les dernières étaient peut-être un peu plus difficiles, mais t'avais dans l'ensemble préféré. La question d'Ulysse t'avait fait réfléchir. C'était une bonne question, qui méritait plus de réflexion que tu n'étais capable de lui en accorder.

« Ca dépend par rapport à quoi mais dans l'ensemble, oui, je pense.. Ma scolarité ne changerait pas beaucoup je pense, j'aime ce que je fais.. Dans l'ensemble. Mais comme beaucoup de gens je pense, j'ai des regrets par-ci par-là.. »

Par rapport à beaucoup de choses. Si tu n'en n'avais pas, tu boirais moins. Tu ne vous aurais peut-être pas recommandé un verre chacun, si t'avais moins de regrets. Par rapport à ton père, que t'avais peut-être jamais rendu fier. Tes études qui auraient pu être plus glorieuses. Enfin soit. Un sourire un peu triste avait étiré tes lèvres.

« J'envie ceux qui n'en ont aucun. »

Est-ce que c'était vraiment une bonne chose, de lancer des sujets déprimants comme ça ? On se le demandait vraiment. S'il fallait faire le bilan de sa vie actuelle, autant se noyer directement dans son verre. Qu'il avait désormais vide. Avant que Tomos ne leur commande les suivants. Ulysse le remercia, alors que deux nouvelles bières arrivaient sur la table. Il fit claquer son verre contre celui du blondinet une fois encore et entama la deuxième tournée. Il avait une bonne descente, surtout lorsqu'il s'agissait de bières. Si Tomos les laissait continuer dans leur lancée, il allait le ruiner.

"J'sais pas s'il y a beaucoup de gens qui n'ont rien à regretter ..."

Pas dans ceux qu'il connaissait, en tout cas. Chacun traînait ses déceptions et ses déboires. Certains - comme Ulysse- plus que d'autres.

"Mais notre vie serait peut-être pas meilleure. Si on faisait d'autres choix."

Oh. De plus en plus joyeux, cette conversation, dites-donc. Dans les livres qu'il avait lus, ceux qui parlaient de voyages dans le temps, c'était toujours de pire en pire. En voulant améliorer les choses. On les empirait. Et ça collait bien avec sa vie, ça aussi. Il soupira. Le pauvre Tomos. Il l'avait traîné dans un sacré traquenard, à lui proposer un verre pour déprimer avec lui. Alors il tenta des sujets un peu plus joyeux. Des souvenirs de Poudlard, à nouveau. Parce que c'est ce qui les unissait. Et qu'il n'était pas tellement du genre à raconter sa vie actuelle. Surtout vu le désastre que c'était, ces derniers temps. Ils terminèrent ce deuxième verre en se remémorant d'anciens camarades, enchaînèrent sur le troisième puis le quatrième, cinquième. A ce stade, les choses n'étaient plus tout à fait droites autour d'eux. Il était peut-être temps de songer à rentrer...

"J'suis bien content d'être tombé sur toi, Tomos ! T'es de super bonne compagnie, merci pour les verres et ..."

Il se leva. Whops. Il ne tenait vraiment pas très droit. C'est que d'habitude, quand il buvait, il était posé sur un banc ou sous un porche. Il ne s'amusait pas à se promener. Il se raccrocha à Tomos, manquant de lui tomber dessus.

T'avais réfléchi à ce qu'Ulysse venait de dire. C'était peut-être vrai, mais vous ne pouviez pas savoir après tout. Qu'est-ce que t'aimerais changer dans ta vie pour qu'elle aille mieux ? Déjà le fait de moins boire pourrait aider. C'était mal parti, mais t'avais absolument pas eu envie de juste vous arrêter là alors que vous étiez en train de discuter.

« T'as peut-être bien raison. On est peut-être juste. Malchanceux.  »

Super, ouais. T'avais arrêté de sourire pendant un moment, mais ça avait fini par revenir, au fil des diverses discussions. Avec l'alcool aussi qui, étonnamment, ne venait pas à manquer. Ça t'avait même fait rire au moment de payer parce que tu ne t'y étais pas vraiment attendu, mais c'est pas comme si c'était une fortune, t'avais été content de le faire. T'étais bien plus content qu'en arrivant ici en fait, même.

« Pareil pour moi ! J't'en prie, j'ai passé uuun très bon moment avec toi. Merci beaucoup. »

T'avais un peu ri en le voyant ne pas tenir droit, mais t'étais pas mieux en fait. T'avais voulu l'aider tant bien que mal à tenir debout. Ca, et marcher jusqu'à l'extérieur du bar. L'air frais faisait du bien même si au début, ça t'avait juste déstabilise et une nouvelle fois fait tituber.

« T'aaas besoin que que j'te ramène quelque part ? J'ai encore du temps à perdre et.. Faudrait pas que tu tombes, ou quoi que ce soit.»

Tu ne savais pas pourquoi subitement, ça t'inquiétait. Mais tu préférais demander.

A la fois, Ulysse était ravi d'avoir retrouvé Tomos, à la fois les sujets de discussion, emprunts de nostalgie, tapaient là où ça faisait mal. Rendant ces retrouvailles particulièrement douloureuses. Heureusement, la bière coulait à flot, Tomos semblait bien décidé à les rincer de suffisamment de tournées pour oublier un peu tout ça. Et sans grande surprise, les sujets devinrent plus joyeux, les rires et sourires un peu plus présents à mesure que leurs verres se vidaient.

Au point que le blondinet se marre même de l'addition. Ulysse avait ajouté sa part, pour les premiers verres en happy hour. Il n'avait pas d'argent pour le reste, de toute façon. Au moment de partir, l'un comme l'autre se sentaient bien mieux qu'à l'arrivée. Merci l'alcool, remède à tout. Ce n'était pas le raton qui dirait l'inverse. Et le professeur non plus mais ça, il l'ignorait.

"Merci à toi ! C'est toi qui a quasiment tout payé.. c'était cool !"

Ils s'aidèrent tous deux à marcher jusqu'à la sortie, non sans galérer vu leurs états respectifs. Mais à force de titubement, de raccrochage aux poteaux du bar, ils finirent par rejoindre l'air frais de la nuit. Ulysse fronça les sourcils. Il n'avait pas totalement occulté que Tomos avait avoué vivre dans un manoir. C'était tentant, un manoir. Plus que les squats ou les parcs. Mais c'était un peu tôt, peut-être. Il ne le connaissait qu'à peine. Et il n'avait aucune envie d'attirer la pitié à lui après une si bonne soirée. Alors le voir le raccompagner jusqu'à un squatt miteux ou un banc dans un parc ? Non, ça ne semblait pas être une très bonne idée...

"Non, t'en fais pas pour moi ! J'vais réussir à marcher !"

C'était un vœu pieux, vu l'état de son équilibre. Mais à petits pas, il parviendrait à retrouver son chemin. Et puis il n'avait pas à aller bien loin. N'importe quel banc ferait l'affaire, le temps de décuver.

"Rentre bien Tomos ! Et tombe pas non plus !"

Il s'avança vers lui, pour le serrer dans ses bras. Avec toute l'affection dont il savait faire preuve lorsqu'il avait trop bu. Et déposa un baiser sur la joue du blondinet, lorsqu'il s'écarta. Pour le remercier pour tout ça. Avant de le saluer et de tourner les talons. Non sans manquer de perdre l'équilibre une nouvelle fois. Mais il avait toute la nuit pour arriver jusqu'au banc. Rien ne pressait vraiment.

T'étais content d'avoir pu lui payer un verre, voir plusieurs. Content d'avoir pu lui faire plaisir, content d'utiliser ton argent pour quelque chose d'un minimum utile. Parce que ça avait été utile, en soi. Ca vous avait permis de discuter, de vous souvenir de vos années à Poudlard, et ça n'avait pas été désagréable. T'avais passé une très bonne soirée, et t'espérais que vous pourriez vous recroiser, retourner boire des verres. Peut-être discuter encore, vous n'aviez sans doutes pas abordé tous les sujets à aborder lors de retrouvailles du genre.

Enfin ça te paraissait être une bonne idée, là maintenant, après avoir bu. Tu n'avais pas non plus énormément bu, sinon tu serais certainement dans un état pire que celui dans lequel tu te trouvais actuellement, tu ne ferais pas que pouffer de rire toutes les vingt secondes et tituber. Tu serais dans un état beaucoup plus inquiétant. T'avais été un moment inquiété pour Ulysse, savoir où il allait dormir, et puis tu réalisais bien même dans cet état que ça ne te regardait pas. Donc tu t'étais contenté de sourire.

« Si tu le dis ! Merci, c'était une bonne soirée ! J'essaierai maiiis je ne peux rien promettre !  »

T'avais un peu ri, et t'étais parti après ce baiser sur ta joue. Enfin parti, c'était un bien grand mot. Tu t'étais posé un moment contre un mur, pour souffler un peu et te concentrer. Parce que t'allais pas rentrer autrement qu'en transplanant. Ce que t'avais fini par faire, il fallait croire que ta motivation à retrouver ton lit était assez élevée pour te permettre de réussir.